À l'approche du 150ème anniversaire de la canonisation de sainte Germaine

Sainte Germaine de Pibrac

À l’approche du 150ème anniversaire de la canonisation de sainte Germaine

1867-2017 : voilà cette année 150 ans que sainte Germaine de Pibrac a été canonisée. Nous aurons l’occasion d’y revenir pendant l’année, notamment en juin, autour de sa fête.
Dans le cadre de cet anniversaire, un pèlerinage à pied de 5 jours est organisé, entre Notre-Dame de Saint-Bernard et Pibrac, du 3 au 7 avril 2017.

 

Une sainte extraordinaire

Accoler l’épithète d’extraordinaire à une sainte aussi discrète et méconnue de son vivant que sainte Germaine peut sembler paradoxal. Pourtant la pastourelle de Pibrac est bien de la trempe des saints qui sortent du commun.

L’originalité des saints

D’emblée, une chose est certaine : tous les saints sortent de l’ordinaire. Simplement parce qu’ils ont été les amis de Dieu et de Jésus-Christ, et que Dieu et Jésus-Christ sortent de l’ordinaire. Soutenir le contraire relèverait de la duperie pure et simple. Jésus a eu beau être l’un de nous, et s’être mis à notre portée, il est venu nous apporter la grâce, la vie même de Dieu. Et un tel résultat sort des sentiers battus ! Une certaine théologie nous a décrit Dieu comme un pote sympa, un brave type comme on en rencontre au coin de la rue... C’est pour le moins une vue réductrice du mystère de l’Incarnation !
Ne soyons pas dupes des mots. Nous devenons conformes à ceux que nous fréquentons régulièrement. Les saints ayant fréquenté assidûment Jésus-Christ lui sont devenus semblables. C’est-à-dire qu’ils sont devenus extraordinaires ! Ce qui ne signifie pas qu’ils échappent à notre condition.

Un processus de canonisation initié par Dieu en personne

Mais la singularité de Germaine tient à d’autres motifs. Le premier est la modalité de sa canonisation. Généralement, pour qu’un homme ou une femme soit déclaré saint par l’Église, deux conditions sont à remplir : la première (évidente) est la sainteté de l’impétrant. La seconde, que ce dernier soit reconnu comme tel par une partie de ses contemporains. En effet, si personne ne vous considère comme un saint, qui portera votre cause à Rome ?
Pour l’Italie du XIIème, François d’Assise était un saint, bien avant qu’il ne décède et que le pape ne le canonise. Saint Joseph-Benoît Labre a été canonisé par le peuple de Rome dès le jour de sa mort – ce qui veut dire que le peuple romain avait reconnu en lui, de son vivant, un authentique ami de Jésus-Christ. Et qui soutiendra que la sainteté de Thérèse de Lisieux n’a pas éclaté bien avant qu’elle n’ « entre dans la Vie  », selon ses propres termes ? Sa supérieure lui aurait-elle demandé sans cela d’écrire son autobiographie ?
Si Germaine remplit la première condition, en revanche elle ne coche pas la case de la seconde. Non, elle n’a pas été reconnue comme une sainte par ses contemporains ! Comment l’Église est-elle parvenue alors à la canoniser ? Tout simplement parce que Dieu s’est chargé en personne de mener à bien le processus qui la hisserait sur les autels ! Première originalité de notre pastourelle. Comment s’y est-Il pris pour cela ?
Germaine meurt, isolée et délaissée de tous, en 1601. Elle est enterrée à l’intérieur de l’église paroissiale de Pibrac. Quarante ans après son décès, on décide de porter en terre une autre personne à la même place. À cette fin, on creuse à l’endroit où notre sainte repose. Et que découvre le fossoyeur ? Le corps intact d’une personne ! Mais de qui ?
Les plus anciens habitants de Pibrac, susceptibles d’avoir connu cette inconnue, tentent de se souvenir. Mais oui, c’était la petite souffreteuse de la ferme située à l’orée de la forêt de Bouconne ! Germaine Cousin ! La souffre-douleur de sa marâtre ! Les langues se délient. Un corps intact ! Pourquoi un tel prodige ? Et si par hasard la petite bergère était une... sainte  ?
Je vous fais grâce des autres péripéties qui conduiront à la canonisation de notre sainte, plus de deux siècles après sa mort ! Ce qu’il faut surtout retenir de ce long intervalle de temps qui court entre la mort de Germaine et sa canonisation, c’est que Dieu a pris les choses en main (par la médiation des hommes) ! S’Il n’avait pas conservé son corps intact, pas de sainte Germaine de Pibrac !
Germaine ne doit d’avoir été portée sur les autels non à ses contemporains, mais à Dieu. Première singularité de la pastourelle de l’Ouest toulousain.

Une personne esseulée

La seconde raison de l’originalité de Germaine tient à son délaissement. Peu de saints ont été aussi esseulés qu’elle. Ce qui explique que sitôt enterrée, personne ne se soit soucié d’elle, et qu’il ait fallu un effort de remémoration de la part des anciens du village pour identifier la personne à qui appartenait le corps découvert dans l’église paroissiale.
Persécutée par sa marâtre, Germaine était délaissée dans sa propre famille ! Elle qui couchait sous l’escalier de la ferme, dans une soupente superficielle ! Elle que sa marâtre ne souhaitait pas que ses fils fréquentent ! Elle les éloignait d’elle comme d’une bête contagieuse ! 
Germaine esseulée, qui portait secours à plus esseulés qu’elle : les vagabonds qui sillonnaient les environs de l’ouest toulousain, souvent des soldats démobilisés que la fin des guerres de religion en France avait laissés sans emploi. Une sainte inconnue, méconnue ! Prodige voulu par Dieu pour notre édification, et pour qu’elle devienne une des patronnes de cette pauvreté terrible entre toutes : la pauvreté appelée solitude.

Une des saintes les plus universelles du monde

La troisième originalité de notre sainte tient à son universalité. Peu de saints peuvent prétendre coller autant qu’elle à la condition humaine. Pourquoi cela ? Parce que la majorité des êtres humains sur cette terre vivent dans des conditions obscures. La notoriété n’est l’affaire que d’une infime minorité. La plupart des personnes sont des inconnues pour leurs semblables. Telle a été la condition de vie de notre sainte.
Universelle à cause de son incognito. Mais pas seulement. À cause de sa pauvreté. De sa solitude. De son infirmité (elle était manchote). De sa sollicitude pour l’évangélisation des jeunes (elle parlait de Dieu aux enfants qui l’approchaient). De son statut de persécutée.
C’est ainsi que la bergère de Pibrac peut, à juste titre, être proclamée patronne des personnes souffrant de solitude, des malades, des sans-voix, de la foule des anonymes qui peinent sous le poids des fardeaux, privés des soutiens qui pourraient relayer leurs malheurs auprès des puissants, des mal-aimés, de l’enfance maltraitée, des catéchistes, des persécutés par leurs proches, de ceux qui rendent le bien pour le mal. Oui, Germaine est bien l’une des saintes les plus universelles de tous les temps ! Patronne de tous les anonymes, dont seul Dieu connaît l’amour et l’attachement à servir les autres.

La terre promise

Signalons un point important pour pénétrer le secret de notre sainte. Notre bergère était une fervente de l’Eucharistie quotidienne. Elle n’hésitait pas à laisser le troupeau de moutons qu’elle avait charge de garder, pour traverser le Courbet, le ruisseau qui séparait le pacage des bêtes de l’église paroissiale. Quant au troupeau de moutons, dans sa foi, elle le confiait à son Seigneur.
Tel Josué traversant le Jourdain pour mener le peuple à la terre promise, Germaine franchissait le cours d’eau et allait retrouver Celui sans lequel elle n’aurait jamais pu mener aussi saintement cette existence marquée au fer rouge du malheur. Grâce à son union au Bien-Aimé, elle transfigurait au quotidien cette vie lestée de persécution et de délaissement, pour en faire une illustration des Béatitudes. 

Heureux les doux, ils recevront la terre en héritage
Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu.(...)
Heureux les persécutés pour la justice, le Royaume des Cieux est à eux.

Jésus a initié Germaine au bonheur de l’Amour. Il l’ a fait en la maintenant à l’écart. De la même façon, chez le prophète Osée, Dieu décide de parler au cœur de sa fiancée en l’amenant au désert (Osée, 2,14).

Une existence ordinaire vécue extraordinairement

Cette vie cachée est riche d’enseignements pour nous. Aussi devait-elle finir par paraître au grand jour. Le Seigneur n’avait pas en effet comme dessein de maintenir jusqu’à la fin des temps sa fiancée dans l’anonymat. La lumière de la sainte devait briller pour nous – nous qui venons la prier. C’est pour cette raison qu’Il a pris Lui-même la peine de suppléer l’aveuglement des hommes au sujet de celle qu’ils avaient ignorée durant sa vie mortelle. Un vrai conte de fée ! 
À cette différence qu’ici le mal ne disparaît pas comme par enchantement. Si tant de pèlerins viennent prier Germaine, ce n’est pas parce qu’elle représente une Cendrillon qui retrouve miraculeusement sa pantoufle de verre à minuit, mais parce qu’elle a vécu une existence comme la leur. Une existence ordinaire, mais vécue avec l’extraordinaire de l’Amour des Béatitudes. Une vie à la portée de tous !

 


Actualité publiée le 19 janvier 2017

 

 

Pèlerinage à pied, entre Notre-Dame de Saint-Bernard et Pibrac, du 3 au 7 avril 2017.

Renseignements et inscriptions (jusqu’au 1er mars 2017) :
06 52 15 10 47