Homélie de la messe chrismale 2017

Lundi 10 avril 2017

Homélie de la messe chrismale 2017

MESSE CHRISMALE
EN LA CATHÉDRALE
SAINT-ÉTIENNE DE TOULOUSE

 

Lundi dernier, au début de la quinzaine de la Passion, nous entendions la longue lecture du livre de Daniel sur le drame de la chaste Suzanne, accusée faussement d’adultère par deux anciens (presbuteroï) dépravés, abusant de leur autorité. Suzanne crie vers le Seigneur, « qui pénètre les secrets », face à ce faux témoignage. « Le Seigneur entendit sa voix. Comme on la conduisait à la mort, Dieu éveilla l’esprit de sainteté chez un tout jeune homme nommé Daniel qui se mit à crier d’une voix forte : Je suis innocent de la mort de cette femme  » (Dn 13, 45-46).

Quand on crie vers Dieu de tout son cœur, de toute sa vie menacée, dans un péril grave, il entend toujours, comme en témoignent les Psaumes. La formule du livre de Daniel est pleine de sens : « Dieu éveilla l’esprit de sainteté chez un tout jeune homme ». En cette messe chrismale, qui met en lumière la puissance délicate de l’Esprit, ces paroles nous touchent. L’esprit de sainteté, nous l’avons tous reçu au baptême et sa grâce s’est développée à la confirmation ; elle se nourrit de l’Eucharistie et se restaure dans la Pénitence. Le ministère ordonné, au service du peuple de Dieu, trouve sa source dans cette force de l’Esprit, dans son onction qui pénètre à l’intime. C’est lui, « l’Esprit souverain » appelé sur le nouvel évêque, « l’Esprit de sainteté », invoqué à l’ordination des prêtres, « l’Esprit d’unité et de docilité » que je mentionnerai plusieurs fois cette année en ordonnant des diacres.

« L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction », chante le prophète Isaïe dans la première lecture de cette messe chrismale, formule reprise telle quelle par Jésus à la synagogue de Nazareth, comme nous venons de l’entendre. Nous l’avons reçu, mais nous devons l’honorer dans une humble ferveur que nous devons vivifier chaque jour dans une fidélité alimentée dans la prière, l’écoute du disciple et l’attention aux pauvres.

(…) Que le Seigneur éveille en chacun de nous « l’esprit de sainteté » ! Qu’il réveille en tout notre être la grâce de notre ordination, pour que se développe toute son énergie en nous, par nous et pour ceux dont nous avons la charge, comme évêques, prêtres et diacres ! L’Esprit est celui qui s’exprime dans les Psaumes, comme le dit clairement la lettre aux Hébreux, cette longue homélie sacerdotale, quand elle cite le Psaume invitatoire : « Aujourd’hui si vous entendez sa voix » (3, 7 et Ps 94, 7). La Lettre dit plus loin : « Une fois que l’on a reçu la lumière, goûté au don du ciel, que l’on a eu part à l’Esprit Saint, que l’on a goûté la parole excellente de Dieu, ainsi que les puissances du monde à venir » (6, 4), il est urgent, quand on a connu la faiblesse, de laisser l’Esprit nous faire la grâce d’une nouvelle conversion, « pour que notre espérance se réalise pleinement » (6, 11).

Nous arrivons aux jours où le Christ, grand prêtre de notre foi, est parvenu à la perfection, à travers ses souffrances, par l’expérience de la souffrance accueillie dans l’obéissance à son Père. « Poussé par l’Esprit éternel, il s’est offert lui-même à Dieu comme une victime sans défaut » (9, 14).

Poussés par « l’Esprit éternel », chers frères, ministres ordonnés, laissons cet « Esprit de sainteté » nous imprégner de son huile de joie : nous sommes envoyés annoncer la Bonne Nouvelle aux humbles, comme dit Isaïe, « aux pauvres » comme le cite Jésus (Lc 4, 18). Ma joie est grande de voir se développer la diaconie dans notre diocèse : nous en parlions samedi dernier – au Saint-Esprit précisément – avec les associations et les personnes qui s’occupent des réfugiés et des migrants.

À cet amour que nous avons et que nous aurons les uns pour les autres, les uns et les autres pour les petits et les pauvres dont nous sommes aussi, on nous reconnaîtra comme « Prêtres du Seigneur » et « Servants de notre Dieu » (Is 61, 6) au milieu des communautés dont nous avons la charge et qui, avec nous – nous le voyons ce soir –, annoncent à tous que Dieu nous aime, que nous les aimons, et que nous nous aimons les uns les autres.

Amen.

+ fr. Robert Le Gall Archevêque de Toulouse,
Lundi saint, 10 avril 2017