Jeanne d’Arc du bûcher aux autels : un long périple

par Philippe Foro, diacre

Jeanne d’Arc du bûcher aux autels : un long périple

30 mai 1431 : condamnée par un tribunal ecclésiastique comme hérétique et relaps, Jeanne d’Arc meurt sur le bûcher sur la place du marché à Rouen. 16 mai 1920 : Benoît XVI canonise Jeanne d’Arc qui est portée sur les autels. Près de cinq siècles entre les deux évènements. On a connu des canonisations plus rapides ! Que s’est-il donc passé entre les deux événements ?

Un fois victorieux dans le long conflit qui opposait les monarchies française et anglaise, Charles VII souhaite une réhabilitation de Jeanne qui l’avait servi, conduit à Reims pour le sacre. Il n’était pas question de maintenir la décision qui en faisait une ennemie de Dieu en tant qu’hérétique, voire qui diminuerait le prestige de la Couronne de France. Ce qu’un tribunal d’Église, présidé par Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, avait fait, un autre tribunal d’Église devait le défaire, surtout dans le contexte d’une Église gallicane, au service du roi. Ceci est fait le 7 juillet 1456 par un tribunal ecclésiastique réuni à Rouen. Puis, un grand silence ou presque. La monarchie, comme l’Église, tendent à oublier celle qui est un personnage gênant. Voltaire, en 1762, lui consacre une œuvre sarcastique, intitulée La Pucelle d’Orléans. Mais il faut véritablement attendre le XIXème siècle pour assister à une remise à l’honneur de Jeanne.

En 1841, Jules Michelet, historien libéral et de tradition républicaine, publie son volume V de son Histoire de France où il valorise cette jeune femme, abandonnée par son roi et condamnée par une Église qu’il juge obscurantiste. Parallèlement, l’érudit Jules Quicherat édite, entre 1841 et 1849, la documentation consacrée aux procès de Jeanne d’Arc dont l’intégralité avait été conservée. Dès lors, la jeune femme sort de l’oubli et devient un personnage populaire auprès de l’opinion libérale et anticléricale. L’Église ne pouvait rester inactive. Le 8 mai 1869, Mgr Dupanloup, lors de l’anniversaire de la libération d’Orléans dont il est évêque, prononce un panégyrique de Jeanne d’Arc, annonçant sa sainteté. Cinq ans plus tard, s’ouvre un procès diocésain en vu d’une canonisation. Le dossier ayant été envoyé à Rome, le pape Léon XIII reconnait Jeanne comme vénérable en 1894, et signe un bref d’introduction pour un procès en canonisation. La procédure suit son cours. Elle est béatifiée en 1909 par Pie X. Puis, la Première Guerre mondiale terminée, sa sainteté est officiellement reconnue, le 16 mai 1920, alors que la Chambre des députés vote une loi faisant du 8 mai une journée nationale en mémoire de Jeanne. Ces événements sont bienvenus alors que la France et le Saint-Siège renouent des relations diplomatiques rompues en 1904.

Ainsi, depuis la seconde du XIXème siècle, Jeanne d’Arc devient une des figures les plus populaires de l’histoire de France, à un moment où s’affirme l’idée de nation (Thérèse de Lisieux elle-même joue le rôle de Jeanne d’Arc dans son carmel). Cette popularité est entretenue par les manuels scolaires de la IIIe République et jusqu’aux années 1960, et est difficilement réductible à un seul camp politique. Pour le monde catholique, elle est cette fille pieuse et fidèle à sa foi et à Dieu. Pour les anticléricaux, elle est une héroïne qui a été victime d’une Église qui ne la récupère que tardivement. Pour les monarchistes, elle est celle qui a servi son roi avec abnégation et courage. Pour les républicains, elle est une fille du peuple abandonnée par le souverain qu’elle a servi. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a pu être une égérie à la Résistance qui en fit un modèle de « patriote » luttant contre l’occupant. Mais elle fut également utilisée par la propagande collaborationniste pour dénoncer le bombardement de Rouen par la Royal Air Force, le 30 avril 1944. De nombreuses villes ont inauguré des places, avenues, rues en l’honneur de la Pucelle. Ainsi, à Toulouse, une statue équestre de la sainte est inaugurée le 28 mai 1922 sur la place qui prend le nom de Jeanne d’Arc vingt ans plus tard. Littérature et cinéma se sont emparés du personnage, participant à sa popularité. Pour en rester au 7ème art, citons sans être exhaustif « La Passion de Jeanne d’Arc » de Dreyer (1928), « Jeanne d’Arc » de Victor Fleming avec Ingrid Bergman (1948), « Jeanne au bûcher  » de Roberto Rossellini, « Sainte Jeanne d’Arc » d’Otto Preminger (1957), « Le procès de Jeanne d’Arc » de Robert Bresson (1962), « Jeanne la Pucelle  » de Jacques Rivette avec Sandrine Bonnaire (1994), « Jeanne d’Arc ou la Messagère  » de Luc Besson (1999), « Jeanne captive » de Philippe Ramos (2011)… Désormais, Jeanne d’Arc appartient à tous et à personne en particulier.

Philippe Foro

 

 

 


Actualité publiée le 15 mai 2020

 

 

Dans le diocèse d’Orléans, les Fêtes de Jeanne d’Arc qui devaient se dérouler du 26 avril au 17 mai 2020 ont été reportées à après l’été.

Le 17 mai à 11h, la messe télévisée du centenaire de la canonisation présidée par Mgr Blaquart et animée par les Petits Chanteurs à la Croix de Bois et la chorale johannique (et précédée à 10h30 d’une émission en direct de la cathédrale d’Orléans) sera retransmise sur France 2, dans Le jour du Seigneur.

 

 

 

 

 

 

 

 

Prière de la jeunesse de France à Jeanne d’Arc

Toi, Jeanne, écoute favorablement nos prières.
Depuis six siècles, tu n’as cessé d’obtenir de Dieu des bienfaits pour la France et ses enfants.
Aujourd’hui, dans la situation douloureuse que traverse le monde et notre pays,
Nous nous tournons vers toi pour en appeler à ta puissante intercession.

Toi, Jeanne, avec Celui que tu appelais Messire Dieu,
Regarde ceux qui désespèrent, les malades et les mourants pour qu’ils trouvent secours et réconfort.
Donne grande force à tous les soignants qui s’affrontent à l’adversité.
Pose ton regard généreux sur les pauvres et les plus vulnérables pour les protéger.
Soutiens les femmes et les hommes qui ont la lourde tâche de gérer les affaires de la France.

Toi, Jeanne, la jeune fille énergique à l’écoute de la Volonté du Seigneur,
Aide-nous à grandir en sainteté et à construire notre avenir durablement,
À devenir de vrais disciples-missionnaires, enracinés dans la prière, fraternels avec tous,
Serviteurs audacieux de la Bonne Nouvelle de Jésus.

Toi, Jeanne, tu voulais toujours que Dieu soit : « premier servi »
Aide-nous à répondre à Son appel, pour suivre notre vocation.
Accompagne chez nous les jeunes le désir de l’engagement pour consacrer notre vie au Roi du Ciel.

Très Sainte Vierge Marie, prie pour nous !
Sainte Jeanne d’Arc, patronne secondaire de la France, prie pour nous !

Amen.