Loi asile et immigration

Des garanties procédurales en baisse, un durcissement des conditions de rétention.

Loi asile et immigration

Le gouvernement a présenté en Conseil des ministres du mercredi 21 février 2018 un projet de loi « pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif ».

Malgré quelques voies d’amélioration, notamment l’accès à la carte de résident des parents d’enfants bénéficiaires d’une protection internationale, ou encore l’extension à quatre ans de la carte de séjour pluriannuelle pour les bénéficiaires d’une protection subsidiaire, de nombreuses associations dont la Cimade, Forum réfugiés, le Réseau éducation sans frontières, le Secours populaire ou encore le Secours catholique, regrettent une baisse de plusieurs garanties procédurales pour les demandeurs d’asile et le durcissement des conditions de rétention. 

L’objectif de réduction des délais de procédure ne doit en aucun cas se faire au détriment de la qualité du processus d’examen et de prise de décision.

En ce qui concerne l’allongement de la durée de la rétention, qui passerait de 45 à 90 jours (pouvant s’étendre jusqu’à 135 jours exceptionnellement), une mesure inefficace et totalement disproportionnée qui ne fait qu’augmenter les souffrances et les traumatismes liés à l’enfermement dans un CRA (centre de rétention administrative).

Pour ceux qui n’ont jamais entendu parler d’un CRA, voici quelques extraits d’un article de la Dépêche sur son site internet datant du 19 /02/2018 : « Samedi d’hiver, Mathilde Panot sonne à l’entrée. « Députée de la République », elle se présente, souhaite visiter le CRA. Portes et portiques, accès sécurisés… Dans le poste central, les policiers de garde veillent trois grands écrans. Neuf cases sur chaque, présumant 27 caméras dans les blocs : d’emblée le décor carcéral est posé… Le plan sur le mur présente les blocs. Trois zones « hommes » de 30 personnes, une zone « femmes », une zone « famille » pour un total de 120 places théoriques… Les zones de déambulation ouvrent sur un dédale impersonnel et aseptisé d’angles droits à parois lisses et verdure réglementaire sous la coursive. Propreté sans aspérité des couloirs et des portes mécanisant le parcours judiciaire des interpellés… Les plus chanceux ont un portable et tentent de débrouiller leur avenir. Les autres ruminent la menace en marchant. Devant la télé enfermée dans une armoire métallique vitrée se mure un Tunisien. Cours et salles « détente » sont vides, personne non plus autour du baby-foot blindé… Le stress permanent fait des ravages, souligne Pablo Martin, intervenant pour la Cimade qui assiste les personnes en rétention. 45 jours, c’est très dur alors quatre mois… Même des policiers secouent la tête… »

Respecter les droits serait beaucoup plus efficace et moins coûteux. La loi Cazeneuve de 2016 avait rétabli une intervention d’un juge des libertés et de la détention pour le contrôle la procédure de rétention dans les 48 premières heures de la rétention et ainsi en cas de non-respect de la loi par la police ou le préfet, la personne était remise en liberté (23% des procédures annulées et 8% de procédures d’expulsion sans voir le juge des libertés).
Désormais, il est question de revenir aux effets de la loi Besson de 2011 qui avait repoussée une intervention d’un juge des libertés et de la détention à cinq jours. Cette intervention tardive d’un juge des libertés et de la détention avait conduit à une explosion du nombre d’expulsions sans audience (60% des procédures) sans voir le juge en 2011 selon la Cimade.

Après une analyse approfondie des dispositions du projet de loi, les associations feront part de propositions aux parlementaires en vue de l’amender, pour que soit mise en œuvre une politique d’asile, d’intégration à la fois juste, efficace, et respectueuse des droits des personnes.

 

La France a déjà été condamnée à six reprises par la Cour européenne des droits de l’homme pour ces « traitements inhumains et dégradants ». Les Nations Unies recommandent vivement de les faire cesser, tout comme le Défenseur des droits. 

Christophe Emo