Solennité de saint Saturnin

texte de Mgr Robert Le Gall

Solennité de saint Saturnin


vendredi 29 novembre 2019

 

• À la veille de l’Avent, nous venons déjà d’entendre le prophète Isaïe, cet immense poète, annonciateur de l’Incarnation et de la Rédemption. Il chante « le messager qui annonce la paix, le messager de la bonne nouvelle, qui annonce le salut ». Nous célébrons l’« annonciation » faite à Toulouse par notre premier évêque, saint Saturnin. Il nous a transmis la paix, la bonne nouvelle, le salut en Jésus Christ, témoin jusqu’au martyre de la joie de l’Évangile. « Il est beau de voir courir sur les montagnes celui qui vient dire à la cité sainte : il est roi, ton Dieu !  » (52, 7). Les montagnes ne sont pas loin de Tolosa, mais à l’époque de Saturnin, la ville n’est guère sainte. L’est-elle aujourd’hui ? Depuis le IIIe siècle, grâce à notre saint Patron de la ville et à toute l’histoire de sainteté à Toulouse, une œuvre de grâce se poursuit avec les hauts et les bas de notre condition humaine.

• En tout cas, dans cette basilique insigne, nous sommes dans une maison sainte, dans la maison de Dieu, une maison sûre où ont défilé depuis des siècles des foules de pèlerins, comme nous le sommes ce soir. Nous venons demander à saint Saturnin de poursuivre aujourd’hui l’œuvre qu’il a su initier voici plus de 17 siècles. À l’appel réitéré du pape François, nous voulons être des disciples-missionnaires, fidèles du Christ, fidèles au Christ, dans une cohérence de vie qui rende crédible notre témoignage à l’Évangile. Nous voulons être des témoins fiables de la Bonne Nouvelle que le cycle de Noël va nous apporter à nouveau, à frais nouveaux : Dieu nous aime ; il nous veut pleinement vivants, capables de l’aimer par sa grâce, capables de nous aimer les uns les autres, dans une attention délicate à l’unité, condition de la mission.

• À Lourdes, voici trois semaines, lors de l’Assemblée plénière des évêques, nous avons pris du temps pour vérifier, pour favoriser la cohérence de notre témoignage de foi et de vie, notamment dans la prise en compte d’un respect concret de notre « Maison commune », qui est notre planète. Nous sommes ici dans une maison de Dieu, mais la Terre est aussi une maison de Dieu, créée par lui, pour nous, pour nous tous, pour chacun de nous. En grec, maison se dit oikos, d’où le mot « écologie », qui dit une parole sur la maison, tandis que l’« économie » donne des normes pour son bon et juste fonctionnement.

• Nous avons pris entendu, dès le premier jour de notre Assemblée plénière et dans la matinée du deuxième, six témoins engagés pour l’écologie : chaque évêque avait invité deux personnes à venir participer à ces deux jours ; au lieu d’être 110 comme à l’accoutumée, nous étions plus de 300 dans l’hémicycle. De Toulouse, nous étions 4, puisque l’une de mes deux invités, de jeunes adultes, avait son bébé ; il y en avait deux dans l’assemblée dont le « nôtre » ! J’en étais fier !

• De graves précisions nous ont été données sur les grands risques courus pour la planète si nous ne remettons pas en cause nos habitudes de gaspillage des ressources naturelles. Nous sommes invités à une « conversion écologique », qui ne soit pas une « contrainte écologique ». Une conscience doit grandir des dangers qui attendent notre génération, mais surtout les générations à venir, si nous ne changeons pas. Nous entendions, lors de la semaine de notre Assemblée, les avertissements du prophète Jonas appelant Ninive à la conversion. Et les Ninivites se sont convertis « du plus petit au plus grand ».

• Certes, nous avons entendu des propos parfois catastrophistes. Un mot est revenu : celui de « collapsologie », la science qui étudie et mesure l’effondrement général qui nous menace : lapsus, c’est tomber, le collapsus, c’est une chute complète nous atteignant tous. On nous a parlé de « péchés écologiques » dont nous devons prendre conscience, pour précisément vivre une conversion et trouver de nouveaux modes de vie et de relations. Pourtant, nous n’avons pas eu le sentiment de nous trouver face à des Cassandre ou à des prophètes de malheur agitant des spectres terrifiants. Une certaine fraîcheur, une jeunesse d’âme ressortaient des témoignages comme de nos échanges, avec des formules qui m’ont marqué. Il nous faut impérativement aller vers une vie plus simple : sobre et noble. « Comment une menace peut-elle devenir une promesse ? » « Des renoncements ne produisent pas tant du moins que du mieux. » « Moins de biens, plus de liens. »

• Vis-à-vis de la création, il nous faut développer une attitude de charité et même de chasteté, qui est la forme élevée du respect. Ainsi retrouvons-nous l’invitation à un développement humain intégral que promeut la pensée sociale de l’Église. L’écologie intégrale comporte l’humain et le social autant que les équilibres à respecter de notre environnement. L’attention à la bioéthique doit aller de pair avec le souci de la biosphère.

• En cette solennité de saint Saturnin, dans la merveilleuse harmonie de cette basilique insigne qui nous fait pointer ensemble vers le ciel, demandons la grâce de la fidélité à la simplicité évangélique et franciscaine, pour réfléchir à de nouveaux modes de vie dans la fraîcheur et la liberté des enfants de Dieu. Ainsi pouvons-nous entendre la promesse du prophète Isaïe : « D’un bout à l’autre de la terre, toutes les nations verront le salut de notre Dieu  » (52, 10).

 


Actualité publiée le 3 décembre 2019