Vincent Lambert : un légume ?

par le frère Thomas de Gabory, op

Vincent Lambert : un légume ?

L’affaire du pauvre Vincent Lambert n’en finit pas. Sa vie est un drame, pour lui-même et pour les siens qui se déchirent autour de lui. Même après sa mort, « l’affaire Vincent Lambert » continuera. Car sa vie est devenue un problème juridique et politique avant d’être une réelle question d’éthique.

Dans les services de soins palliatifs et d’accompagnement, il est courant d’arrêter l’alimentation et de diminuer l’hydratation des personnes en phase terminale d’une maladie incurable. En effet, l’alimentation et la surcharge en eau sont souvent sources d’inconfort. Lorsque la décision est prise, après avoir dialogué avec le patient (et obtenu son consentement lorsque c’est possible), avec sa famille et l’équipe soignante, cela ne fait habituellement pas difficulté.

Mais Vincent Lambert n’est pas en fin de vie ! Il est nourri et hydraté par un tuyau qui arrive jusque dans son estomac. Il respire seul, sans assistance. Il est en vie sans l’aide d’aucune machine. Il n’est pas en phase terminale, il n’est pas à l’agonie, mais certaines personnes (des proches, des soignants, des politiciens…) veulent provoquer sa fin de vie par l’interruption de son alimentation et de son hydratation. Elles considèrent que sa vie ne vaut plus la peine d’être vécue, qu’elle ne sert à rien.

L’Église a toujours considéré que la vie d’une personne humaine doit être respectée. Vincent Lambert est toujours une personne, même si ses capacités cognitives sont très altérées. Il n’est pas un « légume ». Ce terme est régressif et signifie que ceux qui l’emploient ont renoncé à reconnaître sa dignité. Même s’il n’est pas certain qu’il reconnaisse les siens, il est sûr que les siens le reconnaissent : ils savent encore qu’il est un fils, un mari, un frère, un ami. Leur amour devrait être plus fort que la souffrance et que la mort.

Et nous, nous reconnaissons Vincent Lambert comme un membre de notre grande famille humaine. Il est l’un des nôtres. À ce titre, il mérite des soins. L’alimentation et l’hydratation, même si la loi française les présente comme des traitements, ne sont que des soins. Ils sont un acte d’humanité qui est dû à celui qui est faible et vulnérable. On ne prend pas soin de quelqu’un en arrêtant les soins !

Arrêter l’alimentation et l’hydratation de Vincent Lambert pose une grave question éthique. Elle aurait pu se régler en famille avec l’équipe des soignants. Mais elle est devenue une question médiatique et politique. L’enjeu est grand. Condamner Vincent Lambert, c’est franchir une étape importante et symbolique dans la lutte de nombreux lobbies pour la légalisation de l’euthanasie en France.

Même si la vie est parfois difficile, malgré les souffrances, nous savons qu’elle peut encore avoir un sens. Sainte Mère Teresa le disait : « La vie est tristesse, dépasse-la. La vie est un combat, accepte-le. La vie est une tragédie, lutte avec elle. La vie est la vie, défends-la ».

Toulouse, le 13 mai 2019

Frère Thomas de Gabory, op
Prêtre dominicain, médecin, docteur en théologie, docteur en philosophie