Deux lectures du mystère de l'Épiphanie

La Parole de Dieu est rarement univoque. Elle possède souvent plusieurs sens, ce qui n’enlève rien toutefois à son unité profonde. Une illustration exemplaire de cette caractéristique est l’épisode de la visite des mages à l’enfant Jésus.

 

Révélation du Messie aux nations

Une première lecture du récit de Matthieu y discerne la révélation du Messie à toutes les nations représentées par les mages. L’Épiphanie représente dans ce cas le triomphe de la vraie religion sur les erreurs du paganisme, du polythéisme et de l’astrologie. Plus positivement, la visite des mages consacre la recherche aboutie de la vérité par des croyants venus d’un autre horizon que le monothéisme d’Israël. Toutefois, il s’agit toujours de souligner, dans ce type de lecture, la place centrale de la révélation christique. En Jésus, Dieu se révèle de façon définitive aux nations, ce que montre le prosternement des mages devant l’Enfant. L’Épiphanie consacre l’universalisme du christianisme.

 

Dieu agit aussi en dehors du christianisme 

Cependant, une autre lecture du récit, non contradictoire avec la première, est possible. D’après elle, la visite des mages à Bethléem est l’illustration de la valeur positive des autres cultures religieuses qui peuvent entendre elles aussi l’appel divin. Les semences du Verbe de Dieu sont présentes dans toute existence humaine et toute tradition culturelle. La solennité de l’Épiphanie nous invite de la sorte à dépasser la frontière du christianisme pour découvrir le don de Dieu à tous les peuples. S’il n’est pas question de contester l’aspect indépassable de la révélation en Jésus-Christ, en revanche nous sommes conviés, en méditant le récit évangélique de Matthieu, à reconnaître que Dieu agit également en dehors du christianisme. Le décret Nostra Aetate du Concile Vatican II déclarait à cet égard : « L’Église catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans les autres religions ». Cette seconde lecture est un formidable appel au dialogue inter-religieux.
Ainsi, le mystère de l’Épiphanie, selon le point de vue d’après lequel on l’appréhende, nous livre de multiples leçons qui, loin de s’annuler les unes les autres, se complètent au contraire de façon heureuse. Telle est la marque distinctive de la Parole divine que de posséder plusieurs dimensions dans un même récit – cette polysémie étant toujours source d’émerveillement pour les fervents de la Bible.

 

Jean-Michel Castaing

 


Actualité publiée le 4 janvier 2024