Donner de soi et rencontrer l'autre

Témoignage des guides aînées, engagées dans la cité

Donner de soi et rencontrer l’autre

Marie a 26 ans, Fanny 21 et Bénédicte 18. Elles sont guides aînées dans le groupe SUF (Scouts unitaires de France) Saint-Marc à Toulouse. C’est-à-dire que, regroupées au sein du Feu, généralement une équipe de 4 à 10 filles, elles ont choisi de poursuivre l’aventure scoute débutée à la Ronde (8-12 ans) ou à la Compagnie (12-17 ans) et ont décidé de donner de leur temps pour se mettre au service et faire grandir leur foi. Pas toujours facile à cet âge où l’on passe son bac et débute des études supérieures…
Cet été, pour leur camp de deux semaines, elles sont parties en mission de service à la Fraternité Bernadette, dans les quartiers nord de Marseille.

- Foi & Vie : Quelle était votre mission ? Pourquoi l’avoir choisie ?
- Marie : Notre mission consistait, dans l’esprit de la Maison Bernadette, à vivre au cœur de la cité des Lauriers à Marseille. Nous avions différentes activités prévues auprès des enfants et des familles, des chantiers aussi, mais je crois que notre mission première était d’aller à la rencontre de chaque personne dont on croisait le chemin.

- Bénédicte : Nous avons choisi cette mission d’un commun accord. On avait toutes envie de nous ouvrir aux autres, de sortir de ce qu’on connaît. Finalement, nous n’avons pas besoin d’aller au bout du monde pour rencontrer des cultures différentes.

- F&V  : Comment avez-vous été accueillies à votre arrivée ? Et au fil de votre séjour ?
- Bénédicte : Le premier jour, quand nous sommes arrivées dans la cité, on a reçu un pot de yaourt sur le pare-brise de la voiture… Ça nous a mis dans le bain ! Mais de ce que l’on a vu, la plupart des gens accepte la présence de la Maison Bernadette et nous accueille chaleureusement.
- Marie : C’est vrai que j’ai été touchée par la simplicité de l’accueil qui nous a été fait. Les habitants de la cité étaient vraiment bienveillants, ouverts. Nous n’avons eu aucun problème. C’est le fruit d’un long travail que les responsables de la maison mènent depuis plusieurs années. Le climat a été très tendu à leur arrivée, mais avec le temps, les relations se sont apaisées.

- F&V : Concrètement, quelles étaient vos tâches ? Vos difficultés et vos joies ?
- Fanny : Le matin était un temps réservé à la prière et à l’enseignement : avec tous les bénévoles, une trentaine environ, nous commencions chaque journée par les laudes, la messe, l’adoration et un enseignement. C’est ce qui nous nourrit et nous permet de vivre les moments forts dans la cité. L’après-midi était partagé en trois temps. Nous avions d’abord deux heures de chantier : cela consistait soit à repeindre les soubassements d’un bâtiment HLM, soit à des petits travaux dans la maison ou dans une école dont la fraternité s’occupe. S’ensuivaient deux heures d’activité de rue : l’été les enfants n’ont pas d’activité, donc nous leur proposions toutes sortes de jeux de société, de jeux collectifs, etc. Pour finir la journée, nous consacrions une heure aux amis de la maison. Certains habitants venaient jouer à la pétanque sur le boulodrome dans la cour de la maison et des enfants pouvaient venir jouer au foot dans le city-stade avec nous. Nous pouvions aussi aller visiter des habitants de la cité, juste pour partager un moment avec eux.
- Bénédicte : Il faut dire aussi que nous avons eu des moments durs. Ce n’est pas évident de constater le fossé qu’il y a entre ce que nous vivons et ce qu’ils vivent. Nous avons rencontré des enfants qui n’ont pas les mêmes chances que nous. Les familles sont souvent loin de leur pays natal, de leurs proches. Dans la cité, les liens entre les habitants ne sont pas faciles car on ne sait pas à qui faire confiance, il y a aussi le poids et la menace du trafic de drogue qui ne simplifie pas les choses…
Mais il y a quand même eu plus de joie que de difficulté ! C’était très fort d’aller à la rencontre de ces personnes. Nous sommes différents et pourtant nous trouvons rapidement de quoi partager. Les enfants étaient heureux de nous voir, de nous faire participer à leurs jeux. Les parents nous accueillaient sans se soucier de notre religion, de notre culture. Ce qui compte, c’est de passer un peu de temps ensemble.

- F&V : Qu’en avez-vous retiré comme expérience sur le plan personnel ?
- Marie : Ça donne envie de s’ouvrir plus aux autres…
- Fanny : … et de donner du temps !
- Bénédicte : Je crois qu’on ne portera plus le même regard sur le monde qui nous entoure, sur les gens que nous rencontrons. Cette expérience nous a permis d’accueillir l’autre plus simplement, sans juger.

- F&V : En tant que chrétien, pensez-vous qu’il est plus facile de s’engager ? Pourquoi ?
- Marie : Jésus a dit « vous êtes les sel de la terre et la lumière du monde ». Je crois qu’il y a une certaine exigence à aller à la rencontre des autres. Il n’est pas question de garder notre foi pour nous, nous devons nous conformer à l’Évangile et agir dans le monde. Pour autant je ne dirai pas que c’est facile... Se mettre au service des autres demande un peu de courage et une bonne dose d’humilité. Il ne faut pas avoir peur de se remettre en question. Mais c’est sûr qu’en tant que chrétien nous avons le moteur, celui de la Parole de Dieu et de l’Amour du Christ, qui nous pousse à nous engager et à garder le cap vers l’Espérance.

- F&V : Et cette année, vous vous réengagez au Feu ? Vous « reprenez le flambeau » ?
- Marie : Malheureusement nous avons toutes de nouvelles exigences professionnelles et étudiantes qui ne nous permettent pas de poursuivre l’aventure au sein du feu.

- Fanny : Mais la Maison Bernadette et la cité des Lauriers restent bien au chaud dans un coin de nos cœurs, et il y a de fortes chances pour que nous y retournions un jour ou l’autre.

 


Album photo