La Trinité, principe de l’unité de l’Église

Dimanche 7 juin 2020

La Trinité, principe de l’unité de l’Église

La méditation du mystère de la Trinité n’est pas une affaire de spécialistes ou de théologiens reclus dans leur cellule. Le mystère du Dieu Un en trois Personnes intéresse tous les chrétiens responsables de la vie et de l’avenir de l’Église.


Le lien entre Trinité et Église dans la Tradition

Le cardinal de Lubac affirmait que l’Église était comme une extension de la Trinité. Dès le troisième siècle, saint Cyprien de Carthage soutenait déjà que l’unité des baptisés découle de l’unité du Père, du Fils et de l’Esprit Saint. Dans l’Antiquité, il fut le grand théoricien qui formalisa la thèse selon laquelle l’unité trinitaire était le principe actif de l’unité ecclésiale. À sa suite, innombrables furent les théologiens qui contemplèrent le mystère de l’Église à travers le prisme de la Trinité. Au XVIIème siècle, Bossuet écrit par exemple : « En l’Église, le Père est comme le principe auquel on se réunit, le Fils comme le milieu dans lequel on se réunit, le Saint-Esprit comme le nœud par lequel tout se réunit, et tout cela est un. » (Quatrième lettre à une demoiselle de Metz).

La prière pour l’unité de Jésus

Ces dernières années, la réflexion au sujet du lien entre l’unité de l’Église et le mystère trinitaire s’est surtout appuyé sur l’Écriture, plus particulièrement sur la prière sacerdotale de Jésus dans l’évangile selon saint Jean :

« Que tous soient un.
Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi,
qu’eux aussi soient un en nous
afin que le monde croie que tu m’as envoyé.
 » (Jn 17,21)

Cette demande de Jésus relie l’unité des disciples à l’unité du Père et du Fils, unité trinitaire scellée dans l’Esprit. Comme le Père et le Fils sont un, de même l’Église doit-elle vivre dans l’unité. Ainsi, la Trinité est le modèle de la communion ecclésiale. Mais pas seulement le modèle. « Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi  : la juste compréhension du terme « comme » est décisive pour bien saisir la portée de la prière de Jésus. En effet, la conjonction « comme » (kathôs, en grec, non hôs) ne désigne pas ici une simple imitation, une ressemblance extérieure. « Comme » dans l’affirmation « Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi » indique plutôt l’origine, la cause et le fondement permanent de l’unité ecclésiale. De telle sorte qu’en adhérant à Jésus, les disciples participent à la communion d’amour de la Trinité.

Si l’unité de l’amour trinitaire était une image à reproduire, un modèle à imiter, nous serions laissés à nos propres forces pour réaliser l’unité dans l’Église. Échec assuré ! Nous devons au contraire, comme la prière de Jésus nous y invite implicitement, nous brancher sur la vie de la Trinité afin d’être en communion les uns avec les autres. De telle sorte que l’unité ecclésiale ne soit pas à la merci de l’arbitraire ou dépendante de la simple exhortation morale, puisqu’elle sera ancrée en Dieu – qui ne connaît pas, Lui, de limites ! Ce sera une unité dynamique qui se jouera des clôtures et des restrictions trop humaines !

Une communion par le haut

De cette prière de Jésus, nous devons faire notre miel. Car l’unité de l’Église n’est pas seulement un garde-fou contre les hérésies, ou un appel à marcher au pas. Envisager l’unité positivement, c’est la comprendre plutôt comme un aiguillon de la charité. « Rester un » pour rester simplement groupés ne peut pas devenir source de motivation ! La vocation des chrétiens ne consiste pas à rester parqués comme des moutons. Le bon Berger,

Jésus, fait sortir les brebis dont il a la garde, en les appelant chacune par son nom (Jn 10,3). Elles ne représentent pas des clones pour lui. De plus, il ne les fait pas macérer dans un enclos mais les amène à l’extérieur. Voilà pourquoi l’unité pour laquelle le Christ a priée n’est pas synonyme d’uniformité, un arasement ou un alignement au cordeau, mais constitue plutôt un appel à rassembler ceux qui ne se ressemblent pas, à inventer de nouvelles formes d’unification par le haut. Il s’agit d’œuvrer dans l’Église à une unité dans la différence, comme le monothéisme trinitaire est une communion de Personnes divines différentes.

Ainsi, le mystère de la Trinité possède des implications pratiques et pastorales dont tous les baptisés sont responsables.

Jean-Michel Castaing

 


Actualité publiée le 3 juin 2020