Retour du CCFD sur le rassemblement Alternatiba

Retour du CCFD sur le rassemblement Alternatiba

Ça a bougé fort à Toulouse pour le climat, la planète et ses habitants !

Alternatiba, vous connaissez ? C’est un rassemblement citoyen qui regroupe les alternatives pour sensibiliser aux questions du climat et à la COP 21. Née à Bayonne en 2013, cette dynamique essaime depuis en France. À Toulouse, c’était les 12 et 13 septembre 2015, un moment très fort ! La météo avait annoncé orages et pluie, mais en fait quasi rien pour perturber la curiosité ou l’enthousiasme des bénévoles des 13 villages ni celui des quelques 35.000 visiteurs…Des propositions à foison : découvertes et discussions sur les stands, conférences, animations, concerts, spectacles…

Le CCFD-Terre solidaire était présent sur 2 villages (« Agriculture et alimentation » sur les Allées J. Guesde et « Solidarité et partage » au Grand Rond), ainsi que le dimanche au marché paysan des Allées François Verdier. Beaucoup de visites et de discussions, notamment autour de Hold-up international, de la pétition de l’Éthique sur l’étiquette, de la justice climatique…
Une proposition ludique également : celle du spectacle de théâtre-forum « Touche pas à ma terre » au Temple du Salin : des sketches qui illustrent la question de l’accaparement des terres, ici et ailleurs, et aussi des intermèdes acrobatiques et symboliques réalisés par deux jeunes du Lido…
Sur le même sujet, l’exposition de photos « Terres en jeu » de Philippe Revelli et Claude Huré, bien repérable sur les grilles, arrêtait beaucoup de passants, interpellés par les situations de terres confisquées en Colombie, Indonésie, au Pérou… comme en France.

Une grande chance aussi pour le CCFD : la présence et le témoignage de deux partenaires de l’association MAPTO du Togo et celui de Maureen Jorand, chargée de mission sur la souveraineté alimentaire. Tous trois ont participé à plusieurs conférences dans les 2 villages et aussi en plénière. Cette dernière a réuni beaucoup de monde et le débat a été très animé !

Et maintenant, à nous de continuer à agir, à nous de suivre les mobilisations pour la COP 21, dés le 26 Septembre à Toulouse, puis des marches dans toutes les grandes villes du monde, le 29 novembre prochain, la mobilisation à Paris à partir des 5 et 6 décembre et pour le CCFD, surtout le 12 décembre, à la fin du sommet…

Françoise Laborde, Délégation CCFD-Terre solidaire-31

 



Focus sur la conférence sur le changement climatique et l’alimentation,
avec Maureen Jorand et Geneviève Azam et le syndicat MAPTO

Geneviève Azam, enseignante à l’Université Toulouse II qui suit les étapes des négociations internationales sur le climat, a expliqué que celles-ci sont en assez mauvaise passe quant à l’objectif des 2° à ne pas dépasser. Dans les propositions des gouvernants, on est plutôt sur des courbes globales de + 3 à 4 ° et on va vers des risques climatiques graves, voire non contrôlables. Les actions de la prochaine décennie seront capitales. L’agriculture a une part de responsabilité (11 à 15% des émissions de gaz à effet de serre) : en cause, entre autres, les pratiques polluantes de l’agriculture agro- industrielle (un petit exemple : le voyage des pots de yaourts sur des milliers de km), la déforestation pour planter des cultures intensives comme le soja, les palmiers à huile…Il faut au contraire développer l’agriculture paysanne capable de nourrir la planète, comme le répète le rapporteur de l’ONU, Olivier de Schutter. G. Azam dénonce les fausses solutions comme la Nouvelle Alliance Mondiale pour une Agriculture Intelligente face au climat et les mécanismes RED et RED plus qui accordent aux entreprises polluantes des crédits d’émission de gaz si elles sanctuarisent des forêts accaparées dans les pays du sud. Monsanto compte valoriser le semis sans labour du soja pour s’exonérer de ses autres dégats…

Maureen Jorand qui suit les négociations pour le CCFD signale que le rapport actuel pour la COP21 ne parle pas tout d’agriculture, mais seulement du « risque de nuire à la production »…La présidence française est aujourd’hui inquiète quant au résultat de la COP21 et lance un plan B : on met en avant des actions non-étatiques, lancées par des collectivités locales et des grandes entreprises, mais sans prise en compte réelle des paysans et des ONG.
Dès septembre 2014 s’est mise en place la Nouvelle Alliance pour une agriculture intelligente face au climat (climate smart agriculture) ; ses projets sont flous mais ses acteurs viennent pour 70% des pays du Nord et 60% du secteur privé (Cargill, Monsanto, Mac Donald…) Où sont les pays du Sud qui sont pourtant les premiers menacés par le changement climatique ? Derrière cette initiative, le risque de développer à nouveau le modèle agro-industriel à grande échelle, avec des intrants chimiques et le recours aux énergies fossiles, aux OGM…Les ONG se sont alarmées dès 2014 contre cette initiative et aujourd’hui, 250 ONG s’organisent pour la dénoncer et proposer d’autres solutions demandées par nos partenaires…

Le syndicat MAPTO, Mouvement pour une Alliance Paysanne au Togo, prend ensuite la parole avec son président et son coordinateur : créé en 2003 par 7 paysans, il en regroupe maintenant 20000 regroupés en 126 coopératives et fait autorité dans le pays ! Ils promeuvent une agriculture vivrière et l’agro-écologie avec des techniques culturales respectueuses de la terre( utilisation d’engrais naturels, fumier, légumineuses…) ; avec l’appui du CCFD, ils forment des leaders paysans et développent du plaidoyer auprès des autorités locales ou nationales pour défendre les paysans, empêcher les gros achats de terres à bas prix par de riches togolais ; ils ont obtenu du gouvernement l’interdiction de l’exploitation des sables de l’océan qui rongeait la côte sur plus de 350 mètres. Ils sont choqués par les fausses solutions décrites : des crédits pour polluer, l’agriculture industrielle ! L’agriculture au Togo qui utilise essentiellement la houe et la machète pollue peu ! Consultés récemment par la présidence togolaise, ils ont poliment refusé les offres d’agriculture productiviste ou des semenciers OGM. Mais le pays subit déjà les méfaits du changement climatique. La saison des pluies s’est raccourcie de 2 mois. Des inquiétudes aussi devant l’appétit des multinationales qui vont arriver et tenter d’acheter des terres…A la Cop 21, les gouvernements africains ont peu de place et les paysans n’ont pas la parole !

Un moment tendu ensuite avec l’intervention d’une militante végétalienne qui reproche très violemment aux intervenants de ne pas parler suffisamment des conséquences de l’élevage sur les gaz à effet de serre. C’est une réalité que partagent les conférenciers, mais le message pour défendre les animaux, hurlé à la cantonade, est contre-productif dans l’assemblée...alors qu’un débat plus réaliste s’instaurera avec un éleveur de l’Ariège, dans le village Agriculture-Alimentation.

Enfin, Jacques Berthelot présent dans la salle rappelle le risque des APE, Accords de Partenariat Economiques qui vont abaisser les droits de douane et mettre en danger les paysans d’Afrique de l’Ouest. Le Togo a résisté jusque-là, il ne doit pas signer !

Des raisons multiples pour soutenir encore plus le travail courageux de nos partenaires au Togo et dans les pays du Sud !

 


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Actualité publiée le 15 septembre 2015