Retrouver la pertinence de la question de Dieu

par Jean-Michel Castaing, auteur

Retrouver la pertinence de la question de Dieu


Un sondage récent nous a appris que plus de la moitié de la population française se déclare incroyante. Ces chiffres n’étonneront que ceux qui ne vivent pas dans le monde réel. Autour de nous, rares sont en effet les personnes qui parlent de Dieu ou bien qui pratiquent un culte. Le sondage nous révèle toutefois que cette proportion est atténuée chez les plus jeunes.

Des « décrochés » plus que des « décrocheurs »

Face à ces chiffres, comment réagir en tant que chrétiens ? D’abord, il s’agit de poser le bon diagnostic. De nos jours, nous n’avons plus affaire à des « décrocheurs », à des Français qui ont tourné le dos à l’enseignement et à la culture du milieu chrétien qui ont baigné leur jeunesse, mais plutôt à des « décrochés », c’est-à-dire des individus qui n’ont jamais entendu parler de Jésus ni de Dieu. La plupart des baby-boomers n’ont rien transmis à leurs enfants en matière religieuse. Si bien que ces derniers ne sont pas en rupture : tout simplement, ils vivent selon d’autres systèmes de référence étrangers au christianisme. Par exemple, les codes iconographiques qui régissent un tableau religieux leur sont devenus étrangers. Savent-ils même la provenance d’expressions telles que « ouvriers de la onzième heure », « séparer le bon grain de l’ivraie » ? On peut en douter. Je me trouvais un jour dans la collégiale de Langeac, dans l’Allier, qui possède une superbe mise au tombeau. Un petit garçon demanda à son père qui était la personne « allongée » au milieu des autres personnages. L’homme ne sut quoi répondre à son fils.

Interroger à frais nouveau la question de Dieu

Le second défi posé aux chrétiens par cette décroyance est de faire découvrir à ces nouveaux incroyants la pertinence de la question de Dieu. L’interrogation n’est plus désormais : pourquoi le Dieu de Jésus-Christ est-il si désirable ? mais plutôt celle-ci : pourquoi est-il important de se poser la question de Dieu ? Avant de se lancer dans la proposition de la foi, il sera peut-être nécessaire à l’avenir de préciser l’importance que revêt la quête de la réalité divine et les enjeux qu’elle porte.

Nouveaux dieux

Cela nous amène à la réflexion sur les substituts de Dieu. Nous mentionnions plus haut la pertinence de la question de Dieu. Or, celle-ci est inhérente à la nature humaine pour la simple raison que l’homme est un être spirituel. Aussi, l’oubli du Dieu chrétien entraîne-t-il de facto la résurgence de divinités de substitution. La nature a horreur du vide. Les chrétiens auraient tout intérêt à s’interroger sur les dieux ou les sages qui ont remplacé Jésus-Christ : l’écologie, un certain panthéisme cosmique, le New Age, Bouddha, les spiritualités trouvées sur le marché religieux ou bien tout le bricolage pseudo-gnostique vendu à l’encan sur les étals et dont la littérature dépasse en volume les livres chrétiens dans certaines librairies. De plus, la présence de l’islam est-elle un facilitateur du retour à Dieu ou un obstacle à l’évangélisation ? Face au choc du décrochage religieux, les chrétiens sauront-ils parler de leur foi avec un langage approprié à cette situation inédite ? C’est en tout cas le défi que celle-ci nous lance. 

Un monde saturé de « valeurs » chrétiennes

Enfin, pour repartir sur un pied nouveau en fonction de cette situation de décroyance ou mal-croyance, il faudra interroger toutes ces valeurs que le christianisme a portées et qui vivent désormais de leurs vies propres, sans lien avec leur terreau de naissance et avec Jésus-Christ qui, pour un chrétien, en rend la pratique facile : fraternité, compassion, solidarité, amour, ouverture, dépassement des affinités claniques, ethniques, religieuses ou tribales. Notre morale est imprégnée de christianisme sans que nous en ayons toujours conscience. Aux chrétiens de faire redécouvrir aux nouvelles générations la source de ces « valeurs ». Un proverbe juif dit que le Messie viendra lorsqu’on attribuera la paternité de la vérité à celui qui l’a prononcée le premier.

Jean-Michel Castaing,
auteur

 


Actualité publiée le 13 octobre 2021