Vigile Pascale en la cathédrale Saint Etienne

Nuit du 20 au 21 avril 2019

Vigile Pascale en la cathédrale Saint Etienne

 

 

« Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? » C’est l’interpellation des deux anges aux femmes venues au tombeau « à la pointe de l’aurore » ; ils poursuivent : « Il n’est pas ici, il est ressuscité  » (Lc 24, 5-6). Les femmes vont rapporter tout cela aux Onze, mais «  ces propos leur semblèrent délirants ». Trois fois au moins, Jésus avait annoncé à ses Apôtres toute la suite pascale : il allait être livré, moqué, tué, avant de ressusciter ; mais ils ne voulaient pas l’entendre ou n’en étaient pas capables.

Aujourd’hui encore, on s’aperçoit que même des catholiques ne croient pas en la résurrection, qui est pourtant l’objet explicite de notre foi à deux reprises dans le Credo : « Le troisième jour, il est ressuscité des morts  », disons-nous dans le Symbole des Apôtres, avant d’ajouter : « Je crois à la résurrection de la chair  ». Dans celui de Nicée-Constantinople, nous professons : «  Il ressuscita le troisième jour, conformément aux Écritures  », et nous ajoutons : «  J’attends la résurrection des morts et la vie du monde à venir  ».

Saint Paul dans sa première lettre aux Corinthiens a des paroles très fortes sur cette clé de notre foi : «  Avant tout, je vous ai transmis ceci, que j’ai moi-même reçu : le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Écritures – expression reprise dans le Credo – et il fut mis au tombeau ; il est ressuscité le troisième jour conformément aux Écritures – encore ! –, il est apparu à Pierre, puis aux Douze » (15, 3-5). Qu’il s’agisse bien du fondement de notre foi, c’est ce qu’ajoute Paul : «  S’il n’y a pas de résurrection des morts, le Christ non plus n’est pas ressuscité. Et si le Christ n’est pas ressuscité, notre proclamation est sans contenu, votre foi aussi est sans contenu  » (13-14).

Certes, cela ne va pas de soi. Nos contemporains ont plus de facilité à croire à la réincarnation, qui est pourtant désespérante en ses cycles interminables, qu’à la résurrection. Vous me direz que pour saint Paul, c’était facile, parce que lui a vu ou entendu Jésus : «  Saul, Saul, pourquoi me persécuter ?  » (Ac 9, 4). «  Pendant des années, m’écrit l’un de vous, je me suis interrogé sur l’existence de Dieu, mais me heurtais toujours à cette incrédulité quant à la Résurrection du Christ, malgré toute ma bonne volonté ; cela était plus fort que moi, je n’arrivais pas à m’ouvrir à Lui. Que cela était spirituellement éprouvant !  »

Il est mystérieux de voir comment Dieu nous rejoint, mystérieux aussi de constater comment il respecte notre liberté, comment il attend à la porte de notre cœur. Jésus l’a dit dans son discours sur le Pain de vie : «  Personne ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire, et moi, je le ressusciterai au dernier jour  » (Jn 6, 44). Le Père se sert de tout pour nous amener à son Fils, comme vous l’avez expérimenté : une rencontre, un accident, une impasse dans votre vie.

Enfoncé dans une situation mortifère, l’un de vous témoigne : «  J’avais tout essayé jusqu’à ce jour où, assis dans ma voiture, entre deux rendez-vous, je me suis posé dans une rue silencieuse et discrète. J’ai appelé à l’aide sans dire un mot. Toutes mes pensées étaient tournées vers un au-delà, vers un sauveur, quelqu’un ou quelque chose qui puisse mettre fin à mon état de souffrance. Moins de trente secondes après, j’ai perçu une Présence, sortie de nulle part, se tenant à ma gauche, quasi à mon contact. Pas un son, pas un mouvement, pas un mot, juste une manifestation holographique de la Sainte Vierge Marie. Rien ne semblait m’avoir préparé à cela. Tout ce qui m’avait empoisonné, tout disparaissait. En quelques minutes, mon esprit souillé fut lavé, tout comme l’intégralité de mon être, un lavage au plus profond de chaque cellule.  » N’est-ce pas là un étonnant avant-goût du baptême ?

Comme je le lis dans une autre de vos lettres : «  Désormais, j’invite Dieu en ma demeure, sans qu’il s’impose. Je le refuse encore, mais je le sens œuvrer en moi, je n’ai plus peur, je doute moins ". Comme nous y invite le Psaume : « Je tiens Dieu à ma droite, je suis inébranlable ». Beaucoup de problèmes n’en sont plus, je sais que Dieu y pourvoira et que l’Esprit Saint soufflera. Jésus Christ est mon meilleur ami : je suis incessamment reconnaissant de constater à quel point. » Quelle délicatesse du Père qui nous conduit à son Fils !

Revenue de façon inexplicable d’un accident de la circulation, l’une de vous m’écrit : « J’allais à l’église sans comprendre la chose. Après cet événement, je me suis dit : Tiens, qui suis-je pour qu’il me préserve. J’ai cherché à le connaître, à savoir qui il est réellement, et là je pense que je suis sur la voie. Et de tout cœur je demande à Dieu de me garder dans sa maison, car il est tout pour moi : il est la forteresse où je trouve refuge, sans lui je ne suis rien.  » Vous retrouvez aussi les mots des psaumes.
Oui, frères et sœurs, Dieu est à l’œuvre dans nos vies, dans tous les moments de notre vie, pour nous ramener à lui, pour nous offrir son plein amour, la vie en abondance. Il est né, il est mort pour cela. Le pape François vient de rappeler aux jeunes cette Bonne Nouvelle que la parole de Jésus dans l’Évangile nous rappelle et que la liturgie nous fait expérimenter. Il vit, le Christ : tel est le titre de la nouvelle Exhortation apostolique du Saint-Père, qui commence comme suit : «  Il vit, le Christ, notre espérance et il est la plus belle jeunesse de ce monde. Tout ce qu’il touche devient jeune, devient nouveau, se remplit de vie. Les premières paroles que je voudrais adresser à chacun des jeunes chrétiens sont donc : Il vit et il te veut vivant !  » (25 mars 2019, n. 1).

Ce message est aussi pour vous six, chers amis qui allez devenir nos jeunes frères et sœurs par le baptême : Jésus vous veut vivants, lui, le Vivant. Le Pape poursuit : « Il est en toi, il est avec toi et jamais ne t’abandonne. Tu as beau t’éloigner, le Ressuscité es là, t’appelant pour recommencer  » (n. 2). Venez renaître, venez revivre, venez vivre à la pleine mesure des attentes que Dieu a mises dans votre cœur. Paul l’écrit aux Romains : « Pensez que vous êtes morts au péché, mais vivants pour Dieu en Jésus Christ  »

+ fr. Robert Le Gall,
Archevêque de Toulouse