Marie ou la mémoire du cœur

Quand on sait l’intense remaniement intérieur que doit assumer toute jeune femme apprenant pour la première fois qu’elle attend un enfant, on imagine facilement le bouleversement provoqué par cette promesse humainement démesurée : ton fils sera le sauveur ! Il y a de quoi être profondément troublée. Certes, il est plausible, historiquement, que Marie n’ait réalisé que peu à peu ce que signifiait une telle promesse. Mais, de toute façon, Luc a raison de faire percevoir à ses lecteurs que chaque survenue de Dieu est vécue comme une sorte de « traumatisme » pour notre être-religieux, car le plus souvent il s’est bâti un Dieu, à sa propre mesure, pas trop dérangeant, voire arrangeant. Devant un tel traumatisme, Marie a le bon réflexe : elle a recours à la mémoire du cœur. Une mémoire qui, puisant dans la Parole de Dieu, dans les événements de l’histoire d’Israël, et dans les faits marquants de son propre devenir, permet de relier l’excès de l’expérience présente à l’histoire du salut.

XAVIER THEVENOT, S.D.