150e anniversaire de la canonisation de sainte Germaine

Homélie de Mgr Le Gall, à Pibrac le 15 juin 2017

150e anniversaire de la canonisation de sainte Germaine

SAINTE GERMAINE
150e ANNIVERSAIRE DE LA CANONISATION
15 JUIN 2017

 

Au début de ce mois, le lundi 5 juin au soir, nous nous trouvions, nombreux comme d’habitude, à Notre-Dame-des-Miracles sur Avignonet et nous avons processionné dans le village au soir tombant, dans l’un des pèlerinages fréquentés de notre diocèse. Sainte Germaine nous rassemble tous les ans plusieurs jours autour du 15 juin, et plus particulièrement en cette année 2017 qui célèbre les 150 ans de sa canonisation.

À la messe des Candelous avait été choisie, dans le livre des Messes en l’honneur de la Vierge Marie, celle qui honore « Marie, disciple du Seigneur ». Vous savez qu’avec l’Église tout entière, sous l’impulsion de notre pape François, nous voulons devenir de plus en plus les « disciples-missionnaires » du Seigneur Jésus pour recevoir nous-mêmes et transmettre La joie de l’Évangile et L’allégresse de l’amour.

La première lecture de cette messe est empruntée au dernier chapitre du livre de Ben Sira, un livre de 51 chapitres qui se termine par un admirable portrait d’un disciple de la sagesse qui me paraît convenir remarquablement à notre sainte Germaine. Nous venons d’entendre Jésus rendre grâce à son Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir révélé aux tout-petits les secrets du Royaume et de les avoir cachés aux sages et aux savants. Mais de quelle sagesse, de quel savoir ?

À la récente Pentecôte, nous avons célébré la confirmation de 130 adultes à la cathédrale. J’ai demandé pour eux les sept dons de l’Esprit Saint qui sont la sagesse et l’intelligence, le conseil et la force, la connaissance, l’affection filiale et l’esprit d’adoration. Le lendemain soir, je les ai retrouvés dans le texte final du Siracide ; le voici :

Quand j’étais encore jeune,
j’ai cherché la Sagesse dans ma prière ?
Depuis la fleur jusqu’à la maturité de la grappe,
elle a été la joie de mon cœur.
Mon pied s’est avancé sur le droit chemin ;
depuis ma jeunesse je marchais sur ses traces.
Il m’a suffi de tendre un peu l’oreille pour la recevoir
et j’y ai trouvé de grandes leçons.
Grâce à elle, j’ai progressé ;
je rendrai gloire à celui qui me donne la Sagesse.
Avec elle, dès le commencement, j’ai trouvé l’intelligence,
c’est pourquoi je ne serai jamais abandonné.

Germaine ne s’est jamais prise pour une sage ni pour une savante, mais elle a su, sans même s’en rendre compte, demander à Dieu de le connaître, à partir de son attachement à lui, de son esprit d’adoration, dans la contemplation de sa création et dans l’accomplissement de ses humbles tâches de bergère attentive à ses brebis. Au-delà de toute éducation intellectuelle ou scientifique, elle a reçu les dons de sagesse, d’intelligence, de connaissance de par son union à Dieu dans un respect aimant de chaque instant.

La sagesse, étymologiquement, est la capacité de goûter, de déguster, de savourer ce qui est bon, d’apprécier les bonnes choses, de reconnaître les belles personnes, comme me l’ont écrit les catéchumènes de cette année. Comme nous y invite tous le Psaume 33, « Goûtez et voyez : le Seigneur est bon ! » (9). Sans phrases ni discours, Germaine avait le sens de Dieu, des choses de Dieu : elle « goûtait  » Dieu et tout ce qui le touche. Méprisée, tenue pour rien, elle a laissé mûrir en son âme les fruits de l’Esprit, ceux qu’énumère saint Paul dans sa lettre aux Galates : « Amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi » (5, 22-23) et que le passage de sa lettre aux Colossiens que nous venons d’entendre reprend presque en totalité : « Revêtez-vous de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience. Par-dessus tout, ayez l’amour, qui est le lien le plus parfait » (3, 12-14).

Depuis sa jeunesse, elle qui est restée jeune, qui, jeune, est passée aux secrets du Royaume de Dieu, elle a su « tendre l’oreille » à la Sagesse d’en-haut ; elle est devenue un vrai « disciple » de Jésus, doux et humble de cœur. Elle a « trouvé de grandes leçons » dans son union à lui. Dans ce même sens, notre Cardinal Saliège a su dire ces mots qui nous touchent encore et sont inscrits dans cette basilique : « Nous l’aimons, car elle a mis de grandes intentions à faire de petites choses ». Ce qui fait écho à ces pensées de Pascal : « Faire les petites choses comme grandes à cause de la majesté de Jésus-Christ qui les fait en nous et qui vit notre vie, et les grandes comme petites et aisées à cause de sa toute puissance. »

Dans un contexte où la malveillance dominait, sainte Germaine a su transformer le mal en bien, les morceaux de pain rassis en roses, parce que son cœur était bon. Écoutons encore Ben Sira :

Bouleversée jusqu’au fond de moi-même par la sagesse,
je l’ai recherchée ; c’est pourquoi j’ai obtenu un bien excellent.
En récompense, le Seigneur m’a donné une langue
avec laquelle je le louerai.

Sans paroles, notre Germaine si chère, chante comme Marie en son Magnificat, comme ces « pauvres du Seigneur » que sont les psalmistes : « Goûtez et voyez : le Seigneur est bon ! »

+ fr. Robert Le Gall
Archevêque de Toulouse