Il n’y a pas d’âge pour recevoir

Tandis que la plupart des sacrements, notamment le mariage, subissent une érosion de la demande, la confirmation a le vent en poupe. Au moins chez les adultes.

« Lorsque j’ai été sollicitée pour répondre à vos questions sur la confirmation, j’ai eu un temps d’hésitation. Puis je me suis rappelée le sens de ce sacrement, celui de s’engager publiquement à vivre en chrétien. Je ne pouvais pas me dérober ! » Non sans humour, Rahel revient sur sa décision prise il y a quelques mois d’achever, à 48 ans, son initiation chrétienne. Cette mère de trois filles, âgées de 9 à 20 ans, verra son front marqué du Saint Chrême par l’archevêque, lors de la Pentecôte. « Les circonstances étant, je n’ai jamais eu l’opportunité de recevoir dans le passé la confirmation, explique cette habituée de l’église du Saint-Esprit, à Toulouse. Mais je vivais très bien comme ça… La question s’est posée quand j’ai été sollicitée pour devenir membre de l’équipe d’animation pastorale (EAP) il y a quelques années. Puis le déclic a eu lieu lors de la messe de rentrée avec notre nouveau prêtre. Celui-ci se proposait d’accompagner des confirmands adultes. Je suis venue le voir à la fin de l’office pour lui dire que je connaissais une personne qui était intéressée... »

Résidente du quartier de Bagatelle, dans le doyenné Rive Gauche, Rahel estime que les périphéries dont parle le Pape François sont bien plus proches qu’on ne le pense. «  Il peut s’agir de votre voisin de palier, prévient celle qui s’estimait justement concernée par l’appel du Pape avant la préparation de sa confirmation. Jusque-là, je me rendais à la messe comme à un rituel, une tradition à transmettre aux enfants ». 

« J’avais peur d’être jugée  »

À l’image de Rahel, près de 140 adultes vont recevoir la confirmation cette année dans le diocèse de Toulouse. « En 2005, ils étaient un peu moins de 80 adultes », rappelle le père Christian Teysseyre, Chancelier du diocèse. La moyenne d’âge est de 35 ans tandis que la population est majoritairement féminine. Frédérique et Benoît, mariés depuis 21 ans, vont eux aussi recevoir la confirmation cette année à la cathédrale Saint-Étienne. « Notre fille sera confirmée la veille  », s’amuse Benoît.

Il y a encore quelques années, ce chef d’entreprise n’avait que peu de temps à consacrer à la pratique religieuse. « Mes enfants sont très croyants, j’ai été interpellé par leur foi  », explique ce père de famille, victime d’une violente agression physique en janvier 2014. « J’ai pris conscience que nos vies tenaient à peu de chose…  », philosophe-t-il. Il se dit heureux de pouvoir partager ce cheminement avec ses enfants : « D’habitude, c’est plus aux adultes de montrer le chemin aux plus jeunes et non l’inverse. Il faut un certain courage pour entamer cette démarche à 46 ans. En cela, les témoignages reçus lors de la préparation à la confirmation m’ont beaucoup aidé ». L’étape de la confirmation n’est pas sans conséquence dans la vie quotidienne pour Benoît. Touché par la préparation à la confirmation, ce dernier aimerait désormais se rapprocher de l’EDC, le mouvement des Entrepreneurs et Dirigeants Chrétiens. Le Toulousain l’admet aussi, sans sa femme, il n’aurait pas osé entamer une telle démarche. « J’étais un peu gênée de n’avoir jamais reçu ce sacrement jusque-là, confie Frédérique, 48 ans. J’avais peur d’être jugée. Mais en même temps, j’étais déterminée car je ressentais comme un manque, celui de ne pas être allée au bout de mon initiation chrétienne.  »

Parmi les confirmands, certains sont baptisés depuis de nombreuses années comme Frédérique et Benoît, et d’autres sont des « nouveaux-nés de la foi », ce qu’on appelle en Église des catéchumènes. Au total, le chiffre de confirmands, collégiens et lycéens compris, est légèrement en baisse et « s’établit aujourd’hui à 776 personnes contre 812 il y a dix ans ». Ce paradoxe s’explique par la baisse du nombre de jeunes confirmands. «  En général, les jeunes suivent la catéchèse pour la première communion voire la profession de foi mais s’arrêtent ensuite », regrette le Père Guillaume Loze, responsable du service diocésain de la pastorale des jeunes.

Un cheminement pourtant poursuivi par Benoît, 13 ans, aîné d’une fratrie de 6 enfants à Lanta, dans le Lauragais. Scolarisé dans un collège public, Benoît a reçu la confirmation en janvier dernier, après une préparation au sein de sa paroisse. Pour lui, « la confirmation est une force spirituelle » qui l’aide à vivre en chrétien et à prier. « L’Esprit Saint est descendu sur moi pour me sauver, ma foi est plus solide  ». Qu’on se le dise, il n’y a pas d’âge pour recevoir la confirmation ! 

Hugues-Olivier Dumez