Messe du Jour de la Résurrection

21 avril - Dimanche de Pâques

Messe du Jour de la Résurrection

 

Nous avons assisté à une naissance, nous y avons participé hier soir dans cette cathédrale : six adultes ont reçu le baptême, tandis qu’une centaine d’autres renaissaient dans diverses églises et communautés du diocèse. Nous en rendons grâce à Dieu, mais n’oublions pas que nous avons le devoir de continuer à prendre soin de ces «  néophytes », de ces «  nouvelles plantes » que Dieu fait pousser dans son jardin. Le jardin d’Éden n’a pas tenu ses promesses par la faute de nos premiers parents, mais rien n’est perdu pour Dieu : passé par le jardin de Gethsémani, Jésus a été déposé dans un tombeau neuf dans un jardin : c’est là qu’il apparaît à Marie-Madeleine, qui l’a pris pour un jardinier. Jésus continuait de prendre soin de sa plante sauvée par sa miséricorde.

Voici deux ans, on m’a offert une toute petite orchidée qui est restée en fleurs deux ou trois mois ; je l’ai mise dans un coin de ma chambre, d’où elle n’a pas bougé pendant plus d’un an et où elle n’a guère donné signe de vie. Je songeais à m’en défaire, quand tout récemment sur une tige grêle apparurent d’improbables petits bourgeons : un premier est tombé, mais après quelques semaines les autres se mirent à grossir et j’ai maintenant quatre fines fleurs violettes dont la dernière s’est épanouie pour le Triduum pascal.

Quelle parabole d’espérance ! Ce n’est pas pour rien que nous célébrons Pâques au printemps, quand tout renaît de la mort apparente de l’hiver. Tout était fini pour les Apôtres et pour les disciples d’Emmaüs, mais Jésus, qui est vraiment mort, est pleinement vivant : «  Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? » : c’était hier soir la question des deux Anges aux saintes femmes (Lc 24, 5).

Nous avons suivi l’agonie de Notre-Dame de Paris lundi dernier : le feu a pris quand nous étions dans cette cathédrale comble pour la messe chrismale où sont bénites et consacrées les huiles saintes qui servent aux sacrements. La cathédrale de Paris est devenue un buisson ardent, qui a désolé nos cœurs, mais qui a enflammé la France et le monde entier, qui croient en sa résurrection. D’ailleurs, il ne s’agit pas d’un tombeau vide, puisque demeurent en leurs places et fonctions : la croix, étonnamment lumineuse, l’autel, la Vierge du pilier, les orgues et les cloches, et même le coq, témoin de la faiblesse de Pierre comme de la nôtre, ce coq qui a éveillé l’aurore du matin de la Résurrection.

Dans une période très douloureuse pour l’Église catholique, nous pouvons penser que Dieu nous donne un signe, dramatique certes, mais plein d’espérance : l’attachement à cette nef qui a tenu dans l’embrasement se révèle profond ; notre foi s’en trouve affermie au terme de ce Carême difficile, notre volonté de conversion confirmée. Un symbole de la présence fidèle et forte de Dieu, de la tendresse de la Mère de Dieu, nous est donné. À chacun de nous d’en développer les leçons dans sa vie, notamment auprès des petits et des pauvres.

L’Exhortation du pape François aux jeunes, parue le jour de l’Annonciation du Seigneur, le 25 mars dernier, les invite, et nous avec, à vivre pleinement de la vie du Ressuscité, qui est mort pour qu’en lui nous vivions pour Dieu. Il vit, le Christ, leur écrit-il, et il te veut vivant. « Jésus est ressuscité et il veut nous faire participer à la nouveauté de sa résurrection. Il est la vraie jeunesse d’un monde vieilli, et il est aussi la jeunesse d’un univers qui attende d’être revêtu de sa lumière et de sa vie  » (n. 32).

À nous d’être les témoins de cette vie, en ajustant notre conduite personnelle et communautaire aux exigences de l’Évangile, face aux structures de péché et à l’influence du prince des ténèbres. Le Saint-Père cite aux jeunes un texte du prophète Baruch, que nous avons entendu hier soir à la Vigile pascale en la 6e lecture : « Le Seigneur nous appelle à allumer des étoiles dans la nuit d’autres jeunes, il nous invite à regarder les vrais astres, ces signes si variés qu’il nous donne pour que ne restions pas figés, mais imitions le semeur qui les regardait pour pouvoir labourer son champ. Dieu allume pour nous des étoiles pour que nous continuions à marcher : “ Les étoiles brillent à leur poste, joyeuses : les appelle-t-il, elles répondent : Nous voici ! ” (Ba 3, 34-35). Mais le Christ lui-même est pour nous la grande lumière d’espérance et la boussole dans notre nuit, car il est «  l’étoile radieuse du matin » (Ap 22, 16), de ce matin de Pâques.

Alleluia !

+ fr. Robert Le Gall,

Archevêque de Toulouse