HOMÉLIE D'ORDINATION DIACONALE EN VUE DU SACERDOCE

Samedi 23 juin 2019

HOMÉLIE D’ORDINATION DIACONALE EN VUE DU SACERDOCE

ORDINATION DIACONALE EN VUE DU SACERDOCE

DE AYMAR DE LANGAUTIER ET DE PAUL ROLAND-GOSSELIN

EN LA CATHÉDRALE .SAINT-ÉTIENNE DE TOULOUSE

LE DIMANCHE 23 JUIN 2019

EN LA SOLENNITÉ DU CORPS ET DU SANG DU SEIGNEUR

 

Hier soir à Muret, nous célébrions la confirmation d’une quinzaine de jeunes. Lors de notre rencontre, voici dix jours, ils m’avaient posé des questions très directes, qui sont revenues dans leurs lettres. Par exemple sur la mort : « Pourquoi doit-on mourir ? On pouvait très bien continuer à vivre pour l’infini et personne ne serait triste. » Ou encore celle-ci : « D’où vient Dieu ? C’est lui notre Père et notre Créateur, mais est-il la première entité ou y avait-il autre chose avant lui ? » Plusieurs questions tournaient autour du silence de Dieu : « Dieu est comme mon frère. Je me confie à lui tous les soirs, pourtant, je pense n’avoir jamais eu de signe de lui. » Dans le même sens : « Je me suis demandé à quoi servaient toutes mes prières et pourquoi je ne recevais aucun signe qui me montrait que Dieu m’aimait ou même juste qu’il pensait un peu à moi et qu’il m’entendait. »

Notre Dieu est-il lointain ou distant ? Nous venons d’entendre un texte très ancien concernant Melchisédek — c’est dire ! —, le contemporain d’Abraham. « Il était prêtre du Dieu très-haut, dit le texte. Il bénit Abram en disant : Béni soit Abram par le Dieu très-haut, qui a fait le ciel et la terre ; et béni soit le Dieu très-haut, qui a livré tes ennemis entre tes mains » (Gn 14, 18-20). Trois fois en trois versets revient l’adjectif « très-haut », lié à Dieu. Nous pouvons avoir, comme ces jeunes, le sentiment que Dieu est très-haut, trop haut, trop dans l’au-delà, inaccessible pour nous.

Ce qui m’a donné l’occasion de faire une catéchèse — vous en faites déjà l’expérience avec les jeunes — sur la proximité mystérieuse de notre Dieu, sur la manière qui est la sienne de nous rejoindre, de nous donner des signes, comme ils disent. Nous venons de parcourir le cycle pascal, et Jésus est assis à la droite du Père dans les hauteurs, où il intercède pour nous comme le Grand-Prêtre des biens à venir : c’est ce qu’écrit la lettre aux Hébreux, qui parle souvent de Melchisédek. Mais déjà, au cœur du cycle de la Nativité du Seigneur, nous avons entendu les anges chanter le Gloria, que nous avons repris tout à l’heure : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime ». Le mystère de Jésus, Fils de Dieu, né de la Vierge Marie, est celui du dessein d’un Dieu qui habite une lumière inaccessible, comme un saphir ou un azur très pur, mais qui devient pour nous « la lumière du monde » et « le pain descendu du ciel, qui donne la vie au monde », pour reprendre des mots de l’Évangile selon saint Jean (8, 12 et 6, 33).

Dieu et homme, vrai Dieu et vrai Homme, Jésus, « Dieu-avec-nous », l’Emmanuel, est le Médiateur entre Dieu et les hommes, qui est le Pont, qui fait le Pont (pontifex) entre nous et Dieu. Il se joint à nous pour nous faire rejoindre le mystère du Très-Haut. Le Seigneur devient le Serviteur ; le Fils bien-aimé, disciple de la doctrine du Père, est envoyé en mission pour préparer une magnifique moisson à laquelle nous sommes associés en tant que « disciples-missionnaires ». Le mystère ineffable de l’Eucharistie représente la façon divine dont le Très-Haut se met à notre portée dans ce condensé substantiel — ce qui est un pléonasme — de l’Incarnation rédemptrice.

Aymar et Paul, vous voici appelés à vous approcher de « la table d’un si grand mystère », selon les termes de la préface de cette solennité, pour « vous imprégnera de la grâce et connaître déjà la vie du Royaume » : « Vous êtes venus » — encore une expression chère à l’auteur de la lettre aux Hébreux — « vous êtes venus vers Jésus, le Médiateur d’une alliance nouvelle, et vers le sang de l’aspersion, son sang qui parle plus fort que celui d’Abel » (12, 24). Vous devenez la présence du Seigneur qui s’est fait Serviteur ; vous passez par la porte obligée du Service pour accéder aux mystères et y faire accéder ceux dont vous recevrez la charge. Vous avez conscience déjà « d’être toujours de service », m’écrivez-vous, à l’école de Marie, la Mère de Dieu et sa fidèle Servante, toujours docile à sa Parole.

Votre disponibilité au service multiforme de Dieu et de son Église, passe, en ce qui vous concerne, par le signe du célibat pour le Royaume, corps et cœur offerts, selon le mode de vie choisi par Jésus et sa Mère, en profonde cohérence de vie, dans la volonté de poursuivre l’unification de votre personne, pour qu’elle serve ainsi l’unité du peuple de Dieu, condition de toute évangélisation. Le célibat, avec la prière des Heures et l’obéissance cordiale sont les éléments indissociables de l’offrande que vous faites de vous-mêmes pour servir l’œuvre de Dieu, notamment dans l’attention aux pauvres et la volonté d’en faire avec nous les acteurs de l’annonce évangélique.

Au moment où Jésus va multiplier les pains et les poissons, en des gestes et des paroles qui annoncent l’Eucharistie, il « lève les yeux au ciel, il prononce la bénédiction sur eux, et les donna à ses disciples pour qu’ils les distribuent à la foule » (Lc 9, 16). Voilà votre mission, chers Aymar et Paul : lever les yeux au ciel, bénir Dieu et ceux qui vous seront confiés, devenir de plus en plus disciples, distribuer a la foule la Parole de vie et le Pain de vie. Sous l’impulsion de vos pasteurs, dans ce diocèse ou plus loin, prenez soin de ceux que le Seigneur vous confie ; vous êtes aussi confiés aux communautés à qui vous êtes envoyés, pour qu’ensemble nous devenions de plus en plus conscients de la mission joyeuse qui est la nôtre à tous dans la complémentarité de nos grâces, « pour que le monde croie ».

Oui, le Très-Haut s’est fait tout proche : il est à la portée de nos mains, de notre cœur, béni soit-il ! « Nul n’est monté au ciel sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle » (Jn 3, 13.15).

 


Actualité publiée le 28 juin 2019