Psaume 127


" À la maison "

 

Méditation de Monseigneur LE GALL

 

À la première page du premier chapitre de son Exhortation apostolique, le pape François, après avoir cité intégralement le Psaume 127 (n. 8), nous invite à « franchir le seuil de cette maison sereine, avec sa famille assise autour de la table de fête. Au centre, nous trouvons, en couple, le père et la mère, avec toute leur histoire d’amour » (n. 9).

Le premier mot de ce psaume domestique est une béatitude : « Heureux ». On l’avait déjà au dernier verset du psaume précédent : « Heureux l’homme vaillant ! » Ce bonheur n’est pas promis aux oisifs ni aux rêveurs : « Heureux qui craint le Seigneur et marche selon ses voies ! » Il s’agit bien de marcher, d’avancer : c’est aussi la béatitude qui ouvre le plus long des psaumes que nous évoquions au début, celui qui précède immédiatement le recueil des psaumes graduels : « Heureux les hommes intègres dans leurs voies, qui marchent suivant la loi du Seigneur ! » (Ps 118, 1). Rappelons que le tout-premier psaume entonne, lui aussi, d’emblée une béatitude : « Heureux est l’homme qui se plaît dans la loi du Seigneur » (Ps 1, 1.2). Il est donc clair que Dieu nous appelle au bonheur : le mariage, selon le dessein divin, est une Bonne Nouvelle. « Il faut montrer des chemins du bonheur », écrit le Pape, proposer un idéal exigeant, mais capable de combler nos aspirations (n. 38), non défendre « une doctrine froide et sans vie » (n. 59).

Pour bien faire voir de quel bonheur dynamique il s’agit, le psalmiste continue : « Tu te nourriras du travail de tes mains : Heureux es-tu ! À toi, le bonheur ! » (Amoris lætitia, du 19 mars 2016). Agir, travailler, nous fait participer à l’œuvre du Créateur. Le travail est lourd certains jours ou à certaines périodes ; le pain que nous mangeons peut être un « pain de douleur », pour reprendre l’expression du psaume précédent. « Le travail, c’est la santé ! » dit le proverbe, ce qui est vrai physiquement et moralement, à condition que soit gardé un équilibre personnel et familial. L’exploitation de l’homme par l’homme vaut aussi dans les grandes entreprises, où les cas de burn-out tendent à se multiplier, jusqu’au suicide. La plaie du chômage affecte profondément la personne, parfois très diplômée, qui se voit rejetée et se considère inutile. Oui, travailler de ses mains, donner de sa personne, est source de bonheur pour soi et pour les autres.

« Ta femme sera dans ta maison comme une vigne généreuse » (bid., p. 338). La fécondité et l’activité de l’épouse est ici évoquée avec délicatesse : elle donne des fruits et procure à l’homme le vin qui réjouit son cœur (cf. Ps 103, 15). Il faut relire, dans le chapitre qui termine le livre des Proverbes, l’éloge de la femme parfaite ; il est tout à fait dans le ton de ce psaume et du précédent, y compris dans l’évocation des portes de la ville : « Une femme parfaite, qui la trouvera ? Elle est précieuse plus que les perles ! Son mari peut lui faire confiance : il ne manquera pas de ressources. Elle est debout quand il fait encore nuit pour préparer les repas de sa maison et donner ses ordres aux servantes. Elle rayonne de force et retrousse ses manches ! Ses doigts s’ouvrent en faveur du pauvre, elle tend la main au malheureux. Aux portes de la ville, on reconnaît son mari siégeant parmi les anciens du pays. Ses fils, debout, la disent bienheureuse et son mari fait sa louange » (31, 10.15.17.20.23.28).

On pourra lire le large commentaire que fait le Pape de ce Psaume 127 (128 dans la numérotation hébraïque) aux numéros 8 à 26 de son Exhortation apostolique. Citons seulement ces lignes : « En ce chant apparaissent, dans la maison où l’homme et son épouse sont assis à table, les enfants qui les accompagnent comme “des plants d’olivier”, c’est-à-dire pleins d’énergie et de vitalité. Si les parents sont comme les fondements de la maison, les enfants sont comme les pierres vivantes de la famille »  (n. 14). Nous savons que dans le Nouveau Testament on parle de “l’Église qui se réunit à la maison” (1 Co 16, 19). Le milieu vital d’une famille pouvait être transformé en Église domestique, en siège de l’Eucharistie, de la présence du Christ assis à la même table. Ainsi se définit une maison qui, à l’intérieur, jouit de la présence de Dieu, de la prière commune et, par conséquent, de la bénédiction du Seigneur. C’est ce qui est affirmé dans le Psaume 127 (128 dans la numérotation hébraïque) que nous prenons comme base : “Voilà comment sera béni l’homme qui craint le Seigneur. De Sion, que le Seigneur te bénisse !” (4-5) » (n. 15).

Le psaume, qualifié d’« idylle » par le pape François (n. 19), se termine par une promesse de bonheur et de paix : « Tu verras le bonheur de Jérusalem tous les jours de ta vie, et tu verras les fils de tes fils. Paix sur Israël ! » (5-6).
Deux fois le mot de « bonheur » revient dans ce petit poème, deux fois aussi le mot « heureux » : il ne s’agit pas d’un bonheur égoïste, puisque ce qui est promis à cette famille ouverte à Dieu et aux autres, c’est « le bonheur de Jérusalem » et « la paix sur Israël ».

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

Psaume 127

 

Heureux qui craint le Seigneur
et marche selon ses voies !


Tu te nourriras du travail de tes mains :
Heureux es-tu ! A toi, le bonheur !

Ta femme sera dans ta maison
comme une vigne généreuse,
et tes fils, autour de la table,
comme des plants d’olivier.


Voilà comment sera béni
l’homme qui craint le Seigneur.


De Sion, que le Seigneur te bénisse !
Tu verras le bonheur de Jérusalem
tous les jours de ta vie,

 

et tu verras les fils de tes fils.
Paix sur Israël !

 

 
Traduction AELF
 Association Épiscopale Liturgique pour les pays Francophones