Elles s’écoutent attentivement et se passent la parole

Elles se libèrent d’un certain poids
La force, Dieu nous la donne par ce que les gens nous renvoient



E. Depuis que je connais l’association B., je la vois comme un lieu d’accueil, d’écoute, d’accompagnement et de rencontre entre femmes. C’est un lieu de diversité culturelles, chacune avec ses différences, ce qui est une grande richesse.

La majorité des femmes qui viennent à l’association pour la première fois ont des problèmes divers.
Après le premier entretien, je vois leur visage illuminé. Cela grâce à une écoute attentive.
Après l’entretien, il y en a qui partent tout de suite et celle qui restent à échanger avec les autres et à s’intéresser sur la vie de l’association. Pour les femmes qui ont le temps et qui le veulent, je les invite à participer aux activités de l’association ; là elles rencontrent les autres et font connaissance, et ainsi elles ne sont plus isolées.
 A l’association, il y a plein d’activités proposées par les femmes elles-mêmes et qui demandent la participation du groupe. 

Après l’activité qui les a réunies, spontanément, les femmes parlent de leurs histoires, de bons moments qu’elles ont connus, des moments durs et des angoisses aussi et de leurs vie actuelle. Le fait de pouvoir parler, elles se sentent légères ; elles se libèrent d’un certain poids qui leur pesait lourd.
Elles s’écoutent attentivement et se passent la parole pour répondre aux questions pour bien comprendre certaines choses. Certaines qui entendent les témoignages des autres sentent alors qu’elles ne sont pas des seules à être éprouvées : Il y en a qui vivent des situations plus dures que ce que l’on peut croire.
 Elles se sentent soulagées. Tout cela se passe sous une ambiance conviviale autour d’un thé, café et gâteaux amenés par des femmes elles-mêmes.
Pour celles qui ont pu s’en sortir, elles donnent des pistes aux autres pour les aider à avancer. Beaucoup de femmes font connaissance à l’association et deviennent solidaires. Elles se serrent les coudes et s’entraident mutuellement. C’est cette unité, cette solidarité et cet amour les unes envers les autres qui poussent certaines femmes à dire que l’association est leur famille. Et c’est cela qui me donne la force d’avancer !
 
Une des activités, ce sont les sorties ; ça change leur quotidien ; quand elles sont chez elles, elles ne voient que les casseroles, le linge ... elles pensent toujours au travail qu’elles doivent faire et c’est toujours pareil. Avec les sorties elles trouvent un autre regard : 
C’est comme si elles prenaient un autre habit. Une disait : "Je suis épanouie avec les autres ; je fais des découvertes ; je pose des questions sur ce que je ne connaissais pas ..." Ça éveille leur curiosité, elles se détendent, elles jouent, etc. 


Quand je les vois heureuses, ça me donne la force de m’impliquer dans ce que je fais. Mais je voudrais raconter ce qui m’a donné le plus de force : nous avons amené le groupe d’alphabétisation à la médiathèque pour leur apprendre à chercher des livres ; tout le monde cherchait des CD ; une d’elles écoutait de la musique et je la voyais "transportée" ; à la fin elle me dit : "Je voudrais avoir la carte de la médiathèque". Alors je l’ai renseignée sur les documents nécessaires ; quand elle a rassemblé le dossier, nous nous sommes donné rendez-vous pour prendre la carte ; mais je n’ai pas pu me libérer et elle a fait la démarche toute seule. Quand elle m’a téléphoné pour me dire : "J’ai ma carte !", j’étais très heureuse. C’est ça le plus important pour l’association : que les femmes deviennent autonomes. La force, je la reçois des femmes elles-mêmes.

Dans ma prière, je demande à Dieu de pouvoir répondre à leurs demandes et de les amener à avoir confiance en elles ; je Lui demande la qualité d’être la lumière de celles qui viennent à moi. Elles viennent avec tout le poids de leur vie ; en déposant cette charge, leur joie apparaît.

(Z.) Je suis bénévole dans plusieurs associations, en particulier pour le soutien scolaire. Je donne la priorité à deux catégories de personnes : les enfants et les personnes âgées : certaines sont dans l’isolement total ; elles ont une très grande souffrance psychique et elles sont mises à l’écart.
Face à ces personnes, je me demande comment faire. Et je me rappelle comment M.A. m’a accueillie, la première fois que je suis venue à l’Association B. : elle a passé beaucoup de temps avec moi, elle m’a expliqué chaque affiche ; elle avait une grande présence.

C’est vrai : le plus important, c’est l’accueil ! Si je suis là devant elles avec une présence attentive, quelque chose se passe en moi et en elles. Si elles disent avoir fait des choses graves, je leur dis que je ne suis pas là pour les juger.

Quand elles se sentent accueillies ici, elles se lâchent ; c’est un lieu repère, un espace de liberté, comme un lieu protecteur ; elles se sentent reconnues à part entière.
Toute ma force, je la cherche en Dieu. C’est un travail que je fais avant de venir : c’est Dieu qui est en train d’agir en moi ; je ne suis forte que par Lui ; mais il agit aussi à travers la personne que je rencontre. Par son regard, cette personne m’aide à me relever. Cette démarche m’a souvent aidée. 

La force, Dieu nous la donne par ce que les gens nous renvoient. Une femme était désespérée à cause de la situation de ses enfants ; nous l’avons accueillie et écoutée ; on ne lui a pas réglé ses problèmes, mais à la fin elle était bien.

Je suis musulmane. Le Coran dit que Dieu me regarde ; il agit en moi ; son regard dit sa présence dans ma vie ; Son regard donne la force. Ma mère nous disait souvent : "Il faut avoir les yeux du cœur". Mes parents m’ont transmis des choses ; il faut que je m’habitue à tout ce qu’ils ont donné. Être présente aux autres, ça suppose que dans ma tête je pense du bien d’eux. Si je les juge mal, ils le sentiront vite.

Extrait du Livre blanc des fragilités et des merveilles Apprendre à parler, à lire et à écrire ....