Qu’elle soit cathédrale, paroissiale ou chapelle, une église est le lieu du rassemblement du peuple de Dieu appelé à célébrer le Christ Ressuscité ; toute église a été dédicacée ou au moins, bénie s’il s’agit d’une chapelle. C’est-à-dire qu’elle a reçu l’onction qui lui confère, par l’action de l’Esprit –Saint, sa fonction première qui est avant tout liturgique et sacrée, ce qui implique une organisation générale de son espace adaptée à « l’accomplissement de l’action sacrée » et à « la participation active des fidèles ». (PGMR 288)
Les fidèles et la chorale auront une place qui facilite leur participation active
Le prêtre célébrant, le diacre et les autres ministres prendront place dans le sanctuaire ». (PGMR 294)
Le sanctuaire, du latin sanctuarium, « lieu sacré » est le lieu le plus sacré de l’église, où se dresse l’autel du sacrifice eucharistique et vers lequel converge toute l’action liturgique. Il est aussi le lieu où est proclamée la parole de Dieu, et où le prêtre, le diacre ainsi que les autres ministres exercent leurs fonctions (PGMR 295). Sa destination si particulière implique que le sanctuaire soit surélevé et mis en valeur pour être parfaitement visible de l’assemblée tout en restant accessible afin de favoriser la participation active des fidèles. Il ne sera donc pas encombré afin de rendre plus visibles ses trois pôles : autel, ambon, siège de présidence, et de faciliter les déplacements.
La nef, du latin navis, « bateau » est le lieu habituellement réservé aux fidèles qui constituent l’assemblée liturgique. Cette appellation liée à l’architecture en forme de bateau renversé symbolise aussi l’Eglise, navire gouverné contre vents et marées par l’apôtre Pierre et ses successeurs . Les églises sont traditionnellement constituées d’une nef simple, bordée de chapelles latérales ou doublée d’un ou plusieurs collatéraux, des nefs plus étroites et basses, où sont réparties différentes chapelles latérales. Ces chapelles ne sont généralement utilisées aujourd’hui que pour la dévotion des fidèles ou, parfois, l’adoration eucharistique, sauf la chapelle baptismale qui fera l’objet d’un prochain article.
L’organisation d’ensemble et la décoration des églises répondent elles aussi à des normes bien définies et voulues par le concile Vatican II. « Les édifices sacrés et les objets destinés au culte divin seront dignes et beaux, et capables de signifier et de symboliser les réalités surnaturelles », (PGMR 288), tout en « visant à une noble simplicité plutôt qu’à un luxe pompeux », (PGMR 292). L’Eglise fait appel depuis toujours à un « art de qualité », conforme aux « valeurs artistiques » de chaque région ou chaque civilisation, tout en conservant et respectant les œuvres du passé, (PGMR 289). Le pape Benoît XVI se situait bien dans la lignée de ses prédécesseurs en s’exprimant ainsi sur les liens entre l’Eglise et l’art : « (…) je désire exprimer et renouveler l’amitié de l’Eglise avec le monde de l’art, une amitié consolidée dans le temps, car le christianisme, dès ses origines, a bien compris la valeur des arts et en a utilisé avec sagesse les langages multiformes pour communiquer son message immuable de salut. Cette amitié doit sans cesse être promue et soutenue, afin qu’elle soit authentique et féconde, adaptée aux temps et tienne compte des situations et des changements sociaux et culturels » . (Chapelle Sixtine, 21 novembre 2009)
I/ Disposition du sanctuaire :
« Le sanctuaire est le lieu où se dresse l’autel, où est proclamée la parole de Dieu, où le prêtre, le diacre et les autres ministres exercent leurs fonctions. Il convient qu’il se distingue du reste de l´église soit par une certaine élévation, soit par une structure et une ornementation particulières. Il doit être assez vaste pour que la célébration de l’Eucharistie puisse être accomplie et vue facilement » (PGMR 295)
L’autel est situé au centre du sanctuaire de manière à pouvoir en faire aisément le tour, il en est le point focal ; un Christ en croix sera placé en permanence dessus ou à proximité (PGMR 308), bien en vue de tous. L’ambon et le siège de présidence seront disposés en fonction de l’espace disponible tout en permettant un déroulement harmonieux et cohérent de l’action liturgique ; chacun de ces trois pôles signifiant par lui-même la nature de l’action liturgique qui s’y déroule, ainsi que la fonction de ceux qui les utilisent.
« L’autel où le sacrifice de la Croix est rendu présent sous les signes sacramentels, est aussi la table du Seigneur à laquelle, dans la messe, le peuple de Dieu est invité à participer, il est aussi le centre de l’action de grâce qui s’accomplit pleinement par l’Eucharistie. » (PGMR 296). Il est le lieu où se renouvelle l’unique banquet sacrificiel de la Nouvelle Alliance.
Autel tombeau de Saint Thomas aux Jacobins de Toulouse
Du latin altus, élevé, les autels destinés aux offrandes sacrificielles ont de tout temps été élevés en l’honneur des divinités. L’histoire de l’Ancienne Alliance est jalonnée d’autels élevés en mémoire de l’Alliance conclue entre Dieu et les hommes : Abraham, Moïse, Josué, Salomon, etc. ont élevé des autels qui deviendront le centre d’une action liturgique, des « holocaustes et des sacrifices de paix au Seigneur » suivis d’un repas . (Ex 24, 4-11)
Par l’unique sacrifice du Christ dans la Nouvelle Alliance, l’autel prend un nouveau sens chez les premiers chrétiens pour qui le seul temple est le corps du Christ (Jn 2, 21), le seul grand prêtre et l’unique autel sont le Christ (He 5,5 ; He 13, 10), ce sens nouveau est celui de la table du Seigneur (1 Co 11, 20) où le pain et le vin deviennent le Corps et le Sang du Christ.
Placé très tôt en un lieu central afin que les fidèles puissent s’y rassembler (St Jean Chrysostome), l’autel doit rester le lieu du seul repas sacrificiel ; il sera couvert par respect d’une (ou plusieurs) nappe blanche (PGMR 304), adaptée à la structure de l’autel et tenue propre. L’Evangéliaire y sera déposé jusqu’à la proclamation de l’évangile. Durant le temps de la liturgie eucharistique, le calice et la patène, le corporal, le purificatoire, la pale, le missel y sont placés, ainsi que la croix et la lumière, s’ils ne sont pas disposés à proximité, (PGMR 305, 306, 307).
Dans chaque église, l’autel se doit d’être unique, fixe et dédicacé selon le rite du Pontifical Romain (CAN 1235). L’autel fixe et unique est le « signe permanent du Christ Jésus, Pierre vivante » (1P 2, 4 ; cf. Ep 2, 20). Une décoration florale sobre et en accord avec le temps liturgique sera disposée autour de l’autel ; le service diocésain « Fleurir en liturgie » sera de bon conseil pour toute personne en faisant la demande. Si l’ancien maître-autel tridentin a été conservé, il ne sera pas mis en valeur par une ornementation trop voyante. (PGMR 298 300 303 305)
« L’autel tant fixe que mobile doit être réservé au culte divin à l’exclusion de tout usage profane ». (CAN 1239)C’est la raison pour laquelle l’autel ne doit pas servir de support à tout objet étranger à la célébration de la messe : fleurs, manteaux, sacs…
Lorsque la nécessité d’un nouvel autel se fait sentir, la démarche sera entreprise par le curé de la paroisse concernée, en lien avec la communauté paroissiale, éventuellement avec les autorités civiles et avec le concours de la Commission Diocésaine d’Art Sacré. Autel du sacrifice et table du Seigneur, l’autel sera de tradition ancienne et de préférence, réalisé en pierre naturelle et soutenu par un socle ou des colonnes d’un matériau noble et solide ; des reliques sont déposées par l’évêque à l’occasion de la consécration dans un « sépulcre » creusé dans la table de l’autel. Le bois peut aussi être utilisé, notamment concernant les autels non fixes des chapelles ou annexes, ou tout autre matériau noble et digne traditionnellement utilisé localement ; le verre ou le métal ne participeront qu’à une éventuelle ornementation. La conception d’un autel devra être confiée à un artiste ou artisan compétent qui aura la responsabilité d’une création digne, non ostentatoire, au service de la liturgie.
Du grec anabaïnein, « monter », emplacement surélevé, bien visible de tous, où « monte » le lecteur. La place de l’ambon dans les églises paléochrétiennes et byzantines était particulièrement destinée à la lecture de la Parole de Dieu et à l’enseignement des catéchumènes constituant la majorité de l’assemblée ; il était parfois élevé afin de permettre à tous d’entendre et de voir l’orateur, et faisait partie de l’architecture de l’église. Longtemps absent de nos églises, l’ambon y a été réintroduit pour servir le Renouveau Liturgique de la Parole de Dieu, lors du réaménagement post conciliaire des églises. Son emplacement est à adapter en fonction du lieu et de l’organisation de l’espace mais aussi de l’assemblée écoutante .
« La dignité de la parole de Dieu requiert qu’il y ait dans l’église un lieu adapté à sa proclamation et vers lequel, pendant la liturgie de la Parole, se tourne spontanément l’attention des fidèles. » (PGMR 309)
L’ambon doit se démarquer du simple pupitre d’animation sans pour autant « s’imposer » au risque de détourner l’attention des fidèles de l’écoute. Il doit être bien visible de tous, stable et solide comme la parole de Dieu et muni d’un système audio parfaitement adapté. Il est réservé à la proclamation des lectures, du psaume responsorial et de l’annonce de la Pâque. De même l’homélie et la prière universelle peuvent y être prononcées. Les annonces et l’animation se font quant à elles à partir d’un pupitre réservé à cet effet, le pupitre de l’animateur par exemple.
Liturgie de la Parole et liturgie eucharistique sont étroitement liées comme nourriture spirituelle offerte aux fidèles pour fortifier leur foi (S.C. 56). L’autel, « table du Corps du Christ » et l’ambon, « table de la Parole de Dieu » ( D.V.21) seront donc conçus en parfaite harmonie de style, si ce n’est du même matériau.
« Le siège du prêtre célébrant doit être le signe de la fonction de celui qui préside l’assemblée et dirige la prière. » (PGMR 310)
Par son ordination sacerdotale, le prêtre représente sacramentellement le Christ, il agit en sa personne et endosse la fonction de service. Le siège de présidence ne doit pas être considéré comme un simple siège où s’asseoir, ni comme un trône, mais comme le troisième lieu où se joue une action liturgique. L’ambon est le lieu de la proclamation de la parole de Dieu et de l’homélie, l’autel est le lieu du sacrifice eucharistique, le siège du prêtre met en valeur la fonction de présider l’assemblée et de diriger la prière. Il est donc destiné aux autres temps liturgiques : ouverture et conclusion de la célébration, écoute des lectures, profession de foi, prières des fidèles … un micro et un petit pupitre fonctionnel sont donc nécessaires au bon accomplissement de cette fonction.
Son emplacement est à adapter au lieu, si possible tourné vers les fidèles dans l’axe du sanctuaire sauf si la réserve eucharistique est située derrière l’autel ou la distance trop importante de la nef. Quelque soit son emplacement, le siège de présidence ne doit pas avoir l’aspect d’un trône, le siège du diacre sera placé à proximité, ceux des servants d’autels en fonction de leurs services.
II/ Organisation de la nef :
La place des fidèles doit être judicieusement organisée pour que ceux-ci puissent participer pleinement à la liturgie en favorisant l’écoute, la vue et l’intériorité. La chorale et l’orgue qui font partie de l’assemblée des fidèles bénéficieront d’un emplacement adapté à la nature de leur fonction tout en permettant à chacun de ses membres de participer pleinement au Sacrement. (PGMR 312)
Lieu d’écoute de l’assemblée des frères venus partager le repas du Seigneur, l’organisation des sièges et de la sono dans la nef doit permettre à chacun de pouvoir entendre la Parole de Dieu tout en étant convenablement assis. Les sièges, aujourd’hui principalement des bancs pour des raisons de sécurité, seront organisés afin de faciliter la procession des fidèles pour la communion.
Eglise Saint-Etienne de Castelginest
La nef est aussi un lieu d’accueil pour quiconque en éprouve le besoin en dehors de toute célébration, c’est la raison pour laquelle le plus grand soin doit être consacré à son aménagement. Pas de prospectus en désordre ou périmés sur le présentoir ni de panneaux réalisés ponctuellement et devenus obsolètes. Les chapelles latérales seront désencombrées de tout objet inutile et disgracieux, notamment la chapelle baptismale, lieu de mémoire de notre baptême et, où sera déposé le cierge pascal à la fin du temps liturgique de Pâques. La chapelle du Saint-Sacrement et celle de la Vierge seront convenablement aménagées afin de permettre l’adoration ou la dévotion à Marie, des bougies votives y seront mises à disposition. Des fleurs fraîches ou de simples branchages verts à proximité de l’autel éclairé ou dans les chapelles latérales, une musique de fond, seront autant de petits gestes accueillants et propices au recueillement de nos frères.
Bibliographie :
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AELF, L’art de célébrer la messe : présentation générale du Missel romain, 3e édition typique 2002, Mame , Paris, 2008.
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Code de Droit Canonique, 1983, Wilson et Lafleur, Montréal, 2009, Livre IV, Titre I, chapitre IV, c. 1235-1239.
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CNPL, Du Bon Usage de la Liturgie, Guides Célébrer n°4, CERF, Paris, 2001.
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CNPL, L’Art de Célébrer, Guides Célébrer n°9, CERF, Paris, 2003.
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Dom Robert LE GALL, Dictionnaire de Liturgie, C.L.D, Chambray-lès-Tours, 1987.
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Chroniques d’Art Sacré, n°67, automne 2001.