Dossier « Vie consacrée, à quoi bon ? »
François-Régis Fine, originaire de Marseille, ingénieur chimiste (ENSIC 64), master of science (NU, USA) ; 15 ans de travail dans l’industrie chimique ; religieux, prêtre ; actuellement dans la fraternité franciscaine de Toulouse.
Parmi ceux qui frappent aux portes des communautés pour y entrer, il y en a qui, comme le père François-Régis, franciscain, ont reçu une blessure en plein cœur. Le père Jacques Philippe, un membre de la communauté des Béatitudes, parle dans son ouvrage Du Temps pour Dieu d’« une épreuve providentielle à travers laquelle Dieu se saisit de nous… ».
Au plus fort de sa jeunesse, François-Régis a été immobilisé plus d’un an en raison de graves problèmes de santé. C’est à ce moment-là qu’il se plonge dans la lecture et découvre alors un nouvel univers, celui de la Vie consacrée. Puis il y a eu un regard. Un regard lumineux, de ceux qui font deviner que la vie ne se résume pas à ce que l’on voit. Celui d’un ami qui deviendra compagnon de route durant un long discernement. « Il m’a transmis pour de bon le virus ! » nous dit-il en riant. Car François-Régis ressentait bel et bien un attrait fort pour la vie religieuse mais restait à savoir où et comment ?
Après deux années de discernement et de visites dans différentes communautés, il entre chez les dominicains. Mais durant son noviciat, de nouveaux problèmes de santé apparaissent et le supérieur lui conseille de revenir à sa vie d’avant. « Le corps parle », dit-il. Il a donc fallu donc se remettre en route... Plusieurs années passent, il tire un trait sur la vie religieuse, trouve un nouveau travail et entre un jour dans une église. « Que fais-tu là ? » lui demande un prêtre franciscain. Je suis venu pour vous rencontrer, aurait-il pu répondre car il comprend peu de temps après que « c’est là, parmi les franciscains, qu’il doit être ». Pour la seconde fois de sa vie, François-Régis a été saisi : ce jour-là, il venait de trouver un guide.
À cette époque, dans sa prière, il demandait à Dieu avec insistance ce qu’il devait faire. « C’est alors qu’une parole claire, évidente, s’est imposée à moi : Aime-moi ! Puis elle a continué à agir en moi, telle une présence durant 30 heures avant de se taire, sensiblement, à tout jamais. Dieu touche mais c’est à nous ensuite de continuer à avancer, pas à pas,vers les horizons aperçus. » C’est dans la continuité de cette parole reçue qu’il répondra plus tard à l’appel du sacerdoce : « Pierre, m’aimes-tu ? ».
Chez les franciscains, chaque frère a son ministère. « On n’est pas nommé dans une communauté pour y faire quelque chose, mais pour vivre ensemble, en fraternité. Nous nous appliquons à vivre l’Évangile en toute simplicité et sobriété, partageant les attentes des hommes et des femmes d’aujourd’hui. » À chacun donc de faire fructifier ses dons, dans cette ligne de conduite qui est celle de la charité plus qu’une simple règle. « Cette vie est source d’une grande unité, d’une confiance en ce qui arrive et arrivera : celle donnée par l’assurance de faire la volonté de Dieu… Une joie profonde… C’est notre bien qu’Il veut » explique le père François-Régis.
Un long silence a suivi notre question sur les peines inhérentes à cette vie : « Les peines… » puis le père de poursuivre dans la lancée d’un grand sourire qui éclaire son visage « j’en vois pas ! ». Il évoque les aléas de la vie communautaire, mais il y a d’abord l’entraide et, comme chacun sait, « un frère aidé par un autre frère est une place forte » (Pr, 18,19). « Mes frères me font grandir » conclut-il, joyeusement.
Valérie de Bouvet