Femme de diacre, époux offert ? Epoux partagé ?

Élisabeth n’imaginait pas qu’un jour son mari serait ordonné diacre. Si le Christ a toujours été au centre de leur vie de couple avec des engagements nombreux, la plus impliquée dans l’Église, c’était plutôt elle. Discrète, efficace, active, elle affirme aujourd’hui ne pas trop aimer témoigner. Pourtant elle sait aussi que les femmes de diacres restées souvent dans l’ombre ont besoin d’être entendues et reconnues et que sa parole peut être utile aux autres.

Comment le diaconat s’est-il imposé dans votre famille ?

Nous avons trois grands garçons. Quand l’Église a appelé mon mari, les deux grands étaient déjà partis pour leurs études mais le dernier était encore jeune. Nous avons entendu l’appel mais nous avons demandé à réfléchir. J’avais déjà un mari très sollicité par la communauté. Quand il a été appelé, je n’ai guère été surprise mais je ne connaissais pas vraiment les engagements du diaconat. Nos enfants n’ont pas été informés immédiatement, car nous voulions profiter des années de discernement pour mûrir notre réponse. Mon mari était déjà engagé dans la liturgie et particulièrement à la Commission Diocésaine de Musique Liturgique. Lorsque le temps est venu d’en parler, nos enfants, qui avaient été servants d’autel, ont bien réagi. Le dernier a juste eu peur que je devienne religieuse ! La famille ne devait pas bouger géographiquement. Les années de formation ont été lourdes pour la vie de famille. Je me suis dit : "nous voilà revenus à l’école" et cela ne me plaisait pas beaucoup. Parallèlement aux week-ends d’enseignement, j’assurais la catéchèse depuis 15 ans ainsi que la préparation au baptême. Mon appel intérieur, c’est le service tout simple. Petit à petit on m’a fait confiance et je suis devenue salariée de la paroisse. Il a fallu que je fasse de la place à mon tour pour la formation. Ensuite l’ordination a été un temps d’euphorie. En discutant avec des épouses, je me suis rendue compte que gérer l’emploi du temps du mari devenait nécessaire et que l’épouse pouvait avoir un rôle dans ce domaine. En plus d’une bonne gestion du temps, chaque mois nous nous réservons un week-end sans aucun engagement. Un temps de respiration qui est vite devenu indispensable.

Que partagez-vous du ministère de votre époux ?

La place de la femme n’est pas déterminée. Chacune à sa façon va occuper sa place. Étant présente à la paroisse, c’est curieusement moi qui distribue à mon mari ses missions en fonction des besoins et assure le lien avec notre curé : demandes de baptême qui peuvent soulager par exemple certains dimanches après la messe. La mission de Christian est surtout liée à l’aspect liturgique : atelier psaume et atelier chorale. C’est assez prenant. Récemment nous avons été appelés à entrer dans l’équipe de discernement des nouveaux appelés. C’est une nouvelle mission que nous avons acceptée moyennant l’abandon de quelques responsabilités. Dans cette fonction qui se fait en couple, nous sommes là pour écouter les couples mais c’est très engageant. Je me réjouis toutefois que l’on puisse faire quelque chose ensemble.

Est-il difficile de partager son époux ?

J’ai pris conscience du rôle de mon mari le jour de son ordination lorsque je l’ai vraiment vu derrière l’autel, aux côtés du prêtre. Durant toute l’ordination j’ai été portée par la prière mais lors de la première célébration, le dimanche suivant, j’étais terriblement émue. Oui, je l’offrais aux autres et je l’acceptais. Nous échangeons beaucoup en couple. Notre vie de couple est vraiment nourrie de cette nouvelle vie et cela est très apaisant. Nos échanges avec la fraternité diaconale sont aussi importants comme l’ont été les échanges avec d’autres couples lors de la formation. Nous sommes tous hommes et femmes différents. Nos réactions et nos questions ont besoin d’être exprimées et partagées.

Quel impact le diaconat a-t-il eu sur votre vie de famille ?

La façon de vivre et de témoigner de mon mari a permis d’établir avec nos enfants des relations simples et vraies. Cela a souvent dénoué des tensions. Nous accueillons les événements qui nous touchent avec simplicité et confiance comme la demande de baptême de nos deux petits-enfants. Nos fils ont chacun leur propre cheminement spirituel. Nous privilégions les temps de discussion avec eux et leurs épouses. Nous sommes avec eux dans la confiance. En couple, le cheminement de Christian nourrit mon espérance. Quand on reçoit le baptême, on ne sait pas jusqu’où on va aller. Ce sont les rencontres avec des hommes et des prêtres qui donnent du sens à notre parcours individuel et qui nous font grandir dans la confiance. Il en va de même du diaconat. C’est une grande joie de voir mon mari vivre sa mission et toujours autant d’émotion d’être à ses côtés pour l’aider à l’assumer.

B. Rigou-Chemin