L’Annonciation, mystère d’élection et de mission

Par Jean-Michel Castaing

L’Annonciation, mystère d’élection et de mission

En nous appelant par notre nom (Is 43,1), Dieu nous révèle son amour pour nous tout en nous confiant dans le même temps une mission au bénéfice de nos frères et sœurs. Cette loi se vérifie au plus haut point dans le mystère de l’Annonciation. 

 
Il n’est pas rare d’entendre des personnes s’étonner de l’élection du peuple d’Israël dans le récit de l’histoire sainte. « Comment Dieu, qui aime tous les hommes, peut-Il faire preuve d’un tel favoritisme ? Pareille attitude est-elle digne de Celui qui nous enseigne à ne pas faire acception des personnes (Mc 12,14) et à juger en toute impartialité ? Pourquoi réserver un régime de faveur à un peuple en particulier ? »
 

Nous sommes tous uniques aux yeux de Dieu

En fait, pour bien comprendre cette disposition divine, cette économie de salut (c’est-à-dire la façon dont Dieu conduit l’histoire afin de réaliser la rédemption des hommes), il est nécessaire d’intégrer au préalable deux principes. Le premier est que l’amour s’adresse toujours à une personne unique. Et ce qui est valable pour les hommes l’est également pour Dieu. Notre Créateur n’aime pas l’humanité « en vrac », en « prix de gros  ». Non, Dieu aime chacun et chacune d’un amour singulier. Nous sommes tous différents et uniques, et l’amour dont Dieu nous aime l’est pareillement. C’est ce que signifie l’élection d’Israël dans le déroulement de l’histoire sainte. Dieu n’aurait jamais pu nous révéler la qualité de l’amour qu’il porte à chacun d’entre nous s’Il n’avait pas choisi un peuple particulier auquel il s’adresse avec les accents pathétiques d’un fiancé pour sa bien-aimée. Pour prendre la mesure de la qualité de l’amour divin, il est fondamental de se reporter à ce que dit l’Écriture au sujet de l’affection que porte Dieu à la Fille de Sion (Za 2,14 ; So 3, 16-18 ; Os 2,16). De plus, il ne s’agit pas ici seulement d’une pédagogie de révélation concernant la nature de l’amour divin mais d’une réalité. Dieu aime véritablement Israël d’un amour de prédilection. Cependant, cet amour préférentiel, Il le porte à tous ! C’est là un mystère dont Lui seul est capable ! Mais Dieu est Dieu...

 

Une élection comporte toujours une mission

Le second principe qu’il faut avoir à l’esprit lorsqu’on considère l’élection d’Israël, c’est que Dieu nous choisit toujours au bénéfice des autres. Abraham est élu parce qu’en lui seront bénies toutes les nations (Gn 22,18). Si Joseph, le fils de la vieillesse de Jacob, est choisi, c’est en raison de la fonction qui sera la sienne en Égypte. Grâce à lui, en effet, la famille de Jacob arrivera à survivre durant la famine que Joseph a anticipée en tant que Premier Ministre de Pharaon (Gn 45,5). Ainsi, lorsque Dieu nous élit, ce n’est pas seulement pour nos beaux yeux, mais aussi parce qu’Il a une mission à nous confier qui concerne beaucoup de monde !

 

Deux uniques : Jésus et Marie

Ce mode du salut par voie d’élection culmine avec Jésus et Marie. Jésus, l’Unique (il est le seul à être fils de Dieu par nature), est élu, dans son Incarnation, afin de nous représenter tous. Sur la Croix, il rachètera l’humanité parce qu’il portera tous les hommes en lui et que son amour inouï pour le Père et ses frères passera en nous tous – à condition que nous le voulions. En Jésus, se vérifie au plus au point la tension Unique-Tous. C’est ce que nous fêtons à l’Annonciation. La seconde Personne de la Trinité vient prendre chair dans le sein de la Vierge de Nazareth afin d’accomplir la plus grande mission de l’histoire : sauver l’humanité et la ramener à la maison du Père.

Ce qui est dit de Jésus est transposable à sa mère, la Vierge Marie, à un autre niveau, toutefois. La jeune fille de Nazareth est élue elle aussi au bénéfice de tous. En prononçant son oui, son « fiat  », elle s’engage dans une mission dont elle ignore à peu près tout, excepté le fait de devenir la mère de Dieu – car Dieu ne pouvait pas demander son consentement sans l’informer de l’identité de Celui qu’elle mettrait au monde, c’eût été indigne de Sa part. Ainsi, Marie est d’abord appelée par son nom : « Pleine de grâce », ce que Dieu n’a jamais dit à aucune autre créature. Dans un second temps, l’élection de la Vierge lui est signifiée par la mission qu’elle aura à accomplir, la plus grande après celle qui incombera à l’être qu’elle enfantera : donner au monde le Messie et le Fils de Dieu.

En Marie se vérifie cette loi biblique : l’amour que Dieu nous porte est proportionnel à l’importance de la mission qu’Il nous confie ! Comme Jésus, nous sommes tous des êtres-pour-les autres. Comme Marie dans le mystère de l’Annonciation, le chrétien reste réceptif à l’amour tout en se tenant prêt pour servir. À la fois contemplatif, à l’écoute et appelé à prendre des initiatives !

Jean-Michel Castaing

 

 


Actualité publiée le 20 mars 2023