La fête des Rameaux est là, et, chrétiens, nous allons nous engager dans la Semaine Sainte de l’an 2024.

Durant tout ce carême nous avons été incités à prier.

À prier beaucoup ? Il faut répondre "non" : d’une part parce que cette expression n’existe nulle part dans la Bible (chacun peut aller le constater) ; de plus elle est même à écarter car elle risquerait de nous transformer en sportifs qui cherchent à accumuler des records…

Par contre Luc dans son évangile, et Paul de Tarse dans sa lettre aux Thessaloniciens nous engagent fortement à « prier sans cesse », à « toujours prier ». Mais… comment est-ce possible ?

On sait que s’il y a quelqu’un qui a mis cet idéal parfaitement en œuvre, c’est Jésus-Christ lui-même. Il savait le poids des mots, et l’on peut aussi être sûr qu’il mettait toujours sa parole en pratique. Donc : dans son travail de charpentier ou seul dans la nature ; avec ses disciples, en famille, au milieu de la foule, à la synagogue ; en marchant sur les chemins ou quand il dormait dans la barque ; au cours des repas de fêtes et de ceux avec les pécheurs, ou encore durant ses jeûnes ; quand il parlait à tous, ou à une seule personne ; quand il était dans le Temple, quand il en chassait les vendeurs ; le matin, le soir, la nuit… dans chacun de ces instant il priait ! Il n’y a pas de doute : Jésus priait sans cesse, puisqu’il nous demande de faire ainsi !

Toute la vie de Jésus-Christ, nourrie par sa familiarité avec son Père et l’Esprit-Saint, étaient des mises en œuvre de son amour du prochain, les femmes et les hommes du Monde entier. Et tous les instants de sa vie devenaient ainsi en lui une véritable prière.
« Prier sans cesse… » c’est donc faire de notre chemin de vie une prière. Mais est-ce alors la concevoir comme l’accumulation la plus importante possible de temps de silence, de lectures et de récitations ? Ce serait choisir une impasse si ça ne débouche sur rien. Il faut élargir notre regard, trouver un chemin ouvert sur une manière chrétienne de percevoir tous les instants de notre existence et les conduire en harmonie avec le chemin qu’a pris Jésus-Christ.

On lit au chapitre 22 de l’évangile selon saint Matthieu qu’un jour un pharisien lui a demandé :
« Maître, quel est le grand commandement dans la Loi ? » Jésus lui déclara : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta pensée. C’est là le grand, le premier commandement ».

Un second est aussi important : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. De ces deux commandements dépendent toute la Loi et les Prophètes. »

Le pharisien attendait 1 commandement, Jésus lui en fournit 2, dont il dit qu’ils sont aussi importants l’un que l’autre. Le chrétien ne peut donc se contenter de vivre une Église célébrante, il lui faut vivre une Église servante, une Église qui appelle tous les chrétiens, et au-delà toutes les personnes de bonne volonté, à humaniser notre monde. Il y a 2.000 ans Jésus Christ a tracé un chemin permettant de renouveler la vie de toute l’humanité. À nous de devenir un compagnon de route, avec comme but les 2 commandements harmonieusement liés .

Le silence, la récitation, le culte… : notre prière prendra parfois ces différentes formes. Mais elle devra prendra également toutes sortes d’autres formes afin de pouvoir se couler dans les innombrables façons de vivre qui existent chez les Hommes. Un exemple : la prière d’un père et d’une mère de famille, salariés, vivant en ville avec plusieurs enfants, aura des facettes différentes de vie, donc de sa prière à côté d’un jeune de 20 ans en atelier, d’un autre à l’université, d’un couple de retraités à la campagne, ou encore d’une religieuse dans son couvent et d’un prêtre en paroisse. Car, pour chacune et chacun, c’est sa propre vie concrète qui aura à se faire prière.

Selon les moments, ce sera une prière du cœur, informelle, plus ou moins explicitée dans ses premiers instants, et devenant le plus souvent sous-jacente à l’agir de la journée. Et cet agir, nos choix de vie, seront eux-mêmes influencés par les fruits de notre vie de prière…

D’autres fois ce sera un moment de prière personnelle, de notre invention, ou bien s’appuyant sur des formules héritées du passé…

Chaque fois qu’on le pourra et le voudra il y aura aussi la prière liturgique, prière de l’Église réunie – par exemple la messe du Dimanche -, prière qui est encadrée afin de permettre l’union des chrétiens se retrouvant en communauté. 

Mais la prière ne sera jamais une formule magique. Par contre elle est un engagement de soi-même sur le chemin que nous avons choisi, avec toutes ses dimensions personnelles et sociales.

Concernant celles-ci notre pape François a d’ailleurs des phrases fortes dans sa Lettre encyclique LAUDATO SI’ (n° 231 et 232) :

« L’amour, fait de petits gestes d’attention mutuelle, est aussi civil et politique, et il se manifeste dans toutes les actions qui essaient de construire un monde meilleur. L’amour de la société et l’engagement pour le bien commun sont une forme excellente de charité qui, non seulement concerne les relations entre les individus mais aussi les « macro-relations : rapports sociaux, économiques, politiques ».

(…) Ces actions communautaires, quand elles expriment un amour qui se livre, peuvent devenir des expériences spirituelles intenses. »

De plus Jésus lui-même nous prévient :
 
« Ce n’est pas en me disant : « Seigneur, Seigneur », qu’on entrera dans le Royaume des Cieux, mais c’est en faisant la volonté de mon Père qui est dans les cieux. » (Matthieu 7:21)

Souhaitons-donc à chacune et chacun un bon chemin de vie et donc en particulier de prière pour arriver à Pâques !

Robert Divoux, Rameaux 2024