«  Ce que vous faites pour devenir des justes, évitez de l’accomplir devant les hommes pour vous faire remarquer » (Mt 6,1). L’enseignement de Jésus pour le Mercredi des Cendres est clair : soyez discrets ! Ceux du prophète Joël et de saint Paul, le même jour, ne le sont pas moins : « Sonnez du cor dans Sion » invite le premier (Jl 2,15), « nous sommes les ambassadeurs du Christ  » affirme le second (2Co 5,20). En d’autres termes : célébrez et proclamez le Nom du Seigneur ! Alors quoi ? Faudrait-il choisir en ce début de Carême entre le secret qui couvre l’intimité de la relation au Père et la publicité qui manifeste au monde la découverte du Fils ? 

Certainement pas ! Pour être disciple, le missionnaire doit sonder personnellement le mystère caché de Dieu. Pour être missionnaire, le disciple doit célébrer avec d’autres le mystère de ce Dieu qu’il proclame à la face du monde. Le disciple-missionnaire s’avance à visage dé-couvert.

Se convertir, c’est d’abord dé-couvrir le mystère du Père auquel le visage du Fils donne accès. Pour cela couvre-toi le visage des cendres de la pénitence : «  fais l’aumône !  » afin d’augmenter la charité qui t’unit réellement à lui ; «  prie ! » afin d’augmenter la foi qui te donne de le connaître vraiment ; « jeûne  » afin d’augmenter l’espérance qui te soutient substantiellement dans ton pèlerinage à sa suite.
 
Se convertir, c’est alors s’avancer dans le monde le visage à dé-couvert. Ne craignons pas de participer aux liturgies du Carême dont la sobriété prépare à la lumière de la Résurrection. Elles dé-couvrent mystérieusement le visage du Christ mort et ressuscité pour le salut des hommes. Ne craignons pas de présenter au monde un visage couvert par les cendres de l’aumône, de la prière et du jeûne. Par lui c’est le visage même du Christ qui se dé-couvre dans le monde. Par lui c’est le mystère du Père qui se révèle : « Celui qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14,9).

Dé-couvrir le mystère du Père, voilà la mission du Fils à laquelle le disciple, dans l’Esprit Saint, est appelé. C’est l’Esprit qui opère en nous et pour le monde ce dé-couvrement. Pour entrer en Carême, demandons sa grâce qui dé-couvre dans le visage du Fils celui de notre Père ; demandons sa grâce qui donne l’audace d’offrir au monde un visage pleinement dé-couvert.

Abbé Jean Arfeux,
Vicaire de l’ensemble paroissial du Christ-Roi