Jean-Louis Brêteau est diacre permanent. Universitaire, c’est d’abord dans le monde de l’enseignement qu’il a vécu sa mission. À celle-ci s’est ajoutée depuis quelque temps la charge de coordinateur de la fraternité diaconale, à la demande de l’Archevêque, Mgr Le Gall. Une charge importante qui doit fédérer la trentaine de diacres permanents du diocèse.
Comment la question du diaconat s’est-elle posée à vous ?
Jean-Louis Brêteau : Le diaconat est une question très ancienne que je me suis posé à la fin des années 70 quand Monseigneur Collini avait la charge du diocèse. Du temps a été nécessaire pour la rendre opérante et attendre un véritable appel de l’Église. Nous avons accepté avec mon épouse lorsque la réflexion ainsi qu’une retraite spécifique sont venues confirmer cet appel. J’avais 50 ans. Je savais le processus long et non exempt d’inquiétudes. J’ai été ordonné le 30 novembre 2008.
Quelles sont ces inquiétudes que vous mentionnez ?
J.-LB : Tout engagement dans l’Église pose question. Vient-il de soi ou bien est-il plus mystérieux ? Qui appelle ? Une personne, le Christ lui-même ? Nous étions un peu inquiets en tant que couple. N’allais-je pas être trop accaparé ? Mon ordination n’allait-t-elle pas nous séparer ? Ensuite c’est la nature de la mission qui pouvait être un sujet d’interrogation. Serai-je suffisamment « obéissant » ? Cette dimension fait irruption parce que le diacre, le jour de son ordination, fait à l’Évêque la promesse de demeurer dans la « communion » avec lui et ses successeurs. Dans ma vie professionnelle j’avais toujours été relativement indépendant ; saurai-je obéir ? Ces inquiétudes sont normales et sont à mettre en rapport avec les enjeux. Cela fait partie de la vie spirituelle de rencontrer et, avec l’aide de l’Esprit-Saint, de surmonter des obstacles.
Qu’est-ce que votre ordination a changé ?
J.-LB : C’est l’ordination qui donne du sens à la mission. C’est l’expérience que font toutes les personnes qui reçoivent un sacrement. Pour moi il y a eu un avant et un après. Cela correspond à un cheminement qui conduit à devenir serviteur de et dans l’Église. La grâce que l’on reçoit au moment de l’ordination doit se déployer et s’épanouir progressivement. L’ordination justifie sans doute une attitude différente. Puis, petit à petit, on investit sa mission, de malhabile on devient plus apaisé. On s’installe doucement dans le rôle du diacre. L’ordination finit toujours par porter ses fruits. On fait surtout l’expérience de la diversité dans l’Église. Le Seigneur donne la joie de l’Évangile à condition que l’on se donne pleinement, mais en toute sagesse et avec discernement.
Quelles sont les joies que vous rencontrez ?
J.-LB : Parmi les joies reçues il y a la mission, c’est-à-dire les lieux où l’Évêque nous demande de nous investir tout particulièrement. Dans mon cas, ce fut tout d’abord l’université. Mes collègues et étudiants savent qui je suis. Mon optique a toujours été de servir l’Université. Puis il y a eu l’annonce de la Parole à ceux qui en sont éloignés et le soutien aux candidats à la formation diaconale. En toute occasion j’essaie de me laisser habiter par la parole de Dieu et je m’efforce de comprendre les gens que je rencontre. C’est une grande joie pour moi de fortifier, autant que faire se peut, les gens qui sont en attente.
En quoi consiste la fraternité diaconale ?
J.-LB : La coordination diaconale est une charge importante. Contrairement au presbytérium qui rassemble les prêtres et les lie entre eux, le « diaconium » n’existe pas. Le diacre pourrait donc après l’ordination éprouver un vrai sentiment de solitude dans l’exercice de son ministère, si la fraternité diaconale ne remplissait pas ce rôle. Dans le diocèse, on le fait de deux manières différentes : sous forme de quelques journées de rencontre dans l’année et lors d’un après-midi de discussion avec l’Archevêque en novembre. Nous publions également un bulletin qui permet de rester en lien. Et puis il y a les rencontres plus informelles avec ceux qui en ont le plus besoin. Je pense aux diacres malades comme ce fut le cas avec notre ami Bernard Grandjean récemment décédé, autour duquel nous nous sommes souvent retrouvés. Cette année nous ajoutons en plus des rencontres par secteurs géographiques pour privilégier la proximité. Il est important de resserrer les relations fraternelles entre nous.
Que naît-il de ces rencontres ?
J.-LB : Des questions souvent, des impressions à partager. Parfois les relations avec les prêtres du secteur sont à améliorer. Tout ne coule pas de source et dans toutes les rencontres il faut savoir faire place à l’inattendu. Dialoguer est la meilleure façon de faire tomber les présupposés et permet d’avoir la conviction que chaque personne a une histoire sainte qu’il faut respecter. En dehors de leurs missions proprement diocésaines, les diacres sont de plus en plus présents dans les paroisses et donc plus visibles mais il reste encore des conceptions variées du diaconat dans le clergé. Néanmoins la plupart des prêtres du diocèse apprécient leur présence et leurs services.
Le diaconat ne s’est pas imposé partout de la même façon. Où cela pose-t-il encore problème ?
J.-LB : Il est bon de rappeler le rôle et la place du diacre ainsi que la spécificité du ministère diaconal. Chacun a le désir d’annoncer le royaume de Dieu et chacun le fait à sa façon et dans le lieu où il est envoyé. Penser que le diacre va se substituer au prêtre est une grave erreur. Beaucoup de paroissiens nous confondent encore par simple méconnaissance de notre place exacte dans la liturgie et ailleurs, et nous appellent assez souvent « Mon Père » ! Dans les paroisses, les diacres peuvent avoir des fonctions régulières comme l’animation d’un groupe biblique, d’un groupe de préparation au mariage ou au baptême, par exemple et ils participent de droit aux conseils pastoraux. Mais, à la différence des prêtres, ce ne sont pas des pasteurs en tant que tels. Ils sont ordonnés « pour le service » et pour inviter toute la communauté chrétienne à devenir de plus en plus « servante », comme l’a bien rappelé la démarche « Diaconia 2013-Servons la Fraternité ».
B. Rigou-Chemin
On confond souvent les diacres avec les prêtres car dans les célébrations liturgiques, ils se tiennent à leur côté ou légèrement en retrait. Ils ont reçu le sacrement de l’ordination pour certains depuis plus de 20 ans, pour d'autres plus récemment, par exemple l’année dernière pour trois d'entre eux. Ils sont donc clercs, c’est-à-dire des ministres ordonnés. La majorité d’entre eux sont mariés, pères de famille et parfois même grands-pères ; quelques-uns, cependant, sont célibataires.
Denis Arrat a été ordonné diacre permanent en mai 2014 pour le diocèse de Toulouse. Diacre chaque jour, « bébé diacre » comme il le dit en souriant, il apprend à gérer les priorités et à reconnaître là où sa présence est la plus importante.
Élisabeth n’imaginait pas qu’un jour son mari serait ordonné diacre. Si le Christ a toujours été au centre de leur vie de couple avec des engagements nombreux, la plus impliquée dans l’Église, c’était plutôt elle. Discrète, efficace, active, elle affirme aujourd'hui ne pas trop aimer témoigner. Pourtant elle sait aussi que les femmes de diacres restées souvent dans l’ombre ont besoin d’être entendues et reconnues et que sa parole peut être utile aux autres.
Alain Cérisola est délégué provincial au diaconat permanent. Cette mission confiée par les évêques de la Province le rend particulièrement attentif à la place des diacres dans l’Église et à l’avenir d’un sacrement qu’il souhaite mieux connu et plus visible.
Envoyé par son évêque auprès d’un ensemble paroissial, le diacre est comme le prêtre, un ministre ordonné doté de particularités qui lui sont propres. Jean Barba, curé de l’ensemble paroissial de Tournefeuille, donne quelques points d’éclaircissement sur la fonction du pasteur et le rôle du diacre en paroisse. Car si ils partagent le même ministère, leurs missions ne sont pas les mêmes. Il est important de voir ce qui les rassemble et les différencie.