Instrumentum Laboris : comment être une Église synodale en mission ?

Instrumentum Laboris : comment être une Église synodale en mission ?

Dans le cadre du Synode sur l’avenir de l’Église, prévu du 2 au 27 octobre 2024 : l’instrumentum laboris (IL) de la XVIe Assemblée générale ordinaire du synode des évêques a été publié le 9 juillet 2024. Le thème choisi est : «  Comment être une Église synodale en mission ?  »

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Un extrait du texte : 


Introduction

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Au cœur du Synode 2021-2024. Pour une Église synodale. Communion, participation, mission, se trouve un appel à la joie et au renouveau pour le Peuple de Dieu qui, à la suite du Seigneur est invité à l’engagement au service de sa mission. Cet appel à être des disciples missionnaires est fondé sur notre identité baptismale commune, appel qui s’enracine dans la diversité des contextes dans lesquels l’Église[1] est présente. Et il trouve son unité dans l’unicité du Père, du Seigneur et de l’Esprit. C’est un appel qui concerne tous les baptisés, sans exception : « Tout le Peuple de Dieu est le sujet de l’annonce de l’Évangile. En lui, chaque baptisé est appelé à être protagoniste de la mission, parce que tous, nous sommes des disciples missionnaires » (CTI, n° 53). Ce renouveau prend forme dans une Église qui, rassemblée par l’Esprit grâce à la Parole et à l’Eucharistie (cf. CD 11), proclame le salut dont elle fait continuellement l’expérience à un monde en attente de sens et assoiffé de communion et de solidarité. C’est pour ce monde que le Seigneur prépare un banquet sur sa montagne.

Pratiquer la synodalité – qui est une expression de la nature même de l’Église – est une manière pour nous aujourd’hui de renouveler notre engagement dans cette mission. Grandir en tant que disciples missionnaires signifie, avant tout, répondre à l’appel de Jésus à s’engager à sa suite, répondre à ce don que nous avons reçu lorsque nous avons été baptisés au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ; cela signifie ensuite apprendre à nous accompagner les uns les autres en tant que membres d’un peuple pèlerin traversant l’histoire en chemin vers une destination commune : la cité céleste. En avançant sur ce chemin, en rompant le pain de la Parole et de l’Eucharistie, nous devenons ce que nous recevons. Nous comprenons ainsi que notre identité de peuple sauvé et sanctifié a une dimension communautaire incontournable qui englobe toutes les générations de croyants qui nous ont précédés et celles qui nous suivront : le salut à recevoir et dont nous témoignons est relationnel, car personne ne se sauve tout seul. Ou plutôt, en utilisant les mots de la contribution envoyée par une conférence épiscopale d’Asie, nous grandissons lentement dans cette prise de conscience : « La synodalité n’est pas simplement un but, mais également un cheminement à vivre par tous les croyants, un parcours à accomplir ensemble, main dans la main. C’est pourquoi il faut du temps pour en comprendre toute la signification »[2]. Saint Augustin compare la vie chrétienne à un pèlerinage solidaire, une marche ensemble « vers Dieu, non pas avec les pieds, mais avec l’amitié » (Discours 306 B, 1), en partageant une vie de prière, de proclamation et d’amour du prochain.

Le Concile Vatican II enseigne qu’ « à cette union avec le Christ, lumière du monde, de qui nous procédons, par qui nous vivons, vers qui nous tendons, tous les hommes sont appelés » (LG 3). Au cœur du chemin synodal se trouve le désir, ancien et toujours nouveau, de communiquer à tous la promesse et l’invitation du Seigneur, conservées dans la tradition vivante de l’Église, de reconnaître la présence du Seigneur ressuscité parmi nous et d’accueillir les fruits nombreux fécondés par son Esprit. Cette vision de l’Église, comme peuple de pèlerins qui, dans toutes les parties du monde, recherche la conversion synodale au service de la mission, est pour nous un guide alors que nous avançons avec joie et espérance sur le chemin du Synode. Cette vision contraste fortement avec la réalité d’un monde en crise, marqués par des blessures et des inégalités scandaleuses qui retentissent douloureusement dans le cœur de tous les disciples du Christ. Cela nous convoque à prier pour toutes les victimes de violence et d’injustice et à renouveler notre engagement aux côtés des femmes et des hommes qui, partout dans le monde, travaillent comme artisans de justice et de paix.

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Un outil de travail pour la deuxième session

Au cours d’un parcours tissé de silence, de prière, d’écoute de la Parole de Dieu, de dialogue fraternel et de rencontres joyeuses, parfois non sans difficultés, nous avons mûri, en tant que Peuple de Dieu, une conscience plus profonde de notre relation de frères et sœurs en Christ, avec la responsabilité commune d’être une communauté de sauvés qui proclame la beauté du Royaume de Dieu au monde entier, par la parole et par la vie. Cette identité n’est pas de l’ordre d’une idée abstraite, mais d’une expérience vécue, habitée par des noms et des visages. Dans ce temps de préparation de la deuxième session et durant les travaux de cette assemblée, nous continuons à nous poser cette question : comment l’identité de Peuple de Dieu synodal en mission peut-elle se concrétiser dans les relations, les cheminements et les lieux où se déroule la vie de l’Église ?

Le présent Instrumentum laboris doit servir cette perspective. Et l’on peut appliquer également à son compte ce qui a été dit pour l’Instrumentum laboris de la première session : « ce n’est pas un document du Magistère de l’Église, ni le rapport d’une enquête sociologique ; il ne vise ni à formuler des indications opérationnelles, de buts et d’objectifs, ni à offrir l’élaboration complète d’une vision théologique » (n. 8). Pour comprendre ce document, il est essentiel de le situer au sein de l’ensemble du processus synodal. Il est en effet le de cette circularité du dialogue entre les Églises qui caractérise ce processus animé et accompagné par le travail du Secrétariat général du Synode. La première session de l’Assemblée (2023) avait recueilli les fruits de la double consultation locale et continentale à la recherche des « signes caractéristiques d’une Église synodale et sur les dynamiques de communion, de mission et de participation qui l’habitent » (RdS, Introduction). Par la prière, le dialogue et le discernement, elle a recueilli et exprimé dans le RdS les convergences, les questions à traiter et les propositions qui ont émergé du travail commun. Il en ressort ce que l’on peut qualifier de première réponse à la question « Église synodale, que vous enseigne-t-elle de vous-mêmes ? ». La deuxième session est appelée à aller plus loin, en se concentrant sur sa question-guide : « Comment être une Église synodale en mission ? » Sur d’autres questions apparues en cours de route, le travail se poursuit sous d’autres formes, au niveau des Églises locales comme dans les dix groupes d’étude. Les deux Sessions ne peuvent être séparées, ni opposées : elles sont en continuité, et surtout elles font partie d’un processus plus large qui, sur la base de ce qui est indiqué dans la Constitution Apostolique Episcopalis communio, ne s’achèvera pas à la fin du mois d’octobre 2024.

Plus concrètement, cet Instrumentum laboris s’ouvre sur une section consacrée aux Fondements de la compréhension de la synodalité, qui repropose la prise de conscience mûrie au fil du temps et approuvée par la Première Session. Cette section est suivie de trois parties étroitement liées, qui éclairent la vie synodale missionnaire de l’Église à partir de différentes perspectives : (I) la perspective des Relations – avec le Seigneur, entre frères et sœurs et entre Églises – qui soutiennent la vitalité de l’Église bien plus radicalement que ses structures ; (II) la perspective des Cheminements qui soutiennent et nourrissent concrètement le dynamisme des relations ; (III) la perspective des Lieux qui, contre la tentation d’un universalisme abstrait, parle du caractère concret des contextes dans lesquels les relations s’incarnent, avec leur variété, leur pluralité et leur interconnexion, et avec leur enracinement dans le fondement jaillissant de la profession de foi. Chacune de ces sections fera l’objet de prière, d’échange et de discernement dans l’un des modules qui jalonneront les travaux de la deuxième session, où chacun sera invité à « offrir sa contribution comme un don pour les autres et non comme une certitude absolue » (RdS, Introduction), dans un processus que les membres de l’Assemblée sont appelés à rédiger ensemble. Sur cette base, un document final sera rédigé, concernant l’ensemble du processus jusqu’à présent, qui offrira au Saint-Père des lignes directrices sur les étapes à suivre et les moyens concrets d’y parvenir.

On peut s’attendre à un approfondissement de la compréhension commune de la synodalité, à une meilleure focalisation sur les pratiques d’une Église synodale, et même à la proposition de quelques changements dans le droit canonique (d’autres, plus significatifs, pourront être proposés après avoir mieux assimilé et vivifié la proposition de base), mais certainement pas à la réponse à toutes les questions. C’est aussi parce que d’autres émergeront sur le chemin de conversion et de réforme que la deuxième session invitera toute l’Église à entreprendre. Parmi les acquis du processus, nous pouvons certainement compter le fait que nous avons expérimenté et appris une méthode pour aborder les questions ensemble, dans le dialogue et le discernement. Nous sommes encore en train d’apprendre à être une Église synodale missionnaire, mais c’est une tâche que nous avons expérimentée et que nous pouvons entreprendre avec joie.

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Actualité publiée le 9 août 2024