Méditation de l'Évangile du premier dimanche de Carême

Méditation de l’Évangile du premier dimanche de Carême

Mais que diable Jésus allait-il faire au milieu des bêtes sauvages ?

En allant séjourner au désert en compagnie des bêtes sauvages, Jésus inaugurait un nouvel âge du monde où la paix s’établirait entre les différents règnes de la Création.

Le récit du séjour de Jésus au désert de l’Évangile de Marc ne signale aucune tentation précise de la part du démon, contrairement aux Évangiles de Matthieu et de Luc. En revanche, il est fait mention dans le texte de « bêtes sauvages » : « Jésus venait d’être baptisé. Aussitôt l’Esprit le pousse au désert et, dans le désert, il resta quarante jours, tenté par Satan. Il vivait parmi les bêtes sauvages, et les anges le servaient » (Mc 1, 12-13). Que viennent faire ces bêtes dans le récit ? Est-ce pour rappeler l’inhospitalité du désert ? Sachant que rien n’est anodin dans l’Écriture sainte, essayons de démêler ce mystère.

Jésus, l’Homme de l’Alliance et de la paix messianique.

Généralement, dans la Bible, les hommes se gardent bien de côtoyer les bêtes sauvages. Elles représentent toujours un danger pour eux. Or, Jésus a vécu parmi elles durant quarante jours ! Quelle est la signification d’une telle coexistence ? Elle s’explique par le fait que Jésus est venu parmi nous afin de rétablir l’Alliance du Ciel et de la terre. Il est l’Époux divin et le messager de la paix messianique qu’avait prophétisée Isaïe : « Le loup habitera avec l’agneau, Et la panthère se couchera avec le chevreau ; Le veau, le lionceau, et le bétail qu’on engraisse, seront ensemble, Et un petit enfant les conduira » (Is 11,6). Cette paix irradie à tel point de Jésus que les bêtes sauvages en sont les premières bénéficiaires ! Alors que jusqu’ici elles ne pouvaient pas cohabiter avec les hommes, les voici soudain dans ce désert en compagnie de l’Homme de paix sans qu’aucun incident ne survienne ! À elles seules, ces bêtes représentent un message prophétique ! Mais si elles sont les premières bénéficiaires de la paix messianique, c’est parce qu’elles sont moins rétives que les hommes à celle-ci ! D’une part, le coeur humain est souvent plus dur que l’instinct des bêtes sauvages ; d’autre part, elles ne sont pour rien dans la cruauté de leur condition.

Victimes collatérales du péché originel.

En effet, s’il leur arrive d’être cruelles, la faute ne leur incombe pas tout à fait. Elles ont été victimes du péché primordial qui a infesté la Création tout entière. C’est ce que dit Paul : « Aussi la création attend-elle avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise à la vanité, non de son gré, mais à cause de celui qui l’y a soumise, avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or, nous savons que, jusqu’à ce jour, la création tout entière soupire et souffre les douleurs de l’enfantement.  » (Rm 8, 19-22). Les bêtes sauvages ont été les victimes collatérales de la vanité à laquelle a été soumise la Création par la faute de l’homme. Elles aussi soupirent et souffrent les douleurs d’un enfantement en attendant d’être délivrées d’un état de violence qui leur a été imposé par les hommes qui avaient charge de la Création et qui ont failli à cette tâche.

Révélation imminente des fils de Dieu.

En séjournant avec les bêtes sauvages au désert, Jésus marque que le temps de la révélation des fils de Dieu à laquelle fait référence saint Paul, cette révélation, est imminente. Quand ils seront devenus fils de Dieu grâce à Jésus, les hommes seront en mesure de réintroduire de la douceur dans le monde. Et le monde animal en profitera ! Non pas que Jésus soit le premier « végan » de l’histoire. Mais il est celui qui inaugure un nouvel âge du monde où la paix s’établira entre les différents règnes de la Création, comme il en était au commencement, dans le jardin d’Eden. Telle est la raison de la présence de ces mystérieuses bêtes sauvages dans le récit du premier dimanche de carême.

 

Jean-Michel Castaing

 


Actualité publiée le 15 février 2024