Vous avez dit « synode » ?

Synode de la famille, du 4 au 25 octobre 2015

Vous avez dit « synode » ?

Le 17 octobre, en commémorant le 50ème anniversaire de l’institution du synode des évêques, le pape François a tenu à rafraîchir nos mémoires ou à les éclairer. Synode (littéralement chemin à prendre ensemble « facile en paroles, mais pas si facile à mettre en pratique1 ») réunit 200 évêques du monde entier auxquels s’ajoutent quelques autres désignés par le pape. En même temps qu’elle est représentative de la diversité et de l’unité des évêques du monde entier, cette assemblée témoigne de la grande diversité de situations et de cultures humaines et chrétiennes. Cette assemblée s’inscrit ainsi, dans le sillage du concile œcuménique, au service de l’Église et de sa mission universelle.

C’est en effet le concile qui a demandé la mise en place de cette instance internationale. Il voulait par là que son esprit et son œuvre de clarification et d’aggiornamento continuent d’être présents, développés et concrétisés dans la diversité des problématiques sans cesse renouvelées du monde. Nécessité dont l’impact fut sensible ce mois-ci avec l’adoption d’une méthode de travail originale basée sur le fonctionnement de groupes linguistiques. Nouveauté répondant à des exigences d’amélioration et de perfectionnement déjà encouragées et soutenues par Paul VI, Jean-Paul II, Benoît XVI et maintenant François.

Reprenant un point de doctrine traditionnelle nettement souligné par le concile, le Pape nous rappelle que la vérité de la foi est avant tout vécue par et dans le Corps de l’Église tout entière. Si bien que, propos apparemment étonnant, « la collectivité des fidèles ayant l’onction qui vient du Saint (cf. 1Jn.2,20-27), ne peut se tromper dans la foi » (Lumen Gentium 10). Cette « infaillibilité in credendo », si surprenante qu’elle paraisse, est à référer à la condition même de l’Église Corps du Christ. En effet, malgré ses imperfections et ses fautes, toujours à réformer (semper reformanda), « à la fois sainte et toujours appelée à se purifier » (Lumen Gentium 8), l’Église, épouse du Christ ne fait qu’un avec Celui qui s’est défini « Voie, vérité et vie » (Jn.14,6). S’impose alors, la perception attentive d’un « flair » chrétien : « une Église synodale est une Église de l’écoute… une écoute réciproque dans laquelle chacun a quelque chose à apprendre… et tous à l’écoute de l’Esprit Saint ». Déjà dans une veillée de prière pour préparer le synode, François déclarait : « Nous demandons tout d’abord à l’Esprit Saint pour les pères synodaux, le don de l’écoute : écoute de Dieu jusqu’à entendre avec lui le cri du peuple, écoute du peuple jusqu’à y respirer la volonté à laquelle Dieu nous appelle ». Il s’agit donc ici moins d’une posture psycho-relationnelle pour une bonne entente et de bonnes communications que d’une attitude de foi. Il sera bon d’en tenir compte au moment de la réception des conclusions du synode, prises en communion avec le pape.

Le synode se trouve aussi soumis à l’exemple du Maître au lavement des pieds car dans l’Église, selon le cœur du Christ, le pouvoir, essentiellement service, est de ce fait appelé à se positionner et à fonctionner « comme dans une pyramide renversée [où] le sommet se trouve sous la base…[et] les « ministres », selon la signification originelle du mot… sont les plus petits entre tous ». Il est clair que l’institution synodale elle-même, voulue par le Concile et avec elle tous les « organismes de communion de l’Église », a du chemin à faire : « nous sommes à mi-chemin, à une partie du chemin » reconnaît François en appelant de ses vœux une « décentralisation salutaire » apte à favoriser la progression d’une « Église toute entière synodale ».

Le pape termine son discours sur une note œcuménique. « Synode » est en effet un terme clé chez nos frères séparés d’Orient. Le rappel et les précisions qui précèdent sont alors susceptibles de favoriser l’ouverture de voies conduisant à des espaces de communion. Mais « une forme d’exercice de la primauté » est alors à trouver, « sans renoncement aucun à l’essentiel de sa mission ».

Enfin, comme la signature d’un message d’amitié adressé au monde entier, François présente l’Église synodale tel « un étendard levé parmi les nations » pour que se réalise « le rêve de la redécouverte de la dignité inviolable des peuples… pour un monde plus beau et plus digne de l’homme ».

Vraiment du chemin reste à faire ! Le synode sur la famille est à voir et recevoir comme une rude et belle étape sur ce chemin.

Michel Dagras

(1) Discours du Pape François du 17 octobre 2015 pour le 50ème anniversaire de l’institution du Synode des Évêques