Les archanges

L’origine du mot archange vient du grec arkhé (commandement) et aggelos (messager) ; ces deux mots combinés ensemble désignent le chef parmi les anges. L’Ancien Testament en mentionne sept ; le compagnon de voyage de Tobie se présente ainsi : « Je suis l’ange Raphaël, un des sept qui nous tenons en présence du Seigneur », (Tb 12, 15). Seuls trois d’entre eux ont révélé leur nom et sont officiellement reconnus par l’Église depuis le Concile d’Aix la Chapelle en 789. Cette décision qui était destinée en son temps à cadrer une piété populaire grandissante et fantaisiste, y donna en fait un coup d’arrêt pour plusieurs siècles. Celle-ci reprit progressivement à partir du XVIe pour parvenir jusqu’à nous. Le Directoire de la piété populaire et de la liturgie nous invite à ne pas « donner aux anges des noms particuliers que la sainte Ecriture ignore, hormis ceux de Michel, Gabriel et Raphaël  ». (Directoire sur la piété populaire et la liturgie. Principes et Orientations. Cité du Vatican, mai 2002, N°217)


La particularité du nom des archanges est leur terminaison « El » qui est le nom même de Dieu. Le préfixe caractérise leur fonction. Ainsi, l’étymologie de Michel est une question « Qui est comme Dieu ? » Le préfixe « rapha » de Raphaël signifiant guérir, son nom veut dire « Dieu guérit ». La racine du nom Gabriel, se traduit en hébreu « force », « Dieu est ma force ».

 

L’archange Saint Michel :

L’archange saint Michel biblique est plutôt considéré comme un chef d’armée, ce qui lui vaut le titre d’Archistratège. Dans le livre de Daniel il combat l’ennemi perse et, en écho, il livre au ciel à la tête de son armée, un combat sans merci contre le dragon (Ap12). Dès les temps apostoliques, il est l’archange qui conduit les âmes vers Dieu après la mort et est très tôt cité dans l’offertoire de la messe pour les défunts. Son culte se répand rapidement de l’Orient vers l’Occident avant le VIe siècle.

 

1/ Saint Michel l’Archistratège combattant la Bête est la représentation la plus courante de l’archange au Ve siècle. Non pas sous l’apparence d’un guerrier mais comme protecteur contre le mal. Il est représenté jeune et vêtu d’une tenue vestimentaire orientale antique. Triomphant, il se tient droit, un pied posé sur la bête et portant à la main une lance terminée d’une croix.
Quelques mosaïques de la Rome antique le représentent sous les traits d’un garde du palais muni d’un étendard, cette image sera reprise par la suite dans l’iconographie slave.


En Occident, la représentation guerrière de l’archange revient progressivement au goût du jour notamment au XVIe siècle où le peintre Raphaël le représente vêtu d’une cuirasse à la romaine. Son pied droit est posé sur la poitrine du démon qui gît à terre, tandis que lançant la jambe gauche en arrière dans un mouvement de balancier, il transperce le monstre de la pointe de sa lance. Cette posture deviendra un cas d’école ayant pour seule variante l’arme qui peut être un poignard. (Sur cette photo détail d’un vitrail de l’église Saint-Aubin)

 

 

2/ Saint Michel psychopompe, ou passeur d’âmes, lutte contre le démon pour se saisir de l’âme du défunt qui est représentée sous la forme d’un nouveau-né ou d’un enfant vêtu de blanc.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il est qualifié d’ange psychostase, lorsqu’il pèse les âmes au jugement dernier, dès le XIIe siècle. L’âme du défunt est tantôt lourde, tantôt légère, souvent un diablotin s’assoit ou s’accroche à l’un des plateaux de la balance pour la faire pencher vers l’Enfer. Michel y est représenté vêtu comme un prêtre avec une aube ample et une étole croisée et passée dans le cordon qui la ceint.

Sur cette fresque du Jugement dernier du XVe siècle dans l’église de Cazeaux-de-Larboust, l’archange, en blanc, tient un trébuchet sur les plateaux duquel se tiennent deux âme défuntes. Sur le côté gauche et vers le ciel où siège le Christ, des anges sont prêts à les recevoir, déjà l’un d’entre eux s’empare de l’âme la plus légère. Sur le côté droit, des monstres sont à l’œuvre pour collecter les âmes trop lourdes et les enfourner dans la gueule du Léviathan.


L’une et l’autre de ces fonctions, psychopompe ou psychostase trouvent leur origine dans l’antiquité païenne orientale et finissent parfois par se confondre dans l’iconographie occidentale à partir du XVIe siècle.

 


3/ Saint Michel a joué un grand rôle protecteur auprès des rois de France de la fin du Moyen-Âge. Il est le guide spirituel de Jeanne d’Arc à qui il confie la charge de rendre sa grandeur au royaume de France. Parfois nous pouvons le rencontrer conversant aux côtés de sainte Catherine et sainte Marguerite, avec la bergère et ses moutons. (Détail d’un vitrail de l’église de l’Immaculée-Conception, Faubourg Bonnefoy)

 

 

 

 

 

L’archange Gabriel :


L’archange Gabriel est cité dans le livre de Daniel (Dn 8, 16 et 9, 21), il apparaît pour expliquer une vision que vient d’avoir le prophète. Dans l’évangile de saint Luc, il est le messager d’une double Annonciation, celle à Zacharie (Lc 1, 11-25) dans un premier temps, et celle à Marie (Lc 1, 26-38), six mois plus tard, toutes deux sont étroitement liées.


Le thème de l’Annonciation à Marie a souvent été représenté dans l’art sacré et ce dès le IIe siècle dans les catacombes. Il s’agit là d’un évènement majeur de l’histoire du Salut, notamment depuis le Concile d’Ephèse en 431 où Marie a été proclamée « Theotokos » c’est-à-dire mère de Dieu. Fresque des Catacombes de Priscille, Rome.

 

 

 

 

Détail d’un vitrail de l’église de la Dalbade à Toulouse.

Le modèle représentatif de l’Annonciation a peu ou pas évolué depuis l’origine. L’ange Gabriel est représenté debout face à Marie dans un dialogue muet des mains et des yeux. S’il amorce un geste de salut ou de bénédiction en direction de la Vierge, cela signifie qu’il lui délivre un message, s’il lève la main vers le du ciel, c’est pour en indiquer l’origine. Si la main de Marie est dirigée vers l’archange, c’est par réserve ou détachement, alors que repliée sur sa poitrine c’est pour exprimer son accord. Elle peut aussi esquisser un geste de surprise. Au Moyen-âge, tel le héros d’un roman courtois, Gabriel ploie le genou devant Marie.


Quel que soit sa position, debout, assise ou agenouillée sur un prie-Dieu, l’attitude de Marie reste humble. Elle peut être représentée en méditation un livre à la main ou filant la pourpre destinée au voile du temple.

La représentation vestimentaire des personnages de la composition évolue aussi en fonction des époques et des régions. L’archange est soit habillé de blanc soit d’étoffes colorées et peut porter un sceptre ou tout simplement une fleur de lys blanc sans étamines pour saluer la pureté et la virginité de Marie.


De même, le cadre de cette rencontre évolue d’une mise en scène très simple à un cadre très élaboré voire fastueux, d’une chambre flamande. L’art byzantin représente Marie sur un trône royal.


N’oublions pas l’Esprit Saint souvent représenté sous la forme d’un rayon qui frappe Marie ou d’une colombe qui descend vers elle.

 

Marie au puits, enluminure d’un manuscrit byzantin, XIIe siècle, BNF. Selon le récit du Protévangile de Jacques, (vs XI, 1-2), l’archange se présente deux fois à Marie. La première fois elle entend une voix alors qu’elle puise de l’eau au puits. Apeurée, elle rentre chez elle filer la laine destinée au voile du temple ; c’est là que l’ange lui délivre son message.

 

 

 

 

 

 

 

 

Sur cette icône du XIIe siècle (Annonciation d’Ustjug, Galerie Trétiakov, Moscou), Marie filant la laine du temple, et l’archange se dressent face à face. Gabriel bénit Marie qui ne le regarde pas ; elle a déjà prononcé son "oui", "Je suis la servante du Seigneur, qu’il m’advienne selon ta parole !" Lc 1, 38. Le temps de Dieu n’est pas celui des hommes, l’Esprit Saint est en elle, la conception est déjà réalisée. L’iconographe a choisi de marquer ce moment en laissant transparaître l’image de l’Emmanuel dans le manteau de la Théotokos.

 

 

 

 

 

 

Saint-Raphaël :

 

Raphaël n’apparaît que dans le livre de Tobie. Se présentant comme « l’un des sept anges qui se tiennent toujours prêts à pénétrer auprès de la Gloire du Seigneur » (To 12, 15), il est le compagnon de voyage du jeune Tobie. Sur les conseils de l’ange, le garçon prélève le fiel d’un poisson qui lui servira de remède pour guérir son père aveugle. Raphaël est présenté dans ce livre comme étant un ange bienveillant auprès de ceux qui lui font confiance. L’iconographie le représente compagnon de voyage de l’enfant, ils sont suivi d’un chien (To 6, 2), l’ange porte une boîte contenant le fiel du poisson. Sur ce tableau du Perugin nous les voyons cheminant côte à côte en toute confiance.