Pourquoi prier les anges ?

Par Jean-Michel Castaing

Pourquoi prier les anges ?

Une réalité qu’il importe de rappeler

En ce mois de novembre consacré à l’au-delà, il n’est pas inutile de se pencher sur la réalité du monde angélique. Car ce monde existe : il vaut la peine de le rappeler, même aux croyants. Beaucoup d’entre eux ne reconnaissent plus sa réalité. Les anges, selon une certaine théologie, seraient la traduction, en langage mythique, de sentiments ou d’affections tout humains. D’après l’idéologie postchrétienne, cette croyance ne serait plus digne de notre monde sécularisé et technicien, qui ne croit que ce qu’il voit.

Effectivement, les anges ne se voient pas : ils sont de purs esprits, donc des êtres immatériels. Cependant cela ne signifie pas qu’ils n’existent pas. Ils font partie du monde invisible que Dieu a créé, ainsi que nous le récitons dans le Credo : « Je crois en Dieu (….), Créateur du monde visible et invisible.  » Les évangiles sont plein de leur présence. Les anges ont servi le Christ durant sa vie terrestre, et continuent de le faire dans son sacerdoce de gloire qui est le sien au Ciel, à la droite du Père.

 Des compagnons de route

Les anges sont les messagers de Dieu, ainsi que le signe de Sa présence active auprès de nous, de Sa providence. Brûlants de charité, ils trouvent leur bonheur à Le servir. Comment n’en trouveraient-ils pas un également à nous accompagner durant notre pèlerinage en direction de la Jérusalem céleste ?

Pourquoi les prier ? Parce que leurs secours nous sont d’autant plus précieux que les forces contre lesquelles nous engageons le combat spirituel sont, elles aussi, immatérielles et invisibles. Ces forces sont d’ailleurs de même nature que les anges : elles sont leurs semblables quant à leur nature. C’est-à-dire que ces forces hostiles à l’homme sont des anges ! Des anges qui ont fait irrémédiablement le mauvais choix. Le choix de se complaire dans leur excellence naturelle (car l’ange est, à l’origine, supérieur à l’homme), et de refuser la vie surnaturelle de la charité.

 Se garder de l’orgueil

Telle est une des missions des anges en notre faveur : nous mettre en garde contre l’orgueil, et ce qui y conduit. Ces créatures célestes savent ce qui a fait chuter leurs pareils à l’origine : le refus de l’ordre surnaturel de la charité, afin de conserver leur prééminence dans l’ordre naturel. À l’origine, les anges ont eu en effet le choix entre la connaissance naturelle de Dieu, et sa connaissance surnaturelle qui concernait son Amour. Les démons ont préféré rester premiers dans leur ordre plutôt que de partager la vie surnaturelle de Dieu avec des créatures créés initialement inférieures à eux, à savoir les hommes.

Voilà la raison pour laquelle les bons anges nous mettent en garde contre l’orgueil. Leur service est d’autant plus appréciable en la matière qu’ils ont opté définitivement, et en toute connaissance de cause, pour l’amour. Et cette option, initiale et définitive, a été d’une qualité dont on peut difficilement soupçonner l’intensité.

Surtout, par ce choix primordial et définitif, ils ont accepté que nous les rejoignions, nous les hommes, dans l’excellence de l’ordre surnaturel de la charité. Comme Dieu, les bons anges sont nos amis ; ils ont choisi de l’être en toute lucidité. Ce qui rend leur service d’autant plus précieux et méritoire, alors que nous étions plus petits qu’eux. En les priant, nous mesurons que la règle du Royaume consiste à se mettre au service de plus faible que soi. Règle qui ne sera jamais hors saison, surtout en ce bas monde !

 De bons connaisseurs des forces adverses

Mais il y a plus : ils connaissent la stratégie de leurs doubles néfastes et mauvais qui désirent nous entraîner dans leur perdition. Les mauvais anges font plus que nous mépriser. Il nous haïssent en proportion de la destinée glorieuse que Dieu nous a réservée de toute éternité. Pour eux, à la souffrance de devoir partager l’être avec des créatures charnelles comme nous, s’ajoute le comble de ce qui froisse leur orgueil : constater que Dieu a choisi d’honorer cette créature, à la fois matérielle et spirituelle, l’homme, autant, sinon plus, qu’eux, créatures spirituelles, en s’incarnant ! Pour eux, l’Incarnation est le coup de…grâce ! C’en est trop pour leur superbe !

Cette condescendance de la part du Très-Haut, est la goute d’eau qui fait déborder le vase, celle que leur orgueil ne peut supporter ! Dieu consentir à se faire petit bébé vagissant ! Finir comme un Supplicié, tout sanguinolent ! Un vulgaire humain, faible et dépendant ! Devant tant de philanthropie et d’humilité, l’importance des mauvais anges se cabre !

Face au choix de ces derniers de ne pas servir Dieu, les bons anges sont consternés. Eux ont consenti à devenir nos amis dans le but de nous faire accéder avec eux à cet ordre surnaturel qu’est la charité. On comprend de la sorte qu’il n’est pas facultatif de les prier, de demander leurs secours. Ils savent contre qui nous luttons, et connaissent les enjeux d’un tel combat.

 Prendre la mesure du combat spirituel

En priant les anges, nous prenons la mesure du combat que nous engageons en tant que chrétiens : une lutte en faveur de l’amour contre l’égoïsme et l’orgueil. Les mauvais anges, en ne désirant pas partager l’excellence divine avec leurs inférieurs dans l’ordre naturel, ont opté pour le quant-à-soi, le repli sur soi, la haine, la jalousie, l’envie, et finalement pour l’auto-destruction. Que les bons anges nous conduisent loin de ces chemins de haine et de mort !

Les prier, c’est leur demander de nous donner l’intelligence des enjeux spirituels de la foi, de l’espérance et de la charité. Mais c’est aussi rester conscients que nous avons des frères angéliques au ciel, qui ne demandent qu’à nous aider. Enfin, n’oublions pas de nous joindre à eux dans la louange de la gloire de Dieu !

 Les secours des anges d’après l’Ecriture

Afin de mieux prier nos frères angéliques, un détour par la Bible n’est pas superflu. Le croyant saisira mieux de la sorte quels services il est vital de leur demander.

D’après l’Écriture, on dénombre quatre sortes d’action des anges en notre faveur. Les anges sont prophètes, porteurs de la Parole de Dieu. « Je suis un serviteur de Dieu, comme toi et les prophètes » dit l’ange, envoyé par Jésus, à Jean dans l’Apocalypse (Ap, 22,9), après lui avoir montré « ce qui doit arriver bientôt » (1,1).

L’ange peut être aussi guérisseur, comme c’est la cas pour Raphaël dans le livre de Tobie.

L’ange intercède également en notre faveur. Dans l’Apocalypse, les esprits célestes présentent à Dieu les prières des saints : « Puis un autre ange vint et se plaça près de l’autel avec un encensoir d’or, et il lui fut donné beaucoup de parfums pour les offrir avec les prières de tous les saints sur l’autel d’or qui est devant le trône. » (Ap 8,3).

Enfin les anges peuvent être docteurs, en expliquant la volonté de Dieu. Une tradition en fait des médiateurs dans le don de la Loi au Sinaï : à ce sujet, l’épître aux Hébreux parle de « parole promulguée par le ministère des anges  » (He 2,2). Les anges peuvent aussi consoler, comme c’est le cas pour le Christ au jardin de Gethsémani.

Ils sont également gardiens du mystère de Dieu. Avant que le Ressuscité n’apparaisse aux saintes femmes au tombeau, les anges les interpellent, comme pour leur signaler qu’un grand mystère est en passe de se révéler avec la levée d’entre les morts de Jésus, un événement de l’ordre du divin, au-delà du simple miracle. Ce sera également le cas lors de l’Ascension. La montée de Jésus à la droite du Père est en effet d’un autre ordre que la « prise  » d’Elie par Dieu au ciel. Ici, il s’agit de la consommation du pouvoir sacerdotal et royal du Christ qui est manifesté, ainsi que sa divinité. C’est la raison pour laquelle deux anges apparaissent aux disciples à cette occasion (Ac 1,10).

 Prier les anges ne doit pas nous détourner de Jésus

Toutes ces actions exercées par les anges, Jésus les accomplit également. Sinon, il ne serait pas le souverain des esprits célestes. Jésus est prophète, il enseigne, console, intercède, guérit.

Surtout, les anges sont au service de son règne et de celui de son Père. Leur exemple nous montre que servir les plus petits, c’est régner. Dieu établissant le plus grand au service du plus petit : admirable disposition divine qui manifeste qu’Il est Amour ! Profitable leçon qui transcende les époques, et qui ne risque pas de se périmer !

Que ce mois de novembre nous rende plus attentifs aux esprits célestes, ainsi qu’à la nature du service qu’ils se font un plaisir de nous rendre, afin que nous les honorions comme ils le méritent !

Jean-Michel Castaing

 

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