S4 : Lettre apostolique "Patris corde" du Saint-Père François

En marche vers Pâques avec saint Joseph et Laudate Si’ : semaine 4

S4 : Lettre apostolique "Patris corde" du Saint-Père François

à l’occasion du 150ème anniversaire de la déclaration
de saint Joseph comme patron de l’Église universelle

- SEMAINE 4 -

 

5. Père au courage créatif

Si la première étape de toute vraie guérison intérieure consiste à accueillir sa propre histoire, c’est-à-dire à faire de la place en nous-mêmes y compris à ce que nous n’avons pas choisi dans notre vie, il faut cependant ajouter une autre caractéristique importante : le courage créatif, surtout quand on rencontre des difficultés. En effet, devant une difficulté on peut s’arrêter et abandonner la partie, ou bien on peut se donner de la peine. Ce sont parfois les difficultés qui tirent de nous des ressources que nous ne pensons même pas avoir.

Bien des fois, en lisant les “Évangiles de l’enfance”, on se demande pourquoi Dieu n’est pas intervenu de manière directe et claire. Mais Dieu intervient à travers des événements et des personnes. Joseph est l’homme par qui Dieu prend soin des commencements de l’histoire de la rédemption. Il est le vrai “miracle” par lequel Dieu sauve l’Enfant et sa mère. Le Ciel intervient en faisant confiance au courage créatif de cet homme qui, arrivant à Bethléem et ne trouvant pas un logement où Marie pourra accoucher, aménage une étable et l’arrange afin qu’elle devienne, autant que possible, un lieu accueillant pour le Fils de Dieu qui vient au monde (Lc 2, 6-7). Devant le danger imminent d’Hérode qui veut tuer l’Enfant, Joseph est alerté, une fois encore en rêve, pour le défendre, et il organise la fuite en Égypte au cœur de la nuit (Mt 2, 13-14).

Une lecture superficielle de ces récits donne toujours l’impression que le monde est à la merci des forts et des puissants. Mais la “bonne nouvelle” de l’Évangile est de montrer comment, malgré l’arrogance et la violence des dominateurs terrestres, Dieu trouve toujours un moyen pour réaliser son plan de salut. Même notre vie semble parfois à la merci des pouvoirs forts. Mais l’Évangile nous dit que, ce qui compte, Dieu réussit toujours à le sauver à condition que nous ayons le courage créatif du charpentier de Nazareth qui sait transformer un problème en opportunité, faisant toujours confiance à la Providence.

Si quelquefois Dieu semble ne pas nous aider, cela ne signifie pas qu’il nous a abandonnés, mais qu’il nous fait confiance, qu’il fait confiance en ce que nous pouvons projeter, inventer, trouver.

Il s’agit du même courage créatif démontré par les amis du paralytique qui le descendent par le toit pour le présenter à Jésus (Lc 5, 17-26). La difficulté n’a pas arrêté l’audace et l’obstination de ces amis. Ils étaient convaincus que Jésus pouvait guérir le malade et « comme ils ne savaient par où l’introduire à cause de la foule, ils montèrent sur le toit et, à travers les tuiles, ils le descendirent avec sa civière, au milieu, devant Jésus. Voyant leur foi, il dit : “Homme, tes péchés te sont remis” ». Jésus reconnaît la foi créative avec laquelle ces hommes ont cherché à lui amener leur ami malade.

L’Évangile ne donne pas d’informations concernant le temps pendant lequel Marie, Joseph et l’Enfant restèrent en Égypte. Cependant, ils auront certainement dû manger, trouver une maison, un travail. Il ne faut pas beaucoup d’imagination pour remplir le silence de l’Évangile à ce propos. La sainte Famille a dû affronter des problèmes concrets comme toutes les autres familles, comme beaucoup de nos frères migrants qui encore aujourd’hui risquent leur vie, contraints par les malheurs et la faim. En ce sens, je crois que saint Joseph est vraiment un patron spécial pour tous ceux qui doivent laisser leur terre à cause des guerres, de la haine, de la persécution et de la misère.

À la fin de chaque événement qui voit Joseph comme protagoniste, l’Évangile note qu’il se lève, prend avec lui l’Enfant et sa mère, et fait ce que Dieu lui a ordonné (Mt 1, 24 ; 2, 14.21). Jésus et Marie sa Mère sont, en effet, le trésor le plus précieux de notre foi.[21]

On ne peut pas séparer, dans le plan du salut, le Fils de la mère, de celle qui « avança dans son pèlerinage de foi, gardant fidèlement l’union avec son Fils jusqu’à la croix ».[22]

Nous devons toujours nous demander si nous défendons de toutes nos forces Jésus et Marie qui sont mystérieusement confiés à notre responsabilité, à notre soin, à notre garde. Le Fils du Tout-Puissant vient dans le monde en assumant une condition de grande faiblesse. Il se fait dépendant de Joseph pour être défendu, protégé, soigné, élevé. Dieu fait confiance à cet homme, comme le fait Marie qui trouve en Joseph celui qui, non seulement veut lui sauver la vie, mais qui s’occupera toujours d’elle et de l’Enfant. En ce sens, Joseph ne peut pas ne pas être le Gardien de l’Église, parce que l’Église est le prolongement du Corps du Christ dans l’histoire, et en même temps dans la maternité de l’Église est esquissée la maternité de Marie.[23] Joseph, en continuant de protéger l’Église, continue de protéger l’Enfant et sa mère, et nous aussi en aimant l’Église nous continuons d’aimer l’Enfant et sa mère.

Cet Enfant est celui qui dira : « Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait  » (Mt 25, 40). Ainsi chaque nécessiteux, chaque pauvre, chaque souffrant, chaque moribond, chaque étranger, chaque prisonnier, chaque malade est “l’Enfant” que Joseph continue de défendre. C’est pourquoi saint Joseph est invoqué comme protecteur des miséreux, des nécessiteux, des exilés, des affligés, des pauvres, des moribonds. Et c’est pourquoi l’Église ne peut pas ne pas aimer avant tout les derniers, parce que Jésus a placé en eux une préférence, il s’identifie à eux personnellement. Nous devons apprendre de Joseph le même soin et la même responsabilité : aimer l’Enfant et sa mère ; aimer les Sacrements et la charité ; aimer l’Église et les pauvres. Chacune de ces réalités est toujours l’Enfant et sa mère.

 

► Si quelquefois Dieu semble ne pas nous aider, cela ne signifie pas qu’il nous a abandonnés, mais qu’il nous fait confiance, qu’il fait confiance en ce que nous pouvons projeter, inventer, trouver.

  • VIC p 136

À la fin de chaque événement qui voit Joseph comme protagoniste, l’Évangile note qu’il se lève, prend avec lui l’Enfant et sa mère, et fait ce que Dieu lui a ordonné.

  • VIC p 89

 

6. Père travailleur

Le rapport avec le travail est un aspect qui caractérise saint Joseph et qui est mis en évidence depuis la première Encyclique sociale, Rerum novarum, de Léon XIII. Saint Joseph était un charpentier qui a travaillé honnêtement pour garantir la subsistance de sa famille. Jésus a appris de lui la valeur, la dignité et la joie de ce que signifie manger le pain, fruit de son travail.

À notre époque où le travail semble représenter de nouveau une urgente question sociale et où le chômage atteint parfois des niveaux impressionnants, y compris dans les nations où pendant des décennies on a vécu un certain bien-être, il est nécessaire de comprendre, avec une conscience renouvelée, la signification du travail qui donne la dignité et dont notre Saint est le patron exemplaire.

Le travail devient participation à l’œuvre même du salut, occasion pour hâter l’avènement du Royaume, développer les potentialités et qualités personnelles en les mettant au service de la société et de la communion. Le travail devient occasion de réalisation, non seulement pour soi-même mais surtout pour ce noyau originel de la société qu’est la famille. Une famille où manque le travail est davantage exposée aux difficultés, aux tensions, aux fractures et même à la tentation désespérée et désespérante de la dissolution. Comment pourrions-nous parler de la dignité humaine sans vouloir garantir, à tous et à chacun, la possibilité d’une digne subsistance ?

La personne qui travaille, quelle que soit sa tâche, collabore avec Dieu lui-même et devient un peu créatrice du monde qui nous entoure. La crise de notre époque, qui est une crise économique, sociale, culturelle et spirituelle, peut représenter pour tous un appel à redécouvrir la valeur, l’importance et la nécessité du travail pour donner naissance à une nouvelle “normalité” dont personne n’est exclu. Le travail de saint Joseph nous rappelle que Dieu lui-même fait homme n’a pas dédaigné de travailler. La perte du travail qui frappe de nombreux frères et sœurs, et qui est en augmentation ces derniers temps à cause de la pandémie de la Covid-19, doit être un rappel à revoir nos priorités. Implorons saint Joseph travailleur pour que nous puissions trouver des chemins qui nous engagent à dire : aucun jeune, aucune personne, aucune famille sans travail !

► Je choisis un moment pour réfléchir à mon engagement en société pour le Bien commun (au travail, dans une association, en paroisse, …
Je rends grâce à Dieu de m’appeler à co-créer le monde avec lui et je prends conscience de la responsabilité qu’il m’a confiée pour bâtir la civilisation de l’amour.

  • VIC p 155

 

Prière à saint Joseph

Dieu, créateur de l’univers, tu veux que l’homme, par son travail,
te rende gloire en continuant ton œuvre ;
Permets en ta bonté, qu’à l’exemple de saint Joseph et sous sa protection, nous accomplissons les tâches que tu nous donnes,
et recevions la joie promise au bon serviteur.
Par Jésus le Christ, notre Seigneur.
Amen.

 

Missel Romain, 1er mai
 

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Notes

[20] Cf. Dt 10, 19 ; Ex 22, 20-22 ; Lc 10, 29-37.
[21] Cf. S. Rituum Congreg., Quemadmodum Deus (8 décembre 1870) : AAS (1870-71), p. 194.
[22] Conc. Œcum Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 58.
[23] Catéchisme de l’Église Catholique, nn. 963-970.

 


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