Dimanche 17 décembre 2023, dimanche de Gaudete
ORDINATION DIACONALE DE PIERRE CUSSONNET
À L’ ÉGLISE NOTRE-DAME DE L’ASSOMPTION
DE GRENADE-SUR-GARONNE
LE DIMANCHE 17 DÉCEMBRE 2023, DIMANCHE DE GAUDETE
« Qui es-tu ? », demandent les prêtres et les lévites à Jean-Baptiste. Celui-ci répond en commençant par dire ce qu’il n’est pas : il n’est pas le Christ, il n’est pas le prophète Elie, il n’est pas le Prophète annoncé, il est la voix qui crie dans le désert et prépare le chemin du Seigneur. Pour connaître Jean-Baptiste, il faut comprendre qu’il n’est rien sans le Christ ; il est complètement référé au Christ ; il le précède dans sa naissance, dans sa prédication, dans sa mort ; au point qu’on le prendra pour le Christ. Jean-Baptiste a une parole énergique qui vient secouer le peuple de Dieu et réveiller en lui l’attente du sauveur. Elevé dans le désert, il a le sens de l’Absolu de Dieu et donc aussi le sens du péché qu’il dénonce vigoureusement. Sa parole est tranchante, sans concession. A l’écouter, les gens pouvaient s’attendre à un jugement imminent. Il secoue pour rendre possible l’accueil de la douceur de la grâce, manifestée par la vulnérabilité du Nouveau-Né de la Crèche. Jean-Baptiste s’identifie à sa mission ; il n’est rien sans le Christ qu’il annonce et dont il ne se sent pas digne de délier la courroie de sa sandale.
Qui es-tu, Pierre, toi qui a entendu l’appel de Dieu à devenir prêtre ? un homme qui ne peut comprendre son propre mystère qu’à la lumière du Christ. Le Verbe de Dieu éclaire tout homme en venant dans le monde, nous dit St Jean dans son Prologue. Il éclaire chacun d’entre nous dans son être profond, dans sa vocation, dans ce qu’il est appelé à devenir, chacun de nous est référé au Christ, depuis que le Fils de Dieu a assumé la condition humaine. Aujourd’hui, tu deviens diacre, serviteur du Christ et de l’Eglise, par l’imposition de mes mains. Mais qu’est-ce qu’un diacre ? Comme St Jean Baptiste, on peut le définir par ce qu’il n’est pas : il n’est pas un prêtre, ni un sous-prêtre ; il n’est pas pasteur ; il n’est pas un fidèle laïc, puisqu’il est ordonné et reçoit le premier degré du sacrement de l’ordre.
Le diacre n’est rien sans les relations dans lesquelles il est établi comme serviteur.
Le diacre n’est pas en première ligne. Il seconde l’évêque et ses prêtres pour les soulager dans le service de la Parole, de la liturgie, de la charité. La Didascalie des Apôtres, texte du IIIème siècle dit du diacre : « Que le diacre rapporte tout à l’évêque comme le Messie à son Père. Que le diacre ordonne par lui-même tout ce qui est de son ressort et que l’évêque juge le reste ; cependant, que le diacre soit l’oreille de l’évêque, (qu’il soit) sa bouche, son cœur et son âme, parce que vous êtes deux en une seule volonté et, dans votre unanimité, l’Église aussi trouvera la paix ». Il est l’oreille de l’évêque pour lui rapporter de qu’il voit auprès des petits, des pauvres, des personnes en souffrances, des prisonniers, des malades. Le diacre doit donc être un veilleur, un homme au regard clairvoyant, pour transmettre à l’évêque ce qu’il voit et susciter la charité de l’Eglise. Il est la bouche de l’évêque pour proclamer la Parole de Dieu, pour préparer les cœurs à L’accueillir par la prédication, la première annonce, la catéchèse. Il est le cœur de l’évêque pour témoigner de sa compassion auprès des personnes blessées, « cabossées ». Le diacre élargit, en quelque sorte, le regard et le cœur de l’évêque et des prêtres, le regard et le cœur de la communauté pour permettre une mission plus féconde. Les diacres sont des précurseurs du Christ, de l’Eglise, des pasteurs, de l’accueil des pauvres dans la communauté : ils préparent le chemin à la Parole de Dieu, à la grâce du Christ, à sa compassion, à l’accueil de l’Esprit Saint et des pauvres ; cela est signifié dans la liturgie par la proclamation de l’Evangile, la préparation de l’autel et par le baiser de paix.
Ce qui caractérise le diacre est la dépendance : la dépendance vis-à-vis du Christ, de l’Eglise, de l’évêque, de son curé, de l’assemblée réunie, des malades et des pauvres, de tous ceux qui sont hors de l’assemblée. Dans l’Eglise, Il fait le lien entre celui qui préside (l’évêque ou le prêtre) et l’assemblée, par le service de l’autel, entre l’assemblée et les absents (malades, prisonniers…), entre l’assemblée et tous ceux qui sont encore au-dehors, particulièrement les personnes délaissées et démunies. Le bon serviteur est lié à son Maître, cherchant à entrer dans ses vues, toujours disponible, en tenue de service. La Didascalie parle d’une seule volonté entre l’évêque et le diacre : la condition de cette unanimité est que les deux recherchent la volonté de Dieu et veuillent la mettre en pratique.
Le diacre est donc profondément relié et au service de l’Alliance et de la communion ; il n’est pas l’acteur principal de la communion, mais il la rend possible. C’est dire combien il doit aimer Dieu par-dessus tout, ce qui suppose une vie de prière personnelle solidement établie, et l’engagement à la prière de l’Eglise pour toute l’humanité. Comment pourrait-il aimer l’Eglise et les pauvres sans une charité ardente, puisée à la source même, en Dieu. Aimer l’Eglise non pas telle qu’on la rêve, non pas à partir de sa propre sensibilité, mais telle que le Christ la veut, et telle qu’Elle est dans sa réalité concrète, composée des pécheurs que nous sommes. Aimer les petits, les pauvres, avec un cœur large, compatissant, miséricordieux ; aimer les gens et aller au-devant de tous.
La dépendance qui caractérise le diacre est la dépendance de l’amour ; c’est en effet l’amour qui conduit à se faire serviteur de tous, à la suite du Christ.
Pierre, aujourd’hui, tu te donnes totalement au Seigneur, et tu le signifies par le célibat en vue du Royaume dans lequel que tu viens de t’engager. Puisse l’amour de Dieu embraser ton cœur et être le feu intérieur qui te pousse vers les autres. Puisses-tu donner à d’autres le désir de s’engager pour goûter la joie de servir !
+ Guy de Kerimel
Archevêque de Toulouse