- le 25 juin 2023 -

Anthony et Antoine, le Christ vous a choisis et appelés pour être avec Lui, pour partager sa vie, sa prière, sa mission, ses souffrances et ses joies, pour être témoins et serviteurs de sa victoire par sa mort et sa résurrection. Plus que jamais, c’est Lui qui est le centre de votre vie, le fondement de votre être et de votre ministère. En effet, de même qu’on ne peut séparer la consécration baptismale de la mission du baptisé, de même on ne peut séparer chez le ministre ordonné, l’être et le ministère. La prêtrise n’est pas seulement une fonction, mais une consécration qui vous unit au Christ Bon Pasteur pour la vie, et vous associe étroitement à son Œuvre de salut, dans l’Église qui est son Corps. Vous allez devenir prêtres, collaborateurs de l’ordre épiscopal, membre du collège des prêtres et du presbytérium de Toulouse, chargés d’annoncer le Christ, d’être serviteurs de sa grâce par laquelle Il nous sauve, dispensateurs des mystères, des sacrements, pasteurs au nom du Christ pour conduire vers Dieu Notre Père ceux qui seront confiés à votre ministère.

Le Christ vous consacre aujourd’hui et vous envoie en mission, dans notre diocèse de Toulouse, à la suite des Apôtres et de tous les évêques et les prêtres qui ont été envoyés avant vous. Vous vous inscrivez dans une longue chaîne humaine qui part du Christ et conduit à Lui. Le chapitre 10 de l’évangile selon saint Matthieu, d’où est tiré le passage que nous venons d’entendre, décrit le choix des Douze et leur départ en mission. Jésus les envoie proclamer le royaume de Dieu, guérir les malades, ressusciter les morts, purifier les lépreux, chasser les démons. Il les invite à donner gratuitement comme ils ont reçu gratuitement. Jésus ne leur cache pas les difficultés ; Il les envoie comme des agneaux au milieu des loups. Il les veut faibles, pauvres, les mains vides. Non pas des loups conquérants, mais des agneaux qui mendient l’hospitalité des maisons et des cœurs. Il leur prédit des combats, des persécutions, tout en ne cessant de leur répéter : « Ne craignez pas ! ».

Le disciple du Christ reçoit la mission de porter au monde la Parole de Dieu, une Parole vivante et agissante qui vient toucher les cœurs et les mettre en lumière. La Parole de Dieu dérange car elle révèle un Dieu Amour, un Dieu qui s’abaisse, un Dieu crucifié ; elle révèle les mœurs du royaume de Dieu qui font de ceux qui en vivent et qui en témoignent des signes de contradictions dans le monde. Alors que la loi du plus fort règne dans le monde, avec l’attrait pour le pouvoir, la richesse, la tentation de réduire toute la création, et parfois jusqu’aux personnes humaines, à des produits de consommation, Jésus annonce la loi de l’amour. Il déclare que les premiers seront les derniers, Il met en avant les petits enfants et ceux qui leur ressemblent. Il invite à l’obéissance filiale et à l’humilité, tandis que l’orgueil et l’égocentrisme semblent dominer le monde. Deux logiques s’affrontent, dont l’une conduit à la vie, l’autre à l’esclavage et à la mort.

La Parole de Dieu dérange, mais c’est pour sortir l’être humain de ses enfermements, de son égocentrisme, des ténèbres mortelles. Dieu veut nous sortir de nos petits conforts, de nos petits esclavages, de nos petites compromissions, de nos petits cercles, de nos désirs intéressés. Il nous dérange parce qu’Il nous aime et nous veut libres ; Il souhaite pouvoir compter réellement sur nous pour collaborer à son Œuvre. Pour ne pas écouter la Parole de Dieu qui le dérange, l’être humain est tenté de s’en prendre à ceux qui La porte. La plupart des prophètes ont été persécutés ; de même, Jésus prévient ses disciples qu’ils vont rencontrer des hostilités.
« Soyez sans crainte », nous dit Jésus. Nous sommes dans la main de Dieu et rien ne peut nous arriver sans qu’Il le veuille. C’est dire combien les chrétiens que nous sommes doivent cultiver un esprit de foi, pour ne pas tomber dans la tentation du repli sur soi, de la compromission avec l’esprit du monde, ou d’un esprit de reconquête plus politique qu’évangélique. Nous sommes dans un monde qui, dans sa philosophie et sa culture, refuse l’Évangile ; si nous ne sommes pas du monde, nous sommes cependant dans le monde, et nous avons mission de lui porter la Bonne Nouvelle ; or, on ne peut évangéliser sans aimer. Nous ne pouvons pas nous constituer en forteresse assiégée, et rester entre nous. Par ailleurs, par peur, par refus d’être signes de contradiction, ou pour nous faire bien voir, nous ne pouvons pas non plus renoncer à l’exigence évangélique. Enfin nous ne pouvons pas imposer la foi par la force, au risque de témoigner d’une idole plus que du Dieu de Jésus-Christ.
« Soyez sans crainte », nous répète Jésus. Nous sommes dans la main du Père, nous avons reçu l’Esprit Saint, notre Avocat Divin, notre Défenseur, mais aussi Celui qui nous pousse vers ce monde pour témoigner de la victoire du Christ sur le mal. Dieu déploie sa puissance dans notre faiblesse. Tous les ministres ordonnés peuvent en témoigner, et sans doute de très nombreux baptisés.

Les prêtres reçoivent tous les instruments de la victoire pour exercer avec fécondité leur mission : le glaive de la Parole de Dieu, les sacrements et les sacramentaux qui guérissent les malades, qui ressuscitent les morts pour les introduire, par le baptême, dans la vie nouvelle du Christ Ressuscité ; les sacrements qui purifient en réconciliant avec Dieu, qui nourrissent et fortifient en nous donnant le Pain de vie ; le sacramental qui expulse les démons ; la charité divine que rien ne peut arrêter. Le Christ a laissé à son Eglise tout ce dont elle a besoin pour accomplir sa mission. À chacun d’accueillir les dons de Dieu et de les faire fructifier dans l’unité du Corps du Christ. Anthony et Antoine, et nous tous qui formons l’Église du Christ en Haute-Garonne, soyons donc humblement fiers d’avoir été appelés par le Christ à participer à sa mission et soyons sans crainte !

 + Guy de Kerimel
 Archevêque de Toulouse