Homélie de la célébration de l'appel décisif 2024

CÉLÉBRATION DE L’APPEL DÉCISIF
À LA BASILIQUE SAINTE-GERMAINE
DE PIBRAC
LE DIMANCHE 18 FÉVRIER 2024

 

Trois passages extraits des lettres des catéchumènes :

« Qui cherches-tu ? La vérité, dit ma raison ; l’Amour, dit mon cœur. »

« J’ai trouvé en Jésus un confident, une présence apaisante et réconfortante. Il est devenu mon guide, m’offrant la force de persévérer, de surmonter les épreuves et de réussir là où j’aurais dû flancher. Ma relation avec Lui a transformé ma vision du monde et ma propre vie. J’ai découvert une foi vivante, agissante, capable de muer la désolation en espérance, la faiblesse en force. (...) Cette foi n’est plus un refuge dans l’épreuve mais le socle de ma vie. Elle m’a porté à travers les moments difficiles, éclairé mes choix et mes engagements, et m’a insufflé la volonté de me mettre au service des autres, à l’image de ce que Jésus enseigne. »

« Comment décrire avec de simples mots humains ce que ce chemin a changé pour moi ? C’est comme essayer de raconter la beauté du monde : impossible. J’étais aveugle, je vois. J’étais perdue dans les ténèbres, je vis dans la lumière, le monde était un puzzle dont je n’arrivais pas à agencer les pièces, je porte la paix, enfin, en moi. J’ai dans mon cœur un petit brasier de joie et d’amour, que je peux à présent partager, donner, transmettre pour réchauffer. Ce feu, c’est l’Amour du Seigneur, cette lumière sa paix. Par l’oraison et la prière, je viens boire à sa Source et L’implorer de me transformer, petit à petit. Aujourd’hui, je peux dire que Jésus est pour moi la Vérité, le Chemin et la Vie. »

 

Chers catéchumènes, nous sommes entrés, depuis mercredi, dans le temps du carême, dans ce temps de purification et de renouvellement, qui va vous conduire au baptême et qui va nous permettre à nous qui sommes déjà baptisés de raviver en nous la grâce baptismale. Nous suivons Jésus au désert, où Il est resté quarante jours.

Le désert est un lieu de privation, habité par le silence, où il est difficile de satisfaire ses appétits de consommation. L’eau et la nourriture y sont rares ou absents. Au désert, il n’y a rien, on ne peut pas se distraire ; on est confronté avec soi-même. Il n’y a rien, il n’y a personne, sauf Dieu. Il ne nous est pas possible de partir quarante jours dans un des déserts du monde, mais nous pouvons faire plus de place à Dieu dans nos vies encombrées, en réduisant le bruit et les occasions innombrables de rester à la surface de nous-mêmes ; nous pouvons prévoir des temps et des lieux qui nous permettent de faire silence, de descendre dans notre cœur, d’écouter Dieu qui veut nous parler. Plusieurs d’entre vous témoignent dans leur lettre du bien qu’ils ont ressenti en entrant dans une église ; ils y ont trouvé la paix. Une église est un lieu de silence habité, quand il n’y a pas d’office ; celui qui y entre prend du recul par rapport à l’agitation de la ville et du monde. Il se pose, il fait silence, il écoute. Durant ce carême, nous pouvons jeûner de choses inutiles ou superficielles, nous pouvons trouver des lieux de silence et de paix, pour nous recentrer sur Dieu et Lui donner plus de temps et d’importance dans nos vies.

Le désert est le lieu où l’on expérimente l’Absolu de Dieu. Dieu parfois semble y remplir tout l’espace et le temps. Sa présence comble nos cœurs, lui ouvre des horizons infinis, et nous révèle notre propre néant, tout en nous établissant dans une paix profonde. C’est au désert que Dieu a révélé son Nom à Moïse, c’est là que Dieu a manifesté sa gloire. Au désert, Dieu a nourri son peuple et l’a abreuvé en faisant jaillir l’eau d’un rocher. Au désert, Dieu donne ce qu’il faut à chacun, pas plus, pas moins. Prenons l’habitude de compter sur Dieu et de Le mettre à la première place ; le reste nous sera donner par Lui, selon nos besoins.

Le désert est le lieu de l’Alliance : c’est là que Dieu donne à son peuple les tables de la Loi, les Dix Paroles qui sont comme des balises sur le chemin vers la Terre Promise. C’est là que le peuple s’engage à être fidèle à Dieu qui s’est révélé à lui. Le temps du carême est, pour vous catéchumènes le temps de confirmer votre choix de suivre Jésus et de vous engager envers Lui, comme Lui s’engage envers vous. Pour nous baptisés, il est le temps de redire « oui » à Dieu, à son amour prévenant.

Le désert est aussi le temps de la tentation, le lieu du combat spirituel. Jésus est tenté par Satan, au désert. Il combat pour nous, pour nous apprendre à être libres, face aux tentations. St Marc ne détaille pas les tentations, contrairement à St Matthieu et St Luc. Les tentations portent toujours sur les appétits charnels, la richesse, et la toute-puissance. Il suffit de regarder ce qui se vit dans notre monde pour le constater. Le Christ est vainqueur de la tentation par la vertu de tempérance (jeûne, chasteté), la pauvreté, l’obéissance à son Père. Il nous a montré le chemin de la liberté ; sa grâce nous aide à avancer sur ce chemin de vie et à persévérer pour ne pas flancher dans les épreuves. Chers catéchumènes, vous allez vivre les scrutins, vous allez vous laisser scruter par la Parole de Dieu, pour être vraiment libres face au Tentateur, pour que votre engagement envers le Christ soit vrai et fécond.

Après avoir évoqué les tentations auxquelles Satan a soumis Jésus, St Marc nous présente Jésus parmi les bêtes sauvages et servi par les anges : c’est une vision paradisiaque ; c’était le projet de Dieu à l’origine, projet défiguré par notre péché. Jésus vainqueur nous permet d’espérer un monde réconcilié. Beaucoup d’entre vous font mention dans vos lettres de la paix, expérimentée sur ce chemin de conversion au Christ. Certains évoquent des pardons donnés. Cette paix est déjà un signe de la réconciliation avec Dieu, avec les autres, avec vous-mêmes ; elle est un avant-goût de ce monde réconcilié, fraternel, auquel tout être humain aspire.

Par notre baptême, nous avons déjà un pied dans ce monde réconcilié par la croix du Christ, le monde de la résurrection. Mais nous avons encore à avancer dans ce monde blessé, à lutter, avec la grâce du Christ contre le péché et le mal ; à témoigner de l’espérance à ceux qui n’ont pas d’horizons si ce n’est la mort. Le Seigneur compte sur nous, chers catéchumènes et vous, chers frères et sœurs, pour hâter l’avènement du monde nouveau.

 

+ Guy de Kerimel
Archevêque de Toulouse