L’Ascension, un don et une mission

 

La résurrection de Jésus est une Pâque, c’est-à-dire un passage, accompli dans sa personne, de notre monde dans le monde de Dieu, mais aussi un passage du monde de Dieu dans notre monde. Si nous essayons de transposer en nos existences l’expérience de Jésus en nous appropriant le mystère de l’Ascension afin d’en récolter les fruits, alors nous constatons que cette montée au ciel est à la fois un don et une mission. En tant que passage de la terre au ciel, l’Ascension est une grâce faite à l’humanité ; d’un autre côté, en tant que descente du ciel sur les hommes, elle devient pour eux une mission à accomplir, un don à faire fructifier.

 

Jésus monte au Ciel pour faire descendre la vie divine sur terre

Le ciel où Jésus entre le jour de l’Ascension pour nous y préparer une place, ainsi qu’il le dit lui-même la veille de sa Passion (Jn 14,2), est un don d’en haut. Le christianisme, en effet, n’est pas une religion où l’élan des fidèles vers le haut est premier. Ce qui vient d’abord, c’est le mouvement descendant de haut en bas. Autrement dit, ce n’est pas nous qui escaladons le ciel, c’est Dieu qui se penche vers nous. Et ce mouvement est valable aussi pour l’Ascension : en effet Jésus est retourné auprès du Père après être descendu « jusqu’aux régions inférieures de la terre » (Ep 4,9). Aussi le Ciel vers lequel nous tournons nos regards est-il le couronnement de l’œuvre du Christ. Il est la vie divine qu’il nous a acquise, et non un lieu mythique. Le Ciel nous est donc offert gracieusement. Voilà pourquoi la meilleure disposition à cultiver pour bénéficier de la grâce liée au mystère de l’Ascension consiste à rester disponible aux dons de Dieu. Le Ciel est une réalité qui s’accueille.

 

Le Ciel sur la terre

Cependant, le Ciel n’a pas vocation à rester une réalité... éthérée ! Comme nous le disions plus haut, il n’est pas un lieu, un coin élevé de l’espace, mais une vie avec la Trinité. Or, Dieu ne désire pas partager Son intimité avec nous seulement après notre mort. C’est dès maintenant, dans nos existences quotidiennes, que nous avons à vivre le Ciel. Et le Ciel est communicatif. Il a vocation à s’étendre, à rejoindre tous les hommes – avec notre concours. Dieu nous dispense Ses grâces célestes afin que nous les fassions fructifier au bénéfice de nos frères et sœurs. Les yeux fixés intérieurement sur Jésus rentré dans la maison de son Père céleste, nous devons toutefois les abaisser extérieurement sur les réalités terrestres. Car notre mission consiste à semer des graines d’éternité dans l’existence quotidienne. Le Ciel, la vie divine, a déjà commencé. Notre vie d’ici-bas est un apprentissage de notre communion avec les trois Personnes de la Trinité.

La fête de l’Ascension, loin de nous faire fuir la terre, nous pousse au contraire à y travailler avec plus de persévérance que jamais ! C’est la raison pour laquelle les anges demandent aux disciples de ne pas regarder vers le ciel, après l’enlèvement de Jésus dans les Actes des Apôtres (Ac 1,11). Célébration du départ visible du Christ, l’Ascension est, en même temps, introduction à l’envoi en mission des disciples : « Vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » dit-il aux apôtres avant de s’élever au ciel. Pour nous, être témoin de l’Ascension consiste à révéler aux hommes à quelle dignité Dieu les élève et à quelle vie Il les appelle. C’est témoigner que la vie avec Dieu vaut infiniment mieux qu’une existence accrochée aux idoles qui se nomment argent, puissance, jouissance effrénée ou petit bien-être étriqué et égoïste. Le Ciel, c’est gratifiant, divin, généreux, et c’est maintenant !

Jean-Michel Castaing