La désappropriation et le partage

Texte de Mgr de Kerimel - Carême 2023

La désappropriation et le partage

Être artisan de paix demande d’acquérir le sens du partage et un réel détachement vis-à-vis des biens. Le partage est une question de justice, comme je l’ai évoqué la semaine dernière, mais il va plus loin. Il relève aussi de la charité, de l’amour du prochain. Nous sommes appelés à partager notre superflu mais aussi notre nécessaire. Pour cela nous avons besoin d’être éduqués au sens du commun, c’est-à-dire qu’un bien reçu, matériel, intellectuel, culturel, ou autre, n’est pas à garder égoïstement pour soi, mais à mettre au service de tous, de manière directe ou indirecte. Nous l’avons appris des dons spirituels reçus à la confirmation ou lors d’une ordination, ou encore des charismes : plus ils sont mis au service des autres, plus ils grandissent ; moins ils sont mis au service des autres et plus ils s’atrophient. Ce qui est vrai des dons spirituels l’est d’une certaine manière pour tous les biens. Les richesses, quelles qu’elles soient, sont toujours en vue du bien de tous. Jésus, dans l’évangile selon saint Luc, dénonce celui qui amasse pour lui-même au lieu d’être riche en vue de Dieu (cf. Luc 12, 21). Ce n’est pas une remise en question de la propriété privée mais une remise en question d’une destination égoïste du bien.


Garder jalousement pour soi un bien, sans en faire profiter les autres (famille, amis, ou des cercles plus larges), suscitera inévitablement des tensions et des guerres. Combien de ruptures dans les familles pour des questions d’héritage ? Combien de conflits entre les peuples pour des biens conservés égoïstement et suscitant des convoitises ?


Le détachement ou la désappropriation permettent plus facilement le partage des richesses, et rappelle à leur propriétaire la finalité des biens en leur possession. C’est ainsi que les personnes détachées peuvent œuvrer avec fécondité pour la paix.

 

 + Guy de Kerimel
 Archevêque de Toulouse

 


Actualité publiée le 17 mars 2023