Marie-Christine Monnoyer, réflexion sur la place du travail

Les rapports entre travail et vie chrétienne, qu’en dites-vous ?

Marie-Christine Monnoyer, réflexion sur la place du travail

Marie-Christine Monnoyer est Professeur Emérite en sciences de gestion à l’Université Toulouse 1 Capitole, Secrétaire générale des Semaines Sociales de Toulouse, et titulaire de la Chaire Jean Rodhain de l’Institut Catholique de Toulouse. Elle apporte, pour ce dernier témoignage, des éléments de réflexion afin de penser la place du travail dans la vie des chrétiens.


Le travail, qu’il soit rémunéré ou non, occupe dans la vie des hommes et des femmes une place centrale. Il est non seulement vital économiquement mais aussi structurant pour la personne. Pourtant nombreux sont ceux qui rêvent parfois de ne pas avoir à travailler. Est-ce qu’une vie sans travail serait un rêve intéressant ? À cela, je réponds non. Non pour des raisons économiques, culturelles et non encore pour des raisons chrétiennes.


À moins d’être héritier, le travail est le seul moyen pour subvenir à ses besoins et le seul moyen de faire vivre ses rêves. L’indépendance passe donc nécessairement par le travail « sans tendre la main », y compris pour les femmes qui ont longtemps travaillé sans toucher de revenus. Bien sûr il est important de prendre en compte les conditions de ce travail. Car si celui-ci est pourvoyeur d’autonomie - même lorsqu’il est modeste, il doit aussi être vécu sereinement et harmonieusement. L’harmonie dépend des relations humaines vécues et appréhendées. Si celles-ci sont bonnes, la personne se sentira exister aux yeux de ses collègues. Les chômeurs ou les retraités le savent bien puisque l’absence de travail marque souvent pour eux la fin de la participation à la vie économique et l’isolement par rapport à la vie relationnelle.


Face à cela, trouver des ressorts est une nécessité. Les chrétiens peuvent ici se révéler par la qualité d’attention et d’écoute qu’ils porteront à leur prochain, quelque soit les situations. Leur capacité d’action est également à prendre en compte. Si nul ne peut changer le monde dans son entreprise, chacun a toujours le pouvoir d’agir à sa mesure. Ce simple moteur est source de vie. Les femmes qui occupent des postes importants doivent inventer des moyens bien à elles de devenir dirigeante.

Je voudrais insister aussi sur la valeur du travail non rémunéré comme complémentaire de la ressource financière. Le travail non rémunéré et la logique du don qu’il implique sont sources de richesse parfois négligées. On retrouve bien souvent dans la vie associative, ou même dans le simple engagement auprès de ses petits enfants, cette capacité à se mettre en relation avec les autres, à donner et à recevoir. Donner des compétences, du temps, de l’affection est un capital supplémentaire que les chrétiens doivent rechercher. À travers ces engagements ce sont de nouvelles parcelles de vie que chacun découvre en soi et pour les autres. À chacun de trouver sa logique de don, y compris dans son travail. C’est une dimension que nous ne devons pas écarter et qui se construit tout au long de la vie.

Propos recueillis par Bénédicte Rigou-Chemin